Intervention de Pierre Cordier

Séance en hémicycle du mercredi 7 mars 2018 à 15h00
Convention d'entraide judiciaire en matière pénale avec les comores — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Cordier :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens tout d'abord, madame la présidente de la commission, à vous remercier à mon tour d'avoir inscrit cette question à l'ordre du jour afin que nous puissions ici très librement en discuter.

Il nous revient aujourd'hui d'examiner la convention d'entraide judiciaire entre la France et l'Union des Comores, dont l'objet est de rendre les échanges plus fluides et plus utiles entre les autorités judiciaires de nos deux pays. Renforcer l'entraide judiciaire entre la France et les Comores apparaît d'autant plus essentiel que nous connaissons un important flux de population de l'Union des Comores vers Mayotte, cent unième département français.

Au-delà de cet accord d'entraide judiciaire, dont on ne peut que se féliciter, il convient, malgré tout, d'appeler l'attention du Gouvernement sur la crise sociale, sécuritaire et politique que connaît Mayotte depuis plusieurs jours, comme l'ont fait remarquer nos collègues et amis Didier Quentin et Mansour Kamardine devant la commission des affaires étrangères en janvier dernier.

Alors que l'île de Mayotte est secouée depuis le 20 février par un mouvement de contestation populaire contre l'insécurité, il convient de rappeler que Mayotte a demandé la protection de la France dès 1841. Les Mahorais s'estimaient, à juste titre, victimes des « sultans batailleurs ». Les trois autres îles n'ont rejoint l'Union française qu'à la fin du XIXe siècle. Il y a donc une spécificité de la situation de Mayotte.

Les Mahorais se sont exprimés très clairement, à plusieurs reprises, pour le maintien de l'île au sein de la République française. Dans les années 1974 et 1975, une partie du Gouvernement, dont le Président de la République et le ministre des affaires étrangères, Louis de Guiringaut, voulaient aller vers l'indépendance, afin d'aider notre diplomatie face au groupe des 77. Un certain nombre de personnes ont alors tenu bon.

L'appartenance à la France de cette île de 374 kilomètres carrés, dont la population atteint aujourd'hui 265 000 habitants selon les chiffres officiels de l'INSEE, mais dont le nombre réel doit atteindre les 400 000 personnes au regard des chiffres de la consommation, est parfaitement claire. Seulement 130 000 d'entre eux, soit moins de la moitié, sont de nationalité française. Sur les deux tiers restants, la moitié est malheureusement en situation irrégulière.

Vous comprendrez donc aisément les difficultés qui ont été soulignées par notre collègue Mansour Kamardine, devant la commission des affaires étrangères, le 31 janvier dernier. Laurent Wauquiez est allé à la rencontre de nos compatriotes de l'océan Indien il y a quelques jours. Il a dénoncé l'abandon, par le Gouvernement, de Mayotte, qui se trouve dans une situation qui n'est plus acceptable pour les Mahorais. Il a rappelé qu' « aucun autre département de France n'accepterait ce qui se passe ici », en visant l'immigration clandestine à Mayotte en provenance notamment des Comores.

En effet, les Mahorais ont de plus en plus de mal à avoir accès aux services publics, et il en résulte une réelle rupture d'égalité. Ils ont, mes chers collègues, le sentiment d'être des citoyens de seconde zone, des citoyens entièrement à part, alors qu'ils sont des Français à part entière.

Les populations comoriennes tentent d'atteindre Mayotte sur des embarcations de fortune, dans l'espoir de voir leurs conditions de vie s'améliorer. Les femmes enceintes espèrent notamment voir leurs enfants nés sur le sol de Mayotte obtenir la nationalité française. Il suffit de savoir que la maternité de Mamoudzou enregistre plus de 10 000 naissances par an, dont 74 % sont issues de femmes en situation irrégulière.

J'ajoute que des populations non comoriennes cherchent elles aussi à rejoindre ce territoire de la République française, alors même qu'il n'est plus en mesure de recevoir qui que ce soit, ne pouvant accueillir, comme le disait Michel Rocard, « toute la misère du monde ».

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.