Intervention de Gérard Leseul

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 15h00
Augmentation du salaire minimum — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Leseul, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Je vous remercie de vos interventions, chers collègues et madame la ministre déléguée. Nous avons été nombreux à dresser le même constat, au cours de nos interventions : celui du sentiment d'injustice que ressentent de nombreux travailleurs aujourd'hui. Nous avons partagé aussi l'idée que le pacte républicain est aujourd'hui menacé, voire abîmé, et que la cohésion sociale l'est aussi. Sans reprendre les chiffres évoqués par plusieurs collègues, je rappellerai que le partage de la valeur ajoutée s'est dégradé pour les travailleurs tout en s'améliorant pour le capital et les dividendes. Les inégalités deviennent malheureusement de plus en plus flagrantes.

Bien sûr, des mesures ont été prises ; vous les rappellerez sans doute tout à l'heure, chers collègues, dans l'exposé de vos amendements de suppression. Mais elles ne suffisent pas. Nous divergeons fondamentalement sur la sémantique : vous parlez de prélèvements obligatoires et de charges sociales, alors que nous parlons de cotisations et de protection sociale. Les cotisations servent en effet à protéger nos prestations maladie, nos retraites et nos indemnités chômage. Le pouvoir d'achat est, ne nous trompons pas, la préoccupation majeure des Français, celle de tous les travailleurs et de ceux qui sont malheureusement privés de travail.

Bien sûr, vous nous avez rappelé l'existence des primes, notamment de la prime inflation. Mais il existe depuis de nombreuses années un décrochage total entre la perception de leur salaire par les Françaises et les Français et le pouvoir d'achat mesuré, qui traduit aussi leur sentiment à l'égard des primes que vous attribuez.

Les difficultés économiques s'accroissent, comme cela a été rappelé par plusieurs orateurs. À ce titre, nous divergeons aussi sur un point précis : la question du loyer n'est pas suffisamment prise en compte dans l'évaluation du coût de la vie. Il y a donc bien des dépenses contraintes qui augmentent. Je rappellerai seulement quelques chiffres : la part des dépenses contraintes, qui représentait 12 % du revenu d'un ménage en 1959 et 27 % en 2008, atteint aujourd'hui 32 %. Voilà le vrai problème : les dépenses contraintes, qui ne laissent plus aucune liberté.

Vous avez des réponses, madame la ministre déléguée, chers collègues de la majorité, que je qualifierais de libérales. Prime d'activité, prime inflation, allégements de charges : tout cela n'est pas du salaire. Nous avons posé la question de la juste rémunération du labeur, du travail, pas des primes. Par ailleurs, vous renvoyez beaucoup trop souvent, de mon point de vue, au « travailler plus ». Alors que vous savez bien que le temps partiel est contraint, subi, je vous entends répondre qu'il faut travailler davantage, que ce soit sous forme d'heures supplémentaires ou non. Pensez-vous que ceux qui travaillent à temps partiel ne préfèreraient pas travailler à temps complet ?

Les réponses qu'apportent nos voisins devraient nous inciter à revaloriser le SMIC. Notre pacte social, tellement applaudi pendant la crise sanitaire, l'exige. Je rappelle que le SMIC désigne le salaire minimum ; il s'agit donc de permettre un juste paiement du labeur.

Je rappellerai enfin simplement deux chiffres. 165 milliards d'euros : tel est, selon la Banque de France, le montant de l'épargne covid, c'est-à-dire de l'épargne supplémentaire de nous tous, des Françaises et des Français qui disposent de revenus suffisants pour épargner. Un smicard, lui, touche 1 269 euros par mois. Je vous laisse apprécier le gouffre entre ces deux chiffres et l'abîme que vous creuseriez en refusant une revalorisation du travail et une augmentation du SMIC.

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