Intervention de Laurence Trastour-Isnart

Séance en hémicycle du mercredi 2 février 2022 à 15h00
Évolution de la santé psychique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Trastour-Isnart :

L'évolution de la santé psychique dans le contexte de la crise sanitaire mérite toute notre attention. Au cours des deux dernières années de pandémie, de multiples stratégies ont été appliquées pour limiter les risques sanitaires et les restrictions qu'elles comportaient ont eu des conséquences lourdes pour une partie importante de la population. Certes, le virus est toujours là et il faut maintenir une certaine vigilance mais à l'aide d'outils élaborés à travers un dialogue avec les acteurs de terrain.

Les indicateurs révèlent un accroissement des troubles psychiques. Chaque jour, des psychologues alertent sur l'augmentation des demandes de thérapie ou de consultation. Ils disent même parfois n'être pas en mesure d'y répondre, tant elles sont nombreuses. Il est inacceptable qu'en 2021, 18 % des Français, soit près d'un citoyen sur cinq, présentent des signes de troubles dépressifs et 23 % un état anxieux. Ça l'est d'autant plus que ces chiffres étaient respectivement de 10 % et 14 % avant la pandémie. De surcroît, certaines études montrent que 10 % des Français auraient eu des pensées suicidaires au cours de l'année passée, soit deux fois plus qu'avant la pandémie.

Le Gouvernement a déjà formulé plusieurs réponses face à la dégradation de l'état psychique des Français. Force est de constater que les différentes stratégies d'isolement ont eu un effet pervers pour nos concitoyens. Ce qu'il faut, c'est un accompagnement ciblé qui prenne en compte les spécificités des populations particulièrement fragilisées. Je pense aux écoliers, à la jeunesse, aux seniors et plus largement à l'ensemble de nos concitoyens en situation de fragilité économique, psychologique et affective. Je pense aux victimes de violences conjugales, lesquelles n'ont jamais été aussi massives que lors des confinements, exposant tous les membres d'une même famille à la maltraitance sans possibilité de s'en extraire.

Du fait des contraintes induites par le passe sanitaire puis vaccinal, de nombreux résidents d'EHPAD et de maisons de retraite se sont retrouvés coupés de leurs proches, ce qui a précipité certains d'entre eux dans un état de chagrin et de désespoir, syndrome de glissement tout aussi dangereux que le risque épidémique. Quant aux familles qui ne peuvent, encore aujourd'hui, accompagner leurs proches dans leurs derniers instants, elles souffrent également de troubles, confrontées qu'elles sont à l'impossibilité d'engager un travail de deuil.

Je pense aussi aux étudiants dont la détresse psychique témoigne d'une impossibilité de s'y retrouver, compte tenu des bouleversements qu'ils subissent. Les symptômes dépressifs dont ils souffrent sont autant de signes révélateurs de leur mal-être face à un avenir opaque dans une société qui peine à dessiner une sortie de crise.

Je pense encore aux écoliers qui portent un masque toute la journée, même en extérieur. Je pense au secteur scolaire et aux souffrances qu'il a dû endurer du fait de la valse des protocoles, qui a démontré l'incapacité du Gouvernement à avoir une claire vision des réalités du terrain.

L'instauration du passe mais surtout le discours qui le soutient fracturent la population, engendrent des divisions au sein même des familles, créent des tensions parmi les professionnels. Ce clivage délétère ne favorise pas la cohésion de la nation, pourtant nécessaire pour faire face aux enjeux auxquels elle a à répondre dans cette crise qui dépasse celle de la covid.

Nous devons être capables de proposer un système de soutien déployé sur l'ensemble du territoire avec des offres locales ciblées. La santé mentale est fréquemment perçue comme le parent pauvre du système de santé français. Elle se trouve réduite à chercher des solutions d'urgence pour protéger dans l'immédiateté les plus fragiles et les plus précaires.

N'oublions pas que notre devise républicaine comporte le magnifique mot de « fraternité », ce lien spécifique qui nous unit et qui justifie que l'on prenne soin les uns des autres. Il est désormais temps de s'interroger sur des directives qui, par souci de protection, ont abouti à des protocoles ne tenant pas compte de ceux à qui ils s'appliquaient.

Qu'entend faire le Gouvernement face aux plaintes du secteur de la psychiatrie hospitalière et des psychologues cliniciens auxquels je rends hommage pour leur travail ? Quelles mesures compte-t-il prendre pour répondre aux différents défis posés par la santé mentale dégradée de certaines populations fragilisées dans le contexte de la crise sanitaire ?

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