Intervention de Joël Aviragnet

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 9h00
Urgence contre la désertification médicale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Aviragnet :

…nous alertons le Gouvernement sur l'appel au secours lancé par les Français. J'espère pouvoir leur dire ce soir qu'il ne les a pas, une fois de plus, abandonnés.

Cependant, bien qu'étant optimiste de nature, j'ai bien peur que mes espoirs – et leurs espoirs – ne soient douchés. Je parle en particulier des espoirs des 7,4 millions de Français qui ont le malheur de vivre dans une commune où l'accès à un médecin généraliste est limité, mais aussi de tous ces médecins de campagne qui se tuent à la tâche pour soigner les trop nombreux patients dont ils ont la charge.

La santé demeure, avec le pouvoir d'achat, une des principales sources de préoccupation des Français. Pourtant, les inégalités en matière de santé ne cessent d'augmenter, comme le montrent certains chiffres qui, à titre personnel, me choquent et me font rougir de honte.

Treize départements sont dépourvus de gynécologue. Dans huit départements, les ophtalmologues ne peuvent, faute de disponibilité, prendre de nouveaux patients. La densité de médecins psychiatres pour 100 000 habitants varie de un à quarante selon les départements. Dans les territoires ruraux, 22 % des habitants n'ont pas accès à un service d'urgences à moins de trente minutes. Vous dites, madame la ministre déléguée, qu'il n'existe pas de zone surdense. Or Paris compte deux fois plus de médecins généralistes pour 100 000 habitants que son département voisin plus pauvre, la Seine-Saint-Denis. Toulouse compte deux fois plus de généralistes et trois fois plus de spécialistes que le reste du département – lequel n'est pas le plus sinistré de France.

Il est bon de rappeler ici que l'accès équitable aux soins est un droit garanti par la Constitution. Or nous sommes aujourd'hui loin du compte. Ces chiffres nous montrent qu'il existe en France de nombreux déserts médicaux. Il est donc urgent d'agir.

Tel est l'objet de la proposition de loi de notre collègue Guillaume Garot, qui apporte des solutions concrètes à cette crise. Elle prévoit de mettre en place un conventionnement sélectif, qui consiste, d'une part, à obliger les jeunes étudiants en médecine à travailler, dès le début de leur carrière, là où l'on manque de médecins et, d'autre part, à dissuader les médecins de s'installer dans les territoires déjà bien dotés.

Ce double mécanisme permettrait de répondre à l'urgence. Les citoyens des zones sous-denses, qui plébiscitent ces mesures, l'ont d'ailleurs bien compris. Nos collègues de la majorité n'en ont peut-être pas conscience ou, plus probablement, ne veulent pas regarder la réalité en face. Je m'en suis aperçu encore une fois en commission, quand ils ont voté comme un seul homme la suppression des deux articles de cette proposition de loi.

Leurs arguments sont toujours les mêmes. Tout d'abord, le conventionnement sélectif n'inciterait pas les médecins à s'installer réellement en zone sous-dense car les médecins tricheraient en s'installant en bordure de zone. Or c'est déjà le cas avec le système incitatif qui prévaut aujourd'hui.

Ensuite, il ne serait pas humain de contraindre les médecins – profession libérale – à exercer à un endroit précis. Mais est-il plus humain de laisser 6 millions de nos concitoyens hors de notre système de santé ? Je vous le dis : non.

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