Intervention de Amélia Lakrafi

Séance en hémicycle du mardi 22 février 2022 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative à l'engagement de la france au sahel

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAmélia Lakrafi :

Les orateurs qui m'ont précédée l'ont rappelé : l'action de la France au Sahel est à la croisée des chemins. Notre retrait du Mali nous amène à la redéfinir en profondeur. Je m'associe aux hommages à nos soldats morts au combat. Leur sacrifice n'est pas vain. Notre dispositif militaire dans la région, aux côtés de nos alliés du G5 Sahel et de nos partenaires européens, a porté un coup sérieux aux mouvements extrémistes.

Ces opérations militaires ne doivent pas faire oublier que notre action repose sur un volet « développement » extrêmement important. En effet, il s'agit non pas simplement de lutter contre les djihadistes mais d'empêcher, par le développement social et économique, que les populations locales affectées par l'absence d'État et la pauvreté ne soient tentées de rejoindre ou de soutenir ces mouvements. Je rappelle que 80 % de la population de ces pays vivent avec moins de 2 euros par jour. Cet aspect de notre action est assurément méconnu de nos concitoyens et – je le regrette particulièrement – trop peu visible dans la bande sahélo-saharienne.

Le rejet de la France que l'on entend parfois s'exprimer dans la région se nourrit de cette mauvaise appréhension de notre action visant à améliorer le niveau de vie des populations locales. Elle se nourrit aussi d'influences externes à ces pays – nous les connaissons tous.

Je voudrais donc ici rappeler notre activité considérable en matière de développement, après avoir rendu hommage aux personnels des agences de l'AFD, de nos ambassades, des entreprises françaises, avec leurs fondations, et des ONG – organisations non gouvernementales – présentes sur le terrain, qui mènent les projets que nous soutenons dans des contextes difficiles.

Le montant total des engagements de l'AFD dans les pays du G5 Sahel depuis 2009 s'élève à 3,8 milliards d'euros, avec une priorité opérationnelle accordée à la zone des trois frontières. Rien qu'en 2021, 340 millions d'euros ont été versés et 170 projets sont en cours.

À mon initiative, aux termes de la dernière loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, un tiers de l'aide-projet destinée par l'État aux bénéficiaires prioritaires de notre aide au développement est directement fléché vers les pays du G5 Sahel. Les réalisations sont très concrètes. Nous parlons en effet, entre autres, de réhabilitation d'écoles, d'installation d'infrastructures pour l'accès à l'eau et à l'électricité, de programmes en faveur de l'éducation des filles ou de l'emploi des jeunes.

Par ailleurs, la France est pleinement engagée aux côtés des autres bailleurs dans le cadre de l'Alliance Sahel, partenariat lancé par la France, l'Allemagne et l'Union européenne avec le soutien de la Banque africaine de développement, de la Banque mondiale et du PNUD – Programme des Nations unies pour le développement. Actuellement, plus de 1 100 projets, pour un montant total de 17,8 milliards d'euros, sont en cours de réalisation. Je souligne que l'importance des fonds réunis est essentiellement due à la mobilisation de la France et du président Emmanuel Macron. Le chef de l'État a justement plaidé la semaine dernière pour placer les populations civiles au cœur de notre stratégie.

Les projets labellisés Alliance Sahel ont eu des résultats concrets. Ainsi, plus de 5 millions de personnes ont bénéficié d'un accès à l'eau potable ; près de 3 millions de personnes ont reçu une assistance alimentaire ; 554 000 personnes ont obtenu un accès à l'électricité ; plus de 660 000 femmes ont eu accès à une méthode de planification familiale et plus de 900 000 adolescentes et adolescents maliens ont pu y être sensibilisés.

Bien entendu, nous ne pouvons pas remplacer l'action des États ; ce n'est pas notre rôle. Mais nous essayons de les accompagner au mieux, au bénéfice de leur population. Il nous faut toutefois mieux communiquer et mieux faire connaître notre action auprès des habitants de ces pays, qui doivent par ailleurs être pleinement associés à l'élaboration de ces politiques. En tant qu'administratrice de l'AFD, je plaide et continuerai à plaider pour que nos réalisations sur le terrain soient visibles, qu'un pont ou un hôpital réhabilité par la France avec l'AFD soit identifié comme tel par les populations locales au moyen d'une signalisation claire.

J'engage notre pays à poursuivre ses actions de développement dans les pays du Sahel mais aussi à prendre en compte cette recommandation afin que les habitants de cette région ne nous voient pas uniquement comme une puissance militaire alors que notre présence dans leur pays est loin de se limiter aux combats.

Pour finir, j'exprime toute ma reconnaissance aux militaires, qui continuent de risquer leur vie sur le terrain. J'ai eu la chance et l'honneur – je les en remercie – de visiter les bases militaires de la force Barkhane à Abéché et à Faya-Largeau au Tchad. Sous quarante-cinq degrés, dans des conditions plus que difficiles, avec plus de 30 kilos de matériel sur le dos, ces militaires se rendent dans les villages pour faire des visites médicales et sauver des vies – parfois celles de bébés victimes d'accidents domestiques. Alors oui, je le sais pour avoir eu de nombreux échanges avec elles, les populations de ces villages reculés en proie aux djihadistes ne souhaitent absolument pas nous voir partir.

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