Intervention de Fiona Lazaar

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 9h00
Condamnation des crimes perpétrés contre les ouïghours — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFiona Lazaar :

Face à l'inacceptable, face à l'injustice, la France ne reste pas silencieuse. Élus de la nation et, de ce fait, porteurs des valeurs qui font le ciment du pacte républicain, nous savons – et cette résolution nous le rappelle – que les textes votés et les mots prononcés en cette assemblée résonnent bien au-delà de cet hémicycle, bien au-delà de nos frontières.

Depuis des années, les alertes se multiplient sur les exactions dans le Xinjiang, province de l'ouest de la République populaire de Chine, à l'encontre des minorités et plus particulièrement des Ouïghours, minorité musulmane, turcique et turcophone, installée dans cette province depuis plus d'un millénaire. Les différents rapports des journalistes et organisations humanitaires, les témoignages des rescapés ne laissent aucun doute quant à l'ampleur des violences perpétrées par le Gouvernement chinois envers des millions d'hommes, de femmes et d'enfants.

Parce que Ouïghours, ils sont contraints au travail forcé. Parce que Ouïghours, ils sont victimes d'une politique répressive et d'une surveillance sans limites. Parce que Ouïghoures, les femmes sont violées de façon massive et font même l'objet de stérilisations forcées. Parce qu'ils sont nés Ouïghours, des centaines de milliers d'enfants sont séparés de leurs familles et internés dans des camps pour subir une rééducation forcée qui leur fait oublier leur culture. Nous ne pouvons rester sans réponse.

En substance, la proposition de résolution que nous examinons aujourd'hui réaffirme le combat qui est celui de la France dans le monde : défendre les libertés fondamentales et les droits essentiels des individus. Cette résolution n'appelle donc pas à un quelconque jeu politique : elle ne tirera sa force que d'un rassemblement transpartisan. Je salue à ce titre la mobilisation importante dont ce sujet a fait l'objet. Je pense particulièrement à notre collègue Alain David, premier signataire de la résolution, ainsi qu'au travail de Frédérique Dumas, membre du collectif de solidarité avec les Ouïghours.

Les violences que subit cette communauté sont sans contestation possible. S'il n'est pas de la responsabilité de la France ou de son Parlement de juger de leur caractère génocidaire, dénoncer de telles persécutions en adoptant la proposition de résolution constitue cependant un symbole fort, qui rappelle et renforce l'engagement de notre pays pour mettre fin à cette situation inacceptable.

Depuis maintenant plus de deux ans, la France a condamné à plusieurs reprises les agissements de la Chine contre les Ouïghours. Lors de la quarante et unième session du Conseil des droits de l'homme, en 2019, la France, aux côtés de vingt et un autres États, a alerté le président du Conseil des droits de l'homme. En réponse aux parlementaires français, le Président de la République a condamné en 2020 les agissements du pouvoir central chinois. En février 2021, devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a dénoncé avec force la répression menée contre cette communauté. Enfin, en octobre dernier, devant la troisième commission de l'Assemblée générale des Nations unies, la France s'est fait la voix de quarante-trois États pour alerter sur la situation des droits de l'homme au Xinjiang. Cet attachement au respect du droit international et des droits de l'homme honore notre pays, et c'est dans cette perspective que la majorité souhaite s'inscrire.

L'Assemblée nationale prend ainsi aujourd'hui toute sa part au mouvement de contestation qui soulève une à une les instances démocratiques à travers le monde. Après les parlements du Royaume-Uni, du Canada, de Belgique ou encore des États-Unis, il nous revient de soutenir publiquement cette communauté persécutée et d'envoyer un message au monde : nous, Français, fidèles à nos valeurs et à notre histoire, ne restons pas spectateurs d'une politique discriminatoire.

Cette proposition de résolution est donc une contribution de plus dans la dénonciation du système de persécution mis en place à l'encontre des Ouïghours, même si c'est dans la mobilisation commune des États que doit surtout s'exercer notre action. Il nous faut aujourd'hui dépasser les actions unilatérales et porter un message fort, collectif, adossé à des actions concrètes.

Nous pouvons à ce titre saluer les travaux engagés par la Commission européenne, et soutenus dans une résolution par le Parlement européen, sur une future proposition européenne pour un devoir de vigilance des entreprises de l'Union, qui interdira notamment la vente sur le marché européen de produits issus du travail forcé.

C'est également une des priorités affichées de la présidence française de l'Union européenne et nous pouvons en être fiers. Le Président de la République l'a rappelé dans son intervention au Parlement européen hier : « La présidence française sera une présidence de promotion des valeurs qui nous font. […] La fin de l'État de droit, c'est le règne de l'arbitraire, […] le signe du retour aux régimes autoritaires, au bégaiement de notre histoire. » Ces valeurs qui sont au cœur de notre projet doivent être accompagnées par des mesures fortes et la présidence française de l'Union européenne est l'occasion de renforcer notre mobilisation.

Consciente du symbole que représente le vote de ce texte, la majorité se prononcera en faveur de cette proposition de résolution.

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