Intervention de Maud Gatel

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 9h00
Condamnation des crimes perpétrés contre les ouïghours — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMaud Gatel :

qui, pour avoir contesté la version d'incidents violents impliquant des Ouïghours, a été condamné à la prison à vie.

C'est de la négation même de l'humanité des Ouïghours qu'il est question lorsque des prélèvements forcés d'organes sont réalisés sur des détenus. Sans parler de la destruction brutale de la culture et de la filiation de cette minorité, dénoncée par les ONG. Dans le viseur, les lieux de culte et pratiques cultuelles, mais pas seulement. Des enfants sont retirés à leurs parents pour recevoir une instruction exclusivement en mandarin, des stérilisations sont organisées en masse, des cadres chinois vont même jusqu'à s'installer dans l'intimité de foyers ouïghours. Et cette politique répressive s'appuie sur la mobilisation de la plus haute technologie numérique pour déployer un système de contrôle tentaculaire. Cette surveillance s'étend également à l'étranger, notamment en France, où des ressortissants font état d'intimidations.

Devant les dénégations du régime chinois, la communauté internationale se mobilise face à ces crimes contre notre humanité.

Il y a un an, Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, a dénoncé un « système de surveillance et de répression institutionnalisé » et demandé l'envoi, dans la région, d'une « mission impartiale, indépendante et transparente d'experts internationaux », placée sous la responsabilité de Mme Michelle Bachelet, la haute-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme.

De son côté, l'Union européenne s'est également engagée avec force dans ce combat, tout d'abord avec 1a résolution du Parlement européen du 17 décembre 2020 sur le travail forcé et la situation des Ouïghours dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang, qui a condamné « les actuelles persécutions et violations graves et systématiques des droits de l'homme qui sont assimilables à des crimes contre l'humanité ». Ensuite, l'Union européenne s'est engagée avec le règlement d'exécution du Conseil du 22 mars 2021, qui a prononcé des sanctions contre onze personnes physiques et quatre personnes morales impliquées dans les violations des droits de l'homme infligées aux Ouïghours, soit une mesure inédite depuis les événements de Tian'anmen.

Quatre parlements européens ont condamné des « crimes contre l'humanité », un « génocide » ou un « risque de génocide » au Xinjiang : la chambre des communes, qui en débat encore aujourd'hui, le Congrès américain et le Parlement canadien. Quant au groupe de neuf experts basé à Londres, il a estimé que la Chine avait commis « un génocide en imposant des mesures de prévention des naissances ».

Le texte que nous examinons s'inscrit dans le travail engagé depuis plusieurs mois par notre assemblée. Il porte sur la reconnaissance et la condamnation de violences constitutives de crimes contre l'humanité et d'un génocide. Il réaffirme notre soutien au peuple ouïghour et réitère notre demande au Gouvernement français de protéger les ressortissants ouïghours accueillis sur notre sol.

Si la qualification officielle de génocide relève des tribunaux, notre responsabilité, en tant que parlementaires français, est d'envoyer un message fort aux autorités chinoises et de condamner avec fermeté, au nom de nos valeurs humanistes et universalistes, les exactions commises à l'encontre des Ouïghours.

J'ai toutefois un regret ce matin : celui de ne pas pouvoir débattre d'une résolution plus solide juridiquement et assortie de propositions. Car la force du symbole doit s'accompagner d'actions concrètes au plan national, européen et international, dont nous pourrons nous servir, comme de leviers, pour renforcer notre position dans le rapport de force qu'il faudra inévitablement engager avec les autorités chinoises pour prévenir et réprimer ces exactions. Ainsi, le Président de la République a rappelé hier que l'accord global sur les investissements entre l'Union européenne et la Chine serait reporté sine die en l'absence d'avancées sur la question ouïghoure. Lorsqu'il s'agit d'atteintes aux droits humains, nous avons plus que jamais le devoir d'assurer l'effectivité des mesures adoptées.

Parce qu'ils sont résolument engagés dans la défense des droits humains, les députés du groupe Dem, qui sont aux côtés du peuple ouïghour dans les souffrances qu'il endure, voteront la proposition de résolution.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.