Intervention de Patrick Vignal

Séance en hémicycle du mercredi 26 janvier 2022 à 15h00
Choix du nom issu de la filiation — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Vignal, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

« Si cette loi passe, je demanderai à porter son nom par respect pour elle, elle qui m'a élevée seule. J'ai été très émue en apprenant cet espoir d'être enfin qui je suis, même soixante-cinq ans après. »

Fabrice, 50 ans : « Je suis né sans père, avec le nom de ma mère. Ma mère a épousé une personne qui m'a reconnu. Mon enfance a été faite d'horreurs et de violences. Pour moi, c'est plus qu'un fardeau. Je souhaite pouvoir prendre le nom de ma mère. Un nom, c'est très important. »

Laure, 31 ans : « Mon fils porte le nom de son papa. Nous sommes ensemble, mais nous vivons loin l'un de l'autre. Lorsque j'ai voulu partir en vacances chez mes parents à l'étranger, je n'avais pas demandé l'autorisation au papa. Alors que j'avais sur moi l'acte de naissance, le livret de famille et un document de la CAF, on m'a refusé l'accès à l'avion et on m'a demandé où était son père. J'ai dû prouver que c'était bien mon fils avec ses photos de naissance. »

Anthony, 27 ans : « Cela fait plus de dix ans que je ne vois plus mon « père », la personne qui m'a toujours humilié, blessé, critiqué, rabaissé comme un moins que rien. Quand on est différent, cela ne passe pas et c'est encore plus grave quand c'est votre père qui est homophobe. Je veux récupérer le nom de naissance de ma maman. »

Depuis que nous parlons de cette proposition de loi, des témoignages nous arrivent de toutes parts et nous disent la force de ce texte pour leur vie quotidienne. Ces concitoyens et ces concitoyennes en appellent à plus de justice, de liberté, d'équité et de fraternité. En votant ce texte, chers collègues, vous ferez cesser des souffrances et vous apaiserez des familles, car il regarde les enfants et les parents. Il regarde le réel, dans une société où la notion de couple et d'égalité, de respect de l'autre, ne cesse de progresser, car cette loi est aussi celle du couple d'aujourd'hui.

L'actuelle procédure de changement de nom est complexe, chère et extrêmement limitative. La mise en œuvre de cette loi ne coûtera quasiment rien. Cette loi va donner un choix, sans l'imposer, donner une liberté, sans rien prendre à personne. Cette loi va dans le sens des intérêts de l'enfant avant tout.

C'est pour cette raison, chers collègues, que je vous proposerai tout à l'heure d'adopter un amendement visant à ce que celui des deux parents qui n'a pas transmis son nom à son enfant puisse l'ajouter en nom d'usage, à la seule condition d'informer l'autre parent. À l'heure actuelle, l'ajout dépend de l'accord du conjoint, tandis que 80 % des noms de famille sont uniquement ceux des pères.

Je voudrais ici adresser mes remerciements à Christophe Castaner, à Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois, à vous-même, madame la vice-présidente, à ma collègue Camille Galliard-Minier, avocate, qui m'a aidé dans ces démarches, ainsi qu'à l'ensemble de mon groupe. Je voudrais également remercier le groupe MODEM, qui a eu l'heureuse initiative de proposer un nouveau titre pour ce texte afin de le rendre plus précis – ce qui importe s'agissant d'un texte qui porte sur le changement de nom –, ainsi que le groupe Agir ensemble et l'ensemble des groupes de gauche, qui ont apporté leur soutien à cette initiative. Enfin, je voudrais évidemment remercier l'ensemble des commissaires aux lois pour les débats constructifs que nous avons eus en commission ainsi que l'ensemble des députés pour leur démarche constructive, comme en attestent les amendements déposés qui susciteront un débat tout aussi constructif.

Ce texte rendra confiance. Cette loi refuse une société du conflit. Elle concernera toutes les générations. Chers collègues, les Françaises et les Français nous regardent. Il faut savoir fendre nos armures politiciennes et nos appartenances partisanes. Et si aujourd'hui, nous décidions de donner raison à la liberté, celle de choisir et de s'approprier son nom ? Ce serait une belle façon de répondre aux nombreuses Françaises et aux nombreux Français désabusés par la manière dont se déroule la vie politique dans notre pays, qui malheureusement tourne souvent à l'affrontement stérile. Après deux années de crise sanitaire qui nous ont épuisés comme elles ont épuisé de nombreux citoyens, cette loi est un texte d'apaisement et de réconciliation politique et sociétale.

Monsieur le ministre, je voudrais vous remercier pour votre écoute, votre engagement et votre soutien inoxydable.

Chers collègues, je vous encourage à voter cette proposition de loi qui ne coûtera rien à personne et fera du bien à la société.

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