Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 21 juin 2018 à 21h30
Défense du droit de propriété — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen grave dans le marbre que, « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé ».

Pourtant, aujourd'hui, en toute impunité, circulent sur internet des petites astuces en tout genre, et même parfois de véritables guides pour apprendre à devenir de bons petits squatteurs : « le guide du squatteur illustré », « le squat de A à Z », « petit manuel du squat », « le manuel du parfait squatteur », n'en jetez plus ! Et manifestement, ceux qui piétinent sans vergogne la propriété des autres en sont assez fiers puisque pour eux, tout cela est, disent-ils, « le produit d'une écriture collective » ! On y apprend donc naturellement qu'il faut bien choisir sa maison, faire un petit repérage des lieux et même une première visite. Dit ainsi, on se croirait presque sur le site d'un agent immobilier tout ce qu'il y a de plus classique.

Mais l'illusion ne dure pas longtemps. Car pendant que certains se prennent pour des sortes de Robin des bois des temps modernes, il y a les autres : les victimes. Comme cette quinquagénaire du Var déjà citée qui, à cause de locataires devenus squatteurs, a fini, parce qu'elle était à court d'argent, par devoir vendre son appartement ; elle est aujourd'hui à la rue. Sans aller si loin, les exemples ne manquent pas. En 2017, le propriétaire d'un immeuble a saisi le juge des référés du tribunal d'instance de Béziers pour demander l'évacuation d'une quinzaine de squatteurs. Cela faisait un an que ces personnes vivaient dans le logement sans qu'aucun contrat de bail ne les lie au propriétaire : un an de perdu !

Pourquoi se mentir, la législation actuelle est très favorable aux squatteurs et bien moins aux propriétaires ou aux locataires. Nous sommes aujourd'hui confrontés à des situations véritablement ubuesques, dans lesquelles certaines personnes peuvent, parfois en toute impunité, du moins durant un certain laps de temps, narguer à la fois le propriétaire légal, la loi et la justice. Les Français ne comprennent plus.

On l'a dit, les opérations de squat sont très souvent préméditées. Ainsi, lorsqu'un propriétaire se retrouve impuissant et démuni face à des occupants, sans titre mais souvent plein de morgue à son égard, l'impuissance se double d'un véritable sentiment d'injustice. Un infortuné propriétaire explique ainsi : « Je n'ai surtout pas le sentiment d'avoir la loi de mon côté. » Comment, en effet, faire comprendre à un propriétaire spolié de son bien que, s'il s'agissait d'une voiture ou d'une moto et non d'un immeuble, il rentrerait bien plus vite dans ses droits ?

Le squat constitue une atteinte inacceptable au droit de propriété, qui a pourtant valeur constitutionnelle. Il nous faut donc agir, et vite.

J'ai d'ailleurs proposé, dans le cadre de l'examen de la loi ELAN, d'élargir les dispositions de l'article 2264 du code civil à l'occupation sans droit ni titre d'un bien immobilier appartenant à un tiers et de punir cette occupation illégale d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Malheureusement, ma proposition n'a retenu l'attention ni du Gouvernement ni celle de sa majorité.

Afin que les maires puissent appuyer les propriétaires dans leurs droits, j'avais aussi suggéré, toujours lors de l'examen du projet de loi ELAN, d'étoffer ainsi l'article 53 du code de procédure pénale : « Le cas échéant, lorsque le maire a connaissance de l'occupation du domicile d'un de ses administrés ou de l'occupation d'un logement vacant, dans les conditions déterminées au premier alinéa, il peut, après avoir cherché par tous moyens à contacter le propriétaire ou le locataire du logement occupé, demander au préfet de mettre en demeure l'occupant de quitter les lieux. » Mais, là encore, ma proposition, plus girondine que jacobine, n'a retenu ni l'attention du Gouvernement ni celle de sa majorité.

Alors je me réjouis de voir que nos collègues du groupe Les Républicains s'emparent de la question par leur proposition de loi, que je soutiens et à laquelle j'apporterai bien entendu mon suffrage.

En France, au nom du droit au logement et de la protection des locataires, on néglige trop souvent les propriétaires victimes d'occupants illicites. Si l'on reste les bras croisés, c'est la « méthode Bassem » qui risque de se généraliser. Vous savez, ce jeune homme qui, choqué par l'histoire de Youssef, dont le pavillon avait été squatté par seize Roms, a incité d'autres jeunes à monter une équipe afin de déloger les squatteurs. Cela s'appelle tout simplement se faire justice soi-même. Est-ce cela que vous souhaitez ?

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