Intervention de Liliana Tanguy

Séance en hémicycle du jeudi 1er février 2018 à 15h00
Utilisation de la voie référendaire pour la ratification du traité de libre-échange entre l'union européenne et le canada — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLiliana Tanguy :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le groupe de la France Insoumise nous propose d'adopter aujourd'hui une résolution sur l'utilisation du référendum pour la ratification du CETA. Il nous propose un débat sur l'enjeu démocratique de notre politique commerciale.

Le peuple français a élu Emmanuel Macron pour réformer la France et impulser des changements en Europe. Le Président de la République s'est engagé en faveur d'une politique commerciale plus démocratique et légitime, et notamment pour une évolution du CETA. Le peuple français a aussi accordé sa confiance à la représentation nationale pour accompagner et contrôler l'action de l'exécutif. C'est ce que fait notre majorité parlementaire en suivant de près la négociation et la mise en oeuvre des accords commerciaux dits mixtes.

Nous ne répondrons aux inquiétudes de nos concitoyens à l'égard du CETA qu'en étant étroitement, et le plus tôt possible, associés à sa mise en oeuvre. Dans ce cadre, nous travaillons à la mise en place de mécanismes accrus de consultation et d'information des parlementaires pour instaurer un dialogue continu, transparent et exigeant sur la définition de la politique commerciale européenne. Et nous n'avons évidemment pas attendu ce jour pour le faire ! Dès l'entrée en vigueur provisoire du texte, un groupe de travail CETA s'est naturellement constitué pour engager un dialogue étroit avec le Gouvernement. Nous avons transmis, dès cet automne, nos recommandations au ministère sur la base des préconisations du rapport Schubert et avons activement contribué à l'élaboration du plan d'action gouvernemental.

Alors, que demandons-nous concrètement ?

Nous demandons une augmentation de la surveillance des volumes d'importation de produits sensibles tels que les produits issus de la filière bovine. Dans ce cadre, le Gouvernement a déjà sollicité le soutien de la Commission européenne pour l'amélioration des dispositifs de contrôles, notamment aléatoires, aux frontières.

Nous souhaitons également que l'impact sur nos filières soit précisément mesuré, raison pour laquelle nous avons demandé une étude d'impact sur les régions les plus exposées à l'import de viande bovine et porcine canadienne. Il convient de rappeler que le traité limite le volume d'importation de viande bovine en provenance du Canada, qui ne représente aujourd'hui que 0,8 % de la production de boeuf en Europe.

Nous demandons, par ailleurs, qu'en cas de déstabilisation éventuelle des marchés, les filières concernées soient accompagnées par des mesures économiques qui permettent de maintenir un haut niveau d'exigence.

Enfin, nous oeuvrons à un renforcement, par le biais de l'étiquetage, de la traçabilité de la composition des produits, dans le but d'améliorer l'information des consommateurs.

Il serait prématuré de prendre position sur les progrès accomplis par notre démarche, d'autant plus que le plan d'action gouvernemental prévoit la mise en place d'une étude d'impact attachée au projet de loi de ratification. Celle-ci devra fournir une vue plus précise de l'ampleur des éventuels risques liés à la mise en oeuvre de l'accord.

Mais il est important de comprendre notre démarche. Nous, parlementaires, avons aujourd'hui l'opportunité de nous définir comme des acteur incontournables de la mise en oeuvre de l'accord. Les critiques et interrogations formulées à l'égard du CETA nous permettent de définir une nouvelle méthode de travail, fondée sur la concertation et la définition de standards plus ambitieux sur le long terme. D'ailleurs, nous comptons déjà quelques succès à notre actif ! Le fait que la France soit ainsi parvenue à faire expressément prendre en compte l'accord de Paris dans l'accord commercial avec le Japon, finalisé en décembre dernier, est une victoire.

Mais ce combat ne peut pas être mené seul. Nous le gagnerons à vingt-sept. Dans un contexte de défiance et de retour du protectionnisme, nos concitoyens ont porté au pouvoir une majorité qui croit en « l'Europe qui protège ». Le Président Macron a rappelé à Davos les limites de la mondialisation actuelle, que nous devons réglementer pour en faire une opportunité pour notre économie. Je soutiens notre Président dans ce combat d'ouverture.

L'accord de « nouvelle génération » qu'est le CETA peut nous offrir un niveau de sécurité juridique plus élevé que les accords commerciaux antérieurs, à condition d'être accompagné d'un contrôle démocratique exigeant. Nous n'attribuerons donc pas de chèque en blanc à nos partenaires commerciaux, qui devront toujours respecter les normes européennes pour accéder au marché européen. Mais je considère que le renforcement des relations avec nos amis canadiens doit être vu comme une chance, lorsque l'on sait que la France accuse un déficit commercial de 60 milliards d'euros et que plus de 2 millions d'emplois dépendent des exportations vers des États non européens.

Je vous invite donc, chers collègues, à rejeter cette résolution.

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