Intervention de Jean-Yves le Drian

Séance en hémicycle du mardi 1er février 2022 à 15h00
Influence de la diplomatie française

Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères :

Nous devons tirer les dividendes politiques de nos engagements financiers dans les organisations internationales, pour faire valoir le droit et faire en sorte que les normes internationales répondent à notre conception de l'humanisme et des droits fondamentaux de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Il faut aussi que nous poursuivions la valorisation de notre expertise culturelle et muséale – j'ai présidé hier matin avec Roselyne Bachelot le comité de suivi du projet d'Al-Ula en Arabie saoudite où devrait s'implanter le centre Pompidou – cette expérience très forte nous donne l'occasion de valoriser notre propre expertise – et, dans le même ordre d'idées, il nous faut soutenir à l'export nos industries culturelles et créatives dont j'ai déjà souligné l'importance.

Sans revenir en détail sur chacune des orientations de la feuille de route dont vous avez pris connaissance, je voudrais évoquer quelques priorités supplémentaires : d'abord, la mise en place d'un enseignement d'excellence du français au service du plurilinguisme et de la jeunesse passe par le développement de l'enseignement français à l'étranger. Le doublement d'ici à 2030 des effectifs des écoles françaises à l'étranger reste notre objectif malgré la pandémie : après un léger recul des effectifs à la rentrée 2020, le nombre d'élèves accueillis est reparti à la hausse à la rentrée 2021, si bien que, depuis 2017, nous avons gagné 30 000 élèves supplémentaires – malgré la crise sanitaire, je le répète. Treize nouveaux établissements viennent par ailleurs de rejoindre notre réseau, ce qui est très encourageant. Ainsi, 552 établissements accueillent désormais 380 000 élèves répartis dans 138 pays ! La France dispose dans ce domaine du premier réseau mondial, ce dont nous pouvons être fiers.

J'ai évoqué précédemment l'enseignement supérieur et la recherche scientifique : lors du forum ministériel de l'Indopacifique que nous organiserons le 22 février prochain dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, nous aurons l'occasion d'accroître notre action dans ce domaine et dans cette zone géographique.

Un mot, enfin, sur la question cruciale de l'information qui est l'enjeu de batailles très intenses. Nous ne défendons pas, dans celles-ci, ce qui serait une ligne officielle de la France, comme le font certaines puissances qui s'appuient sur des organes de propagande au mépris de la liberté de la presse et de l'indépendance des journalistes, qui doivent être au cœur de tout État de droit, mais des principes et des exigences : la fiabilité d'une information dûment vérifiée et le pluralisme des médias. Dans cette perspective, l'audiovisuel extérieur revêt une dimension stratégique. C'est pourquoi, à ma demande, France Médias Monde renforcera son offre dans la zone arabophone et en langues africaines, car l'audience élevée des médias français montre que cette formule répond à un besoin dans le paysage international.

C'est pourquoi nous sommes engagés dans le partenariat « information et démocratie » pour mettre les outils du nouveau multilatéralisme au service du combat contre les manipulations de l'information – M. Rodrigue Kokouendo l'a rappelé. M. Sébastien Nadot, qui n'est plus présent, aurait pu bénéficier des propos de son collègue, mais peut-être s'est-il égaré puisque le sujet de son intervention portait sur l'égarement. Nous agissons aussi en faveur de la formation des journalistes, à travers des projets engagés par CFI, et nous soutenons les médias indépendants, par exemple ceux qui sont menacés par le pouvoir biélorusse. C'est dans le même état d'esprit que nous avons exfiltré de Kaboul et accueilli en France des journalistes afghans en danger.

Avant de conclure, je veux rendre hommage à celles et ceux qui font vivre le réseau culturel et d'influence français au quotidien et à qui il revient désormais de faire vivre au plus près des réalités et des opportunités de terrain notre nouvelle feuille de route : les conseillers d'action culturelle et de coopération ; les équipes des 830 alliances françaises à travers le monde ; les équipes des 125 instituts français pour lesquels je connais votre attachement, comme vous l'avez démontré en insérant dans la proposition de loi modifiant la loi organique relative aux lois de finances une disposition qui sécurise juridiquement ces instituts en leur qualité d'établissements à autonomie financière – mes prédécesseurs et moi-même nous sommes battus depuis très longtemps à ce sujet et cet amendement parlementaire a permis d'avancer en ce sens ; les professeurs et l'ensemble des personnels de l'enseignement français à l'étranger exerçant au sein de 552 établissements ; les 4 millions de Français à l'étranger, enfin, qui constituent aussi des ambassadeurs et qui relaient l'influence française, comme l'a rappelé M. M'jid El Guerrab.

Ils ont tous fait preuve durant la crise pandémique d'un grand sens du service public et d'une inventivité admirable, grâce auxquels nous avons pu maintenir les liens inestimables qui nous unissent aux publics de nos établissements culturels et éducatifs. Ensemble, je veux que nous les remerciions de porter si haut une certaine idée de la culture, généreuse, ouverte, brillante et vibrante qui fait honneur à notre pays et qui nous permet d'être en première ligne dans les nouvelles batailles de l'influence. Je veux également vous remercier, mesdames et messieurs les députés, pour votre rôle dans la diplomatie culturelle.

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