Intervention de Olivier Gaillard

Séance en hémicycle du lundi 18 juin 2018 à 16h00
Décote applicable aux cessions de biens et actifs immobiliers du domaine privé de l'État — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Gaillard :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur général, monsieur le rapporteur spécial, monsieur le président de la commission, chers collègues, nous examinons une proposition de résolution de notre collègue Mattei sur un dispositif âgé de cinq ans qui concourt à la politique immobilière de l'État – dont le compte d'affectation spéciale existe depuis une dizaine d'années – , mais aussi à la politique du logement social.

Ce dispositif, dit « cessions Duflot », se définit par la décote applicable aux cessions de biens immobiliers et actifs de l'État. Il est mis en oeuvre dans le cadre d'une politique immobilière qui montre des insuffisances, en raison du tiraillement entre, d'une part, des enjeux financiers, tenant à la gestion du parc, et, d'autre part, des finalités de service public, parfois contradictoires. De plus, les produits de cessions ont été affectés au désendettement de l'État.

La politique immobilière de l'État s'essouffle, c'est un fait, abstraction faite des « cessions Duflot », comme l'attestent plusieurs facteurs : l'intervention accrue de tiers financeurs ; le manque d'entretien régulier de l'actif immobilier de l'État, qui compromet la qualité de l'offre du service public et engendre d'importants surcoûts d'entretien ; un montant annuel tiré des ventes dépendant fortement de quelques ventes exceptionnelles.

À cela s'ajoute un stock important de biens cessibles non encore cédés : 34 % des biens à vendre au début de 2015 étaient encore sur le marché à la fin de 2017. Pour 2017, les recettes des cessions immobilières sont sensiblement inférieures – elles accusent une diminution de 32,1 % – et, d'une année à l'autre, diminuent de près de 40 %, tout comme le nombre de biens cédés, qui décroît de près de 24 %. Malgré les recettes supplémentaires liées aux redevances domaniales, on dépensait, en 2017, 7 % de moins pour l'entretien du parc.

Des progrès importants doivent être relevés du côté des cessions, dont dépend la soutenabilité de la politique immobilière. Des cessions publiques ont pu être réalisées grâce à d'importantes décotes, en application de la loi du 18 janvier 2013. La proposition de résolution de notre collègue Jean-Paul Mattei a pour objet d'instituer un dispositif réglementaire fixant les modalités de calcul et les plafonnements de la décote, ainsi qu'un véritable contrôle financier a posteriori des opérations de cessions de biens immobiliers de l'État avec décote.

D'un côté, les conclusions du référé de la Cour des comptes d'octobre 2017 sont sans appel : la décote, dans son économie actuelle, aboutit à une mobilisation excessive de moyens au regard des résultats obtenus dans la construction de logements, notamment sociaux. D'un autre côté, on assiste à la constitution d'un stock de biens à céder, manifestement difficilement vendables, in fine coûteux pour les finances publiques. S'exprime dès lors un double besoin : libérer mais aussi encadrer plus strictement les décotes, ce qui peut paraître paradoxal.

Pourtant, la décote doit être facilitée pour certains biens et, pour d'autres, strictement encadrée. Il s'agit aussi de prendre en considération la situation spécifique de Paris, et d'en tirer les enseignements appropriés en matière de décote. Les tensions sur la production de logements locatifs sociaux ont justifié le pastillage d'un certain nombre de biens parisiens susceptibles de faire l'objet de décotes. Dans le même temps, la ville a fait de la promotion privée très performante, en vendant des biens à prix fort, ce qui n'est pas sans poser un problème de transfert de recettes.

Cela nous ramène à l'exigence de hiérarchiser les priorités et les solutions sur l'ensemble du parc, dans un contexte de gouvernance rénové où la direction de l'immobilier se comporte en vrai propriétaire, grâce à un recensement affiné du parc. À ce jour, par exemple, l'inventaire immobilier du domaine hospitalier est quasi inexistant.

Pour ces aspects liés à la pratique des décotes « Duflot », la proposition de résolution en appelle légitimement à une révision du dispositif réglementaire fixant les critères de calcul et les plafonnements de la décote, par une prise en considération accrue des réserves foncières dont disposent les personnes publiques, ainsi que du coût moyen de construction des logements sociaux dans une aire urbaine donnée. Ce texte pourrait être complété par un rappel de l'utilité et de la pertinence du dispositif de décote, à condition, bien entendu, que sa mise en oeuvre soit mieux encadrée et tienne compte de la situation des biens et des contextes locaux.

Les pistes d'amélioration en matière de décote concernent également les mesures visant à une meilleure organisation. Il s'agirait de systématiser la transmission des décisions d'inutilité préfectorales aux ministères concernés et d'optimiser les cessions, en dotant l'État propriétaire d'une structure d'appui à compétence interministérielle, consacrée à la valorisation des biens, sur le modèle de la mission de réalisation des actifs immobiliers du ministère de la défense.

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