Intervention de Bérangère Abba

Séance en hémicycle du mercredi 23 février 2022 à 15h00
Certification européenne du sel biologique — Discussion générale

Bérangère Abba, secrétaire d'État chargée de la biodiversité :

Votre proposition de résolution nous invite à échanger sur les discussions à venir au niveau européen, concernant la définition des règles de certification du sel biologique. Le règlement (UE) 2018/848 relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques est entré en vigueur le 1er janvier 2022. Selon ce texte, le sel marin et les autres sels destinés à l'alimentation humaine et aux aliments pour animaux sont éligibles à la certification en production biologique, à l'instar d'autres produits également visés par ce règlement. S'agissant d'un produit non agricole, des règles de production spécifiques doivent être définies pour le sel, par un acte délégué.

La complexité du sujet, les divergences entre les États membres, mais aussi les inquiétudes des professionnels de la filière biologique comme de la filière du sel ont conduit la Commission européenne à demander au groupe d'experts sur la production biologique, l'EGTOP, de formuler des recommandations et un avis technique sur la production de sel biologique, de recenser les techniques et méthodes existantes et de faire des propositions pour définir des règles de production biologique préalablement à l'élaboration de l'acte délégué.

Ce rapport, remis le 6 août 2021, a soulevé de nombreuses inquiétudes. Il ne s'agit pourtant là que de recommandations, le contenu de l'acte délégué qui fixera les règles de production pour le sel n'étant pas encore connu – la Commission européenne nous a informés qu'un projet devrait être présenté aux États membres, en mars 2022.

Ce rapport prend en considération le sel marin et le sel de mine. Il ne propose que très peu de critères de différenciation entre sel biologique et sel conventionnel. Il permet par exemple le lessivage et l'usage d'additifs non autorisés pour les sels bénéficiant d'une IGP. Il prévoit également la possibilité de mixité sur un même site d'exploitation, ce qui inquiète également, et légitimement, les professionnels des filières bio, du fait des conséquences que cela pourrait avoir sur d'autres secteurs.

Votre proposition de résolution invite le Gouvernement français à défendre un haut niveau d'exigence en matière de certification biologique du sel, pour préserver la confiance que les consommateurs placent dans ce label et pour assurer la compatibilité des méthodes de production avec des principes forts comme celui de la préservation de l'environnement.

Vous faites part de votre inquiétude sur la certification en production biologique du sel gemme. Vous considérez en effet que seul le sel marin, produit par évaporation naturelle de l'eau de mer et impliquant des processus de production manuels, serait compatible avec les exigences de la production biologique, notamment celles de préservation de l'environnement et de caractéristiques naturelles du produit.

Vous estimez en revanche que le sel gemme ne devrait pas pouvoir être certifié biologique, du fait des méthodes de sa production, qui impliquent extraction par forage de l'écorce terrestre, injection d'eau sous pression et chauffage de la saumure pour obtenir le sel par évaporation et cristallisation. La dégradation des sols et l'utilisation de grandes quantités d'eau et d'énergie pour produire ce sel seraient incompatibles avec les objectifs environnementaux poursuivis par la réglementation européenne.

Je vous confirme que, lors de l'élaboration de l'acte délégué, les autorités françaises seront très attentives à ce que des critères de différenciation exigeants soient établis pour le sel bio, dans le respect des grands principes de la production biologique. Nous veillerons ainsi à ce que le sel biologique soit, comme affirmé dans le considérant n° 10 du règlement bio européen, produit au moyen de techniques de production naturelles, à ce que sa production contribue au développement des zones rurales et à ce qu'elle respecte les objectifs du présent règlement. Comme vous, nous souhaitons que la production de sel biologique respecte les objectifs et principes de l'agriculture biologique fixés aux articles 4 et 5 du règlement européen, tels que la protection de l'environnement et du climat, le respect des systèmes naturels, le maintien et l'amélioration de l'état du sol, de l'eau, de l'air et l'utilisation responsable de l'énergie et des ressources naturelles. Nous veillerons à ce que cet acte délégué n'entre pas en contradiction avec ces enjeux.

S'agissant des ressources en eau, notre ligne de conduite doit être la sobriété et l'économie : à l'évidence, on ne peut qualifier de production bio des techniques industrielles qui exploitent surabondamment la ressource en eau. Par ailleurs, des exploitations comme celles des marais salants ont souvent su assurer une cohérence entre l'activité humaine et la préservation de la biodiversité propre à ces écosystèmes particulièrement riches. C'est cet équilibre qu'il faut savoir mettre en avant au travers des certifications bio.

Pour répondre à cet objectif, nous travaillons en concertation avec les différents acteurs français de la filière sel et de la filière biologique. Ce travail permettra d'élaborer et de défendre auprès de la Commission européenne une position française permettant la production du sel selon des critères exigeants et fidèles aux grands principes de l'agriculture biologique.

Je me réjouis de ce travail constructif avec les professionnels de la filière : il montre que des voies existent conciliant activités économiques, sobriété et préservation de l'environnement.

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