Intervention de Stéphane Mazars

Séance en hémicycle du jeudi 21 juin 2018 à 9h30
Lutte contre les groupuscules prônant la violence — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Mazars :

Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, oui, les manifestations du 1er mai 2018 ont été marquées par un déchaînement de violence inadmissible : 1 200 black blocs, et peut-être même plus, ont infiltré le défilé syndical et débordé les forces de l'ordre présentes pour assurer la sécurité du cortège. Ils ont ainsi saccagé, et parfois même incendié, plusieurs commerces et véhicules, et porté atteinte à l'intégrité physique de plusieurs policiers en action.

Oui, il faut condamner ces violences intolérables, car elles portent atteinte directement aux biens et aux personnes et constituent des infractions pénales qui troublent gravement l'ordre public.

À ce stade, il faut saluer le travail de nos forces de l'ordre, dont l'action a permis de limiter les destructions et les agressions physiques. Sans leur professionnalisme, le bilan aurait pu être encore plus lourd.

Il faut aussi condamner ces violences, car elles remettent en cause le droit fondamental de manifester, auquel nous sommes tous ici très attachés et qui est indispensable à l'expression démocratique. Il est vrai, en effet, le droit de manifester, qui se rattache au droit d'expression collective des idées et des opinions, est aujourd'hui mis à mal pas ces exactions qui en limitent l'accès et parfois même en délégitiment l'exercice.

Faut-il pour autant créer une commission d'enquête relative à la lutte contre les groupuscules prônant la violence, comme le demande la proposition de résolution du groupe Les Républicains déposée le 28 mai dernier sur le bureau de l'Assemblée ?

La commission des lois a rejeté cette proposition et ce sera encore le sens du vote du groupe La République en marche dans cet hémicycle. Il faut tout d'abord relever, comme l'a fait en commission notre collègue Thomas Rudigoz, les hésitations du groupe Les Républicains, qui visait dans un premier temps les groupuscules d'extrême gauche, notamment les black blocs, avant d'élargir le spectre de l'enquête souhaitée à l'extrême droite, notamment aux groupuscules identitaires, non moins violents. De même, dans un premier temps, le groupe Les Républicains focalisait toute l'attention sur les événements du 1er mai, avant d'élargir le champ des investigations sollicitées à l'ensemble des comportements violents de ces groupuscules ultras.

Ces atermoiements témoignent d'une volonté difficilement dissimulable de remettre en cause, au travers de cette demande de création d'une commission d'enquête, le bon fonctionnement de l'appareil d'État dans sa capacité actuelle de maintenir l'ordre, au regard notamment des faits récents du 1er mai.

Or, chers collègues du groupe Les Républicains, soyez rassurés : la maison France est bien tenue ! Nos forces de l'ordre et nos services de renseignements sont compétents et engagés, et nous savons que les événements du 1er mai dernier ne pouvaient être mieux anticipés et maîtrisés, dans la mesure où il est question d'individus qu'il est difficile d'identifier et de contrôler, car ils se fondent dans la foule des manifestants avant de se regrouper et de former un collectif soudé, mobile et déterminé. Les forces de l'ordre étaient en nombre suffisant et l'on ne peut sérieusement leur reprocher d'avoir tardé à intervenir, car elles avaient à exécuter une manoeuvre délicate, consistant à isoler les fauteurs de troubles, tout en assurant simultanément la sécurité des manifestants.

Notre arsenal juridique permet de poursuivre et de condamner ces délinquants. D'ailleurs, après les événements du 1er mai, plusieurs dizaines de fauteurs de troubles ont été interpellés, placés en garde à vue et, pour certains d'entre eux, traduits devant un tribunal correctionnel dans le cadre de comparutions immédiates, et des condamnations parfois très lourdes ont été prononcées. En effet, depuis le décès de Clément Méric, l'État a mis en oeuvre des dispositions législatives qui permettent d'interpeller, de poursuivre et de condamner ce type de délinquants sur le fondement de l'article R. 645-14 ou de l'article 222-14-2 du code pénal.

La justice n'a jamais fait preuve de clémence ni de complaisance. Sept ans de prison ont été requis contre les cinq jeunes qui avaient incendié une voiture de policiers en marge d'une manifestation, en mai 2016. Notre dispositif législatif a aussi permis de dissoudre certains des mouvements les plus opaques et actifs comme Troisième voie, Jeunesses nationalistes révolutionnaires, l'Œuvre française ou, plus récemment, le groupe picard White Wolf Klan.

Aussi, plus qu'une commission d'enquête, ce sont des moyens supplémentaires qu'il faut continuer à donner à nos forces de l'ordre et à nos services de renseignements et d'investigation. C'est le sens de la politique déterminée et responsable que mène le Gouvernement pour rétablir l'ordre républicain en tout lieu et en tout moment. Et il convient de saluer, dans le cadre d'un nécessaire retour sur expérience, les annonces faites par M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, Gérard Collomb : des mesures seront mises en oeuvre lors des manifestations à venir, telles que des moyens de vidéos embarqués sur les forces mobiles ou encore l'insertion d'officiers de police judiciaire au sein des unités de maintien de l'ordre pour faciliter la constatation des infractions en temps réel.

Il convient également et enfin de saluer l'annonce faite par M. le ministre de l'intérieur, qui va travailler conjointement avec la garde des Sceaux afin d'apporter à notre arsenal des moyens supplémentaires pour contrer cette nouvelle forme de violence au sein de manifestations, qui remettent en cause cette nécessaire respiration démocratique dont l'État se doit aussi d'être le garant.

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