Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Séance en hémicycle du mercredi 23 février 2022 à 15h00
Renforcement du droit à l'avortement — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel, rapporteure de la commission des affaires sociales :

C'est avec joie et émotion que je vois aboutir un long cheminement pour le droit des femmes. Comme le rappelait Albane Gaillot, voilà plusieurs mois, depuis la deuxième lecture, que je prends part en tant que corapporteure à cette aventure législative pour le moins atypique, qui démontre que l'action du Parlement peut être collective. Mais au-delà de ce texte, cela fait des années que je suis engagée en faveur du droit à l'avortement, particulièrement depuis le rapport que Cécile Muschotti et moi avons consacré au sujet pour le compte de la délégation aux droits des femmes.

Ce droit, nous ne devons pas l'oublier, est un droit humain, fondamentalement lié à la condition des femmes, à leur liberté, à leur dignité. Ce droit, nous ne devons pas l'oublier, reflète la société que nous voulons construire : une société d'égalité où les femmes sont libres de disposer de leur corps, de construire leur présent et leur avenir comme elles l'entendent. Ce droit enfin, nous ne devons pas l'oublier, est un droit acquis : d'autres se sont durement battus pour l'obtenir et nous, collectivement, pour le renforcer.

C'est ce combat qui nous réunit en vue de la lecture définitive de cette proposition de loi. Les blocages au sein de notre Assemblée, mais aussi de la chambre haute, montrent bien que subsiste la volonté de restreindre ce droit. Or celui-ci n'est pas un privilège accordé aux femmes, une variable d'ajustement : il est, je le répète, fondamental, et notre devoir de législateurs consiste à en garantir l'effectivité dans l'ensemble du territoire. Depuis 1975, plusieurs évolutions législatives sont d'ailleurs allées dans ce sens. Rien qu'au cours de la précédente législature, nous avons supprimé la notion de situation de détresse et le délai de réflexion obligatoire, créé le délit d'entrave à l'IVG, prévu la prise en charge des actes liés à celle-ci.

La proposition de loi s'inscrit tout à fait dans la continuité de ces dispositions, et je me réjouis de constater que c'est de manière transpartisane que nous progressons. Je voudrais bien sûr remercier Albane Gaillot, qui a défendu son texte avec conviction et pugnacité, mais aussi l'ensemble des parlementaires et des groupes qui, à nos côtés, lui ont permis de poursuivre son chemin, ainsi que les associations, professionnels de santé et plannings familiaux ; j'aurai un mot pour Cécile Muschotti, avec laquelle j'ai longuement travaillé et qui, elle aussi, incarne cet engagement en vue de mieux garantir le droit à l'avortement dans notre pays ; pour Marie-Pierre Rixain, qui nous a fait toute confiance et, tout au long de son mandat, aura lutté pour les droits des femmes.

Je voudrais également remercier le Gouvernement : même si nous avons des différends sur certains sujets, il a permis au Parlement de poursuivre son travail sur ce texte et de le faire aboutir en cet avant-dernier jour de session. Mon unique regret demeure le retrait de la suppression de la clause de conscience, suppression qui n'aurait été qu'un alignement sur la rédaction que nous avons adoptée il y a quelques mois au sujet de l'interruption médicale de grossesse (IMG). Nous en prenons acte : je pense pouvoir compter sur la délégation aux droits des femmes pour continuer ce combat durant la prochaine législature. Cela ne doit pas nous empêcher de saluer les grandes avancées que permettra l'adoption de la proposition de loi, en particulier l'allongement du délai légal de l'IVG et l'ouverture de la compétence chirurgicale aux sages-femmes, mesures qui seront essentielles pour améliorer l'accès à l'avortement, dès les prochaines années, dans tous les territoires et pour toutes les femmes.

Souvenons-nous en effet que, si nous adoptons ces dispositions, c'est avant tout pour les femmes. Nous les adopterons pour leur permettre d'exercer leur droit fondamental à l'avortement, obtenu il y a plus de quarante-cinq ans, et auquel toutes peuvent un jour avoir besoin de recourir, quelle qu'en soit la raison. Nous les adopterons pour mieux garantir ce droit aux femmes jeunes, précaires, victimes de violences, éloignées du système de santé ; car si, encore une fois, toutes les femmes peuvent être concernées, les plus vulnérables se trouvent aussi plus souvent en difficulté face à une grossesse non désirée. Ce sont fréquemment ces dernières qui dépassent le délai légal et sont contraintes – quand elles le peuvent – de se rendre à l'étranger pour avorter.

Mes chers collègues, nous sommes appelés à voter un texte qui permettra à ces femmes de faire valoir leur droit et qui renforcera les droits de toutes les femmes. C'est un grand jour pour elles ; l'enjeu est primordial, et je suis convaincue que notre Assemblée se montrera à la hauteur.

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