Intervention de Constance Le Grip

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 9h00
Condamnation des crimes perpétrés contre les ouïghours — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaConstance Le Grip :

La proposition de résolution portant sur la reconnaissance et la condamnation du caractère génocidaire des violences politiques systématiques ainsi que des crimes contre l'humanité actuellement perpétrés par la République populaire de Chine à l'égard des Ouïghours est un texte très important et le moment que nous vivons ensemble est un moment attendu. Il est temps pour notre Assemblée nationale de sortir de son silence et de dénoncer solennellement les exactions de toutes sortes, les persécutions et violations graves et systématiques des droits de l'homme, assimilables à des crimes contre l'humanité, commises par les autorités de la République populaire de Chine à l'encontre du peuple ouïghour.

Deux textes sont inscrits à l'ordre du jour des travaux de notre assemblée : la proposition de résolution en discussion et celle de Frédérique Dumas, que j'ai cosignée et dont l'examen est prévu pour le 4 février prochain, portant sur la reconnaissance et la condamnation des violences systématiques et planifiées, des crimes contre l'humanité et du risque sérieux de génocide en cours perpétrés par la République populaire de Chine à l'encontre des Ouïghours et appelant à la mise en place d'une enquête internationale indépendante.

Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas. Internements de masse de la population ouïghoure dans des camps dits de rééducation, déportations depuis le Xinjiang vers d'autres régions de Chine, arrestations et détentions arbitraires, peine capitale, travail forcé dans des camps d'internement ou dans des usines – on peut parler d'esclavage –, torture, agressions sexuelles et viols systématisés, prélèvements forcés d'organes, transferts forcés et détentions des enfants ouïghours dans des orphelinats publics dès lors que l'un de leurs parents est interné dans un de ces sinistres camps, surveillance de masse, y compris numérique, intrusion policière massive, avec ces séjours à domicile de cadres chinois hommes dans les foyers ouïghours, restrictions draconiennes des pratiques religieuses, destruction du patrimoine culturel, à commencer par les lieux de culte, fin de l'éducation en langue ouïghoure dans une volonté affichée de sinisation forcée des Ouïghours et d'éradication de la culture et de l'identité ouïghoures : voilà ce que subissent depuis plusieurs années les populations ouïghoures, ainsi d'ailleurs que d'autres minorités ethniques, musulmanes et turciques, dans cette région du Xinjiang.

Comment ne pas évoquer aussi la stratégie de contrôle répressif des naissances, qui repose à la fois sur une stérilisation forcée d'un nombre extrêmement élevé de femmes et sur l'internement des hommes en âge de procréer ? La mise en œuvre de cette stratégie de contrôle répressif des naissances a bien sûr fait chuter drastiquement le taux de natalité des Ouïghours dans la région du Xinjiang. Il y a bien là la marque caractérisée de la volonté des autorités de la République populaire de Chine de détruire biologiquement les populations ouïghoures et turciques, ce que l'on peut considérer comme l'un des principaux critères de la définition du terme de génocide, d'après la convention de 1948 de l'ONU.

Les Parlements canadien, néerlandais, britannique, lituanien, tchèque et belge ont déjà adopté des résolutions condamnant très solennellement les violations des droits humains, les persécutions et les crimes contre l'humanité commis contre la population ouïghoure et, pour certaines de ces résolutions, reconnaissant le caractère génocidaire des violences exercées. Le Congrès américain lui aussi, dès 2019, dénonçait le travail forcé et appelait au rétablissement plein et entier des droits humains du peuple ouïghour.

Cela a été dit précédemment, le Parlement européen, de son côté, non seulement a décerné dès 2019 le prix Sakharov pour la liberté de l'esprit et les droits humains au Ouïghour Ilham Tohti, incarcéré et condamné en 2014 à la perpétuité par le régime de Pékin, mais a également discuté et adopté deux résolutions, l'une en décembre 2019, l'autre en décembre 2020, des résolutions transpartisanes et votées à une très large majorité dans l'hémicycle du Parlement de Strasbourg, notamment avec les voix des députés européens de la famille de la droite républicaine.

Parce que nous ne pourrons jamais dire que nous ne savions pas, parce qu'il faut dire les choses, sortir du silence complaisant, parce qu'il faut mettre des mots sur les maux, parce que nous ne pouvons plus rester inertes face à la tragédie absolue vécue par les populations ouïghoures face aux violences, aux exactions de toutes natures, à ces crimes contre l'humanité, je voterai la proposition de résolution défendue aujourd'hui par le groupe socialiste.

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