Intervention de Jean François Mbaye

Séance en hémicycle du jeudi 27 janvier 2022 à 9h00
Convention du conseil de l'europe contre le trafic d'organes humains — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean François Mbaye :

De tous les réseaux criminels qui sévissent de par le monde, il n'en est sans doute pas de plus abjects que ceux qui s'adonnent au trafic d'organes. Il n'est en effet pas de mots suffisamment forts pour décrire l'écœurement ressenti à l'idée qu'une personne puisse être privée de son sang et de sa chair pour satisfaire une cupidité inhumaine. Pourtant, vous l'avez rappelé, on considère que 5 à 10 % des greffes réalisées dans le monde résultent de ce fonds de commerce morbide, soit quelque 15 000 transplantations et autant d'organes prélevés au mépris de la dignité et de la vie des êtres humains.

Derrière ce terrible constat, il y en a un autre tout aussi terrible : des femmes et des hommes poussés par le désespoir choisissent d'emprunter des voies criminelles pour bénéficier d'une greffe. Lorsque la maladie et la mort étendent leur empire, celui de la morale et de l'éthique recule souvent en proportion. La confluence de ces deux réalités constitue la spécificité qui fait du trafic d'organes humains une activité criminelle particulièrement atroce. Il ne consiste pas à satisfaire une addiction à des substances psychotropes, pas plus qu'il ne vise à assouvir des ambitions belliqueuses d'un seigneur de guerre en venant grossir son arsenal : non, chers collègues, il ne s'agit rien de moins que de monnayer ce que nous avons toutes et tous de plus précieux, la vie.

Ainsi que je l'avais dit lors de l'examen du projet de loi de ratification en commission des affaires étrangères, la France n'a eu de cesse de renforcer un cadre juridique reposant sur des normes nationales et internationales pour lutter contre ce fléau. Elle est notamment partie à la convention d'Oviedo du 4 avril 1997, qui assure la protection de la dignité de chaque être humain et fait écho, comme vous l'avez rappelé, madame la rapporteure, aux articles 16 et suivants de notre code civil. Ce faisant, elle a fait le choix de graver ces valeurs humanistes tant dans le marbre des traités que dans celui de la loi. Consciente de l'importance de la coopération interétatique pour enrayer des trafics qui revêtent souvent une dimension internationale, la France est également partie à des traités de nature opérationnelle, à l'instar de la convention de Palerme de novembre 2000 contre la criminalité transnationale organisée.

Aujourd'hui, chers collègues, nous nous apprêtons à ajouter une nouvelle pierre à l'édifice normatif. En autorisant la ratification de la convention du Conseil de l'Europe contre le trafic d'organes humains, nous parachèverons une gamme d'instruments dont la combinaison apparaît comme la seule réponse viable aux problèmes existants. Si nous devons bien sûr nous déclarer sans ambiguïté contre ces pratiques odieuses, il est en effet vain de croire que les initiatives individuelles permettront d'y mettre un terme dès lors qu'elles ont lieu en dehors de nos frontières.

À l'image de nombreux défis auxquels nous devons faire face à l'échelle mondiale, la lutte contre ces crimes réclame une mobilisation globale et coordonnée, afin de neutraliser chacun des maillons de ces chaînes criminelles. Concrètement, cela implique bien évidemment de procéder à l'arrestation des trafiquants, mais également de réduire la demande en amont, en sensibilisant les potentiels receveurs d'organes aux risques qu'ils encourent en se soumettant à de telles transplantations. Pour ce faire, la coopération est indispensable partout où elle est possible. La ratification de la convention de Saint-Jacques-de-Compostelle qui nous est proposée permettra de bénéficier d'une base juridique solide et de renforcer les liens existants afin d'en créer de nouveaux.

Convaincu que les postures ne sont jamais gage d'efficacité et que seule une approche pragmatique et résolue contribuera à lutter efficacement contre le trafic d'organes, le groupe La République en marche votera donc en faveur du projet de loi autorisant la ratification de la Convention du Conseil de l'Europe contre le trafic d'organes humains.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.