Intervention de Vincent Ledoux

Séance en hémicycle du mercredi 23 février 2022 à 15h00
Dénonciation du coup d'État militaire en birmanie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVincent Ledoux :

Il revient à la représentation nationale de se prononcer sur une proposition de résolution nous invitant à dénoncer les faits et les conséquences du coup d'État militaire du 1er février 2021 en Birmanie. Ce jour-là, les forces armées birmanes ont pris de court le reste du monde en dirigeant un coup d'État contre leur gouvernement civil élu. Très rapidement, elles ont procédé à l'arrestation de centaines de personnes, dont le Président de la République, U Win Myint, et la conseillère pour l'État, Daw Aung San Suu Kyi. Elles ont ensuite transféré l'ensemble des pouvoirs au commandant en chef des forces armées qui a immédiatement proclamé l'état d'urgence pour un an, annulé les résultats des élections générales du 8 novembre 2020, interdit les chaînes d'information étrangères et bloqué internet et les réseaux sociaux. Nous connaissons bien cet enchaînement pour l'avoir malheureusement un peu trop souvent observé ailleurs dans le monde : c'est le bâillonnement de la démocratie et le glissement vers une forme de dictature sanglante.

Face à la répression féroce, la communauté internationale est malheureusement restée divisée. Les États-Unis, l'Union européenne et le Royaume-Uni ont sanctionné le régime au pouvoir. Le Conseil de sécurité des Nations unies a publié deux déclarations exprimant son inquiétude et condamnant la violence à l'encontre des manifestants, mais il n'a pas pu dénoncer le coup d'État ni menacer le pays de nouvelles actions, en raison de l'opposition de la Chine, de la Russie, de l'Inde et du Vietnam. Moscou, allié traditionnel de l'armée birmane, a rejeté toute idée de mesures coercitives. Moscou a également confirmé vouloir poursuivre sa coopération militaire avec le pays. Pékin, autre soutien traditionnel de la Birmanie à l'ONU, soucieux de ses intérêts stratégiques et économiques, refuse également de sanctionner la junte.

Or, un an après cette prise de pouvoir par les militaires, le constat documenté par l'opposition, les médias locaux et des experts est accablant : on compte en Birmanie des dizaines de villages brûlés, 1 500 morts et plus de 300 raids aériens depuis le mois de mars 2021. Ces exactions se déroulent à l'abri des regards, dans les zones reculées d'un pays déjà difficile d'accès pour les journalistes étrangers et les ONG.

Le pays est ainsi plongé dans une véritable guerre civile opposant la junte à une constellation de groupes rebelles constitués non seulement de guérilleros aguerris, mais aussi de jeunes manifestants inexpérimentés. Nouvellement unifiée autour des démocrates en exil et leur Gouvernement d'unité nationale, elle prend racine dans des groupes anciens issus de minorités ethniques, rompus aux techniques de guérilla. Parmi eux, les forces de l'Armée pour l'indépendance kachin, l'Armée karen de libération nationale, l'Armée nationale chin, ou encore l'Armée de l'Arakan, constituée par la minorité musulmane des Rohingyas.

Face à cette escalade de la violence et à ces attaques contre les civils, la communauté internationale multiplie les déclarations, mais elle peine à prendre des mesures concrètes comme un boycott international des ventes d'armes à la Birmanie, voire un embargo plus large. Loin des regards la situation humanitaire tend également à s'aggraver, alors que la junte au pouvoir a contesté, ce lundi 21 février, la compétence de la Cour internationale de justice pour se prononcer sur l'accusation de génocide contre les Rohingyas qui sont près de 850 000 à vivre dans des camps de fortune au Bangladesh.

Nous appelons toutes les forces birmanes à sortir de l'impasse dans laquelle elles conduisent leur pays, à mettre fin aux violences, à libérer sans condition et immédiatement tous les prisonniers politiques et à reprendre le chemin du dialogue et de la restauration de l'ordre civil et démocratique. La sortie de crise en Birmanie doit passer par un dialogue politique associant toutes les parties au conflit, et par la cessation immédiate des attaques perpétrées par l'armée contre des populations civiles.

En conséquence, le groupe Agir ensemble est très favorable à la proposition de résolution et remercie Mme Genetet et M. Herbillon d'avoir bien voulu la soumettre à notre assemblée qui clôt ses travaux sur un texte puissant qui, je l'espère, sera entendu très loin, très haut et très fort.

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