Intervention de Alain David

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 9h00
Condamnation des crimes perpétrés contre les ouïghours — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain David :

Il est des moments intenses et émouvants dans la vie d'un élu de la nation, notamment d'un parlementaire. Celui que nous vivons ce matin devrait l'être et, pour tout vous avouer, il le sera particulièrement pour moi. Notre planète est en ébullition et les victimes de conflits ne se comptent plus. Des politiques répressives régissent le quotidien de millions de personnes dans des dictatures qui ne disent pas leur nom. Notre monde va mal.

Depuis mon élection à l'Assemblée nationale en 2017, j'ai travaillé, en tant que membre de la commission des affaires étrangères, sur de nombreux pays, de nombreuses zones de conflit, de trop nombreuses catastrophes humanitaires. De la Birmanie au Sahel, de la Syrie à l'Arménie, de l'Ukraine à l'Irak, du Tigré à l'Afghanistan, toutes ces régions ont fait l'objet d'auditions, de réunions et d'initiatives parlementaires. Aucune hiérarchie n'est possible entre les drames singuliers et pourtant si comparables qui s'y déroulent.

Depuis plusieurs mois, les députés du groupe Socialistes et apparentés et d'autres parlementaires investis sur le sujet – je pense, en particulier, à Frédérique Dumas, Olivier Faure et Boris Vallaud – ont travaillé avec l'Institut ouïghour d'Europe, des chercheurs, des ONG, le tribunal ouïghour de Londres, un collectif de jeunes pour les Ouïghours et des rescapés venus témoigner à l'Assemblée. Chaque fois, les récits et les preuves circonstanciées des exactions et des crimes nous ont convaincus davantage de la nécessité d'une action forte. Je me félicite donc que le calendrier parlementaire, pourtant dense, et la niche du groupe Socialistes et apparentés offrent aujourd'hui à la représentation nationale la possibilité de se pencher sur la situation des Ouïghours.

Nous sommes, ce matin, face à un mot qui fait l'histoire : celui de génocide – en l'occurrence le génocide des Ouïghours. D'autres pays, avant nous, ont reconnu ce fait dramatique et incontestable : le Gouvernement des États-Unis, ainsi que les parlements du Royaume-Uni, des Pays-Bas et du Canada. L'exposé des motifs de la proposition de résolution l'indique : des procédures comparables sont en cours en Belgique, en Allemagne, en Lituanie et en Nouvelle-Zélande. Le Parlement européen a, quant à lui, adopté une résolution sur le travail forcé et la situation des Ouïghours dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang. Alors, ne cédons pas aux intimidations et montrons-nous à la hauteur de l'enjeu !

Certes, la Chine est un grand pays, une véritable civilisation, qui a apporté beaucoup à l'humanité et continuera certainement de le faire à l'avenir. Son pouvoir et son influence croissants devraient l'inciter à mettre fin de toute urgence à ces atrocités, mais quand, lors d'une audition, j'ai interrogé l'ambassadeur de Chine à ce sujet, je me suis entendu rétorquer avec condescendance que ma question n'avait pas lieu d'être et que tout allait pour le mieux dans la province du Xinjiang.

Chers collègues, le génocide ouïghour est une réalité aussi incontestable qu'insoutenable. La Chine ne doit pas menacer impunément les libertés et les droits humains. Xi Jinping a déclaré il y a un mois que la démocratie était « une arme de destruction massive » contre laquelle son pays entendait résister. Je ne vois pas ce qui pourrait davantage nous mobiliser, nous qui sommes les représentants élus de la première démocratie moderne de l'histoire ! Une réaction forte est nécessaire, dont cette proposition de résolution est la première étape.

Les éléments constitutifs du fait génocidaire sont désormais largement documentés : une intention de détruire l'identité et les liens communautaires des Ouïghours et de saper la filiation entre les générations – plus généralement, la volonté de détruire ce peuple. Nous demandons au Gouvernement d'intervenir auprès de la communauté internationale et du Gouvernement chinois pour que cessent ces crimes et pour que les libertés fondamentales des Ouïghours soient respectées.

Chers collègues, je vous demande solennellement de vous retourner et d'observer les rescapés ouïghours présents dans les tribunes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.