Intervention de Jacqueline Gourault

Séance en hémicycle du jeudi 1er février 2018 à 15h00
Récépissé de contrôle d'identité — Présentation

Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'état, ministre de l'intérieur :

Dans son discours du 18 octobre 2017 aux forces de sécurité intérieure, le Président de la République a tracé les grandes orientations de notre action en la matière. Tout en écartant l'idée d'une mise en place du récépissé en cas de contrôle d'identité, le chef de l'État a tracé trois pistes de transformation ayant pour objet l'amélioration des relations entre les membres des forces de l'ordre et la population : définir les missions prioritaires et éviter les contrôles systématiques ; envoyer sur les terrains difficiles les fonctionnaires les plus expérimentés et renforcer qualitativement l'encadrement ; étendre les dispositifs de caméras-piétons avec pragmatisme et volontarisme.

Je ne m'étendrai pas ici sur la description du cadre juridique des contrôles d'identité, défini à l'article 78-2 du code de procédure pénale, qui obéit à des fins de levée de doute sur un comportement observé ou de contrôle aléatoire à des fins de prévention. Je veux en revanche rappeler les développements récents de la jurisprudence en la matière.

Tout d'abord, par trois décisions du 9 novembre 2016, la Cour de cassation a confirmé la condamnation de l'État pour faute lourde dans le fonctionnement du service public de la justice pour des contrôles d'identité réalisés sur réquisitions du procureur de la République sur le fondement de l'article 78-2 et qu'elle a jugés discriminatoires. Ces décisions définissent les modes de preuve de la discrimination. Comme en droit du travail, il appartient à la personne qui a fait l'objet d'un contrôle d'identité et qui saisit le tribunal d'apporter au juge des éléments qui laissent présumer l'existence d'une discrimination. C'est ensuite à l'administration soit de démontrer l'absence de discrimination, soit de justifier la différence de traitement par des éléments objectifs.

Par ailleurs, le 24 janvier 2017, le Conseil constitutionnel, saisi de deux questions prioritaires de constitutionnalité, a déclaré conformes à la Constitution les dispositions du code autorisant à procéder à des contrôles d'identité, en formulant trois réserves : la mise en oeuvre des contrôles d'identité doit s'opérer en se fondant exclusivement sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes ; le procureur de la République ne peut retenir des lieux et périodes sans lien avec la recherche des infractions visées dans les réquisitions ; le procureur ne peut, par un cumul de réquisitions, autoriser la pratique de contrôles d'identité généralisés dans le temps et dans l'espace. Ces décisions récentes démontrent clairement, s'il en était besoin, que les contrôles d'identité ne sauraient être utilisés de manière discriminatoire : quand ils le sont, car cela peut effectivement arriver, les juridictions les sanctionnent !

Mon propos n'est pas pour autant de nier que la pratique des contrôles d'identité soit sujette à débats ou à interrogations. De ce point de vue, le ministère de l'intérieur n'est pas demeuré passif face à ces débats et a pris un certain nombre de mesures.

Ainsi, le 1er janvier 2014, est entré en vigueur un nouveau code de déontologie commun à la police et à la gendarmerie nationales, encadrant pour la première fois le déroulement concret des contrôles d'identité, notamment les palpations de sécurité, et rappelant le principe de non-discrimination. Selon les termes de ce code, « lorsque la loi l'autorise à procéder à un contrôle d'identité, le policier ou le gendarme ne se fonde sur aucune caractéristique physique ou aucun signe distinctif pour déterminer les personnes à contrôler, sauf s'il dispose d'un signalement précis motivant le contrôle. Le contrôle d'identité se déroule sans qu'il soit porté atteinte à la dignité de la personne qui en fait l'objet ».

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