Intervention de Laurianne Rossi

Séance en hémicycle du jeudi 1er février 2018 à 21h30
Euthanasie et suicide assisté pour une fin de vie digne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurianne Rossi :

Notre assemblée y a déjà partiellement répondu à plusieurs reprises, notamment en adoptant la loi Kouchner en 1992, la loi Leonetti en 2005 et la loi Claeys-Leonetti en 2016. Toutes ont placé le malade au centre des décisions qui le concernent. Ainsi, un patient ne peut plus être soumis à un traitement dont il ne voudrait pas et demeure maître des décisions à son sujet. L'instauration des directives anticipées et la désignation d'une personne de confiance ont pour but de garantir ce droit, indépendamment de l'état de conscience du patient.

Si je suis attachée, à titre personnel, à une évolution législative en ce qui concerne la fin de vie, il me semble toutefois essentiel de ne pas se précipiter quand il s'agit d'une question de société aussi cruciale, qui ressortit à l'essence et à la conception même de la condition humaine. Il me semble donc préférable d'attendre les conclusions du rapport d'étape sur la loi Claeys-Leonetti commandé par Mme la ministre de la santé à l'inspection générale des affaires sociales et celles du rapport sur la fin de vie élaboré par le Conseil économique, social et environnemental, dont la publication est prévue au mois d'avril 2018. Il me semble également primordial d'attendre les conclusions des états généraux de la bioéthique, tout juste engagés, qui ouvrent dans chaque région une période de débat public rassemblant experts et citoyens.

Les résultats attendus de cette concertation inédite devront éclairer cette assemblée lors de la révision de la loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique qui s'ensuivra. Le sujet crucial de la fin de vie y sera bien entendu abordé.

Nonobstant ce débat de société, il est essentiel de veiller à l'application pleine et entière du cadre actuel de la loi, qui permet déjà à chacun d'exprimer ses dernières volontés. Il importe que le dispositif existant soit pleinement utilisé. D'ailleurs, le comité national de suivi pour le développement des soins palliatifs et de l'accompagnement de la fin de vie travaille à l'application de la loi sur le territoire. La loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des personnes malades et des personnes en fin de vie est encore récente. Sans doute faut-il encore un peu de temps pour que les professionnels de santé l'intègrent dans leurs pratiques et que nos concitoyens connaissent tous leurs nouveaux droits.

En outre, il ne faut pas éluder la notion d'accompagnement dans les derniers moments de la vie, afin que tout soit fait pour soulager au mieux la souffrance physique et psychologique des patients. Quant aux soins palliatifs, indissociables de la fin de vie, ils doivent nous mobiliser. Là réside tout l'enjeu du plan gouvernemental. Les moyens qui leur sont alloués doivent être à la hauteur des souffrances qu'il faut soulager et de la dignité qu'il faut préserver.

Comme vous, chers collègues du groupe La France insoumise, nous sommes mobilisés sur ces sujets. Nous pensons que la loi peut évoluer afin de permettre à ceux qui sentent que leur mort est imminente de choisir, notamment leur façon de mourir, sans souffrir et dans la dignité. Il y va de la liberté de tout un chacun de disposer de son propre corps, tout en garantissant une décision du patient éclairée et encadrée et en préservant la liberté de conscience du personnel médical.

Mes chers collègues, le sujet est suffisamment grave pour mériter une réflexion plus longue et plus approfondie, dans le cadre d'un débat à la hauteur de l'enjeu, un débat qui ne peut se tenir maintenant et dans un format si réduit. Non, monsieur Corbière, nous n'avons pas peur de regarder la mort en face. Acceptez simplement que certaines décisions méritent le temps de la réflexion, de l'analyse et de la discussion. Il faut faire en sorte que citoyens, patients et médecins soient entendus et respectés.

Soyez certains, chers collègues, que nous serons présents, une fois ce temps écoulé, pour débattre avec vous, ici même, des évolutions législatives nécessaires au respect d'une fin de vie digne, portant sur la mort ce regard tranquille cher à Jaurès. Pour ces raisons, j'appelle au renvoi en commission de la proposition de loi.

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