Intervention de Nicole Sanquer

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 9h00
Discussion d'une proposition de résolution européenne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Sanquer :

Il est des sujets sur lesquels la France a su être précurseur au niveau européen en imposant très tôt des dispositions qui feraient, des années plus tard, consensus. Vous pouvez vous réjouir, monsieur le rapporteur, de constater que vous êtes l'un de ceux qui ont su défendre des mesures en avance sur leur temps. Je tiens à saluer votre engagement et à vous dire que le groupe UDI et indépendants se félicite que le devoir de vigilance progresse au niveau communautaire.

En effet, il y a cinq ans, au terme des débats sur le dispositif français que vous avez défendu, les députés UDI avaient exprimé leur crainte qu'une concurrence déloyale ne naisse de la mise en place d'un tel contrôle à la seule échelle nationale. Or aucune concurrence de la sorte n'est survenue, sans doute grâce à l'action d'autres États européens, et peut être aussi à la censure d'une partie du texte par le Conseil constitutionnel, qui en a réduit la portée. Mais je profite tout de même de cette occasion pour répéter que la France ne doit pas prendre la mauvaise habitude d'agir seule lorsque des débats ont lieu au niveau européen.

Les Français ont peu connaissance des avancées que nous apporte l'Union européenne, et pour cause : nous avons tendance à ne pas mettre en avant le travail qui est fait à Bruxelles et à Strasbourg. Pourtant, la question du droit de vigilance au niveau européen mériterait une plus grande couverture médiatique pour mettre en lumière ce qui est en train de se passer. Depuis plusieurs années, nous attendons une proposition de la Commission européenne sur le sujet. Or, à plusieurs reprises l'année dernière, la Commission a repoussé le projet de directive sans bien nous expliquer pourquoi.

De son côté, le Parlement européen a adopté en mars dernier, pour présenter ses attentes, une résolution dans laquelle on peut se réjouir de retrouver une ambition forte en matière de transparence et de coopération sectorielle, la volonté d'un recours effectif devant les tribunaux mais aussi la nécessité de lier notre politique commerciale à ce devoir de vigilance. Cet engagement fort de nos collègues eurodéputés démontre une fois de plus qu'ils sont en pleine mesure de préparer des projets novateurs et qu'ils devraient disposer du droit d'initiative législative, notamment lorsque la Commission n'ose pas agir face aux pressions d'acteurs influents.

J'en viens au fond de cette proposition. Ces dernières années, nous avons beaucoup avancé pour dévoiler ce qui se cache derrière l'origine des produits que nous achetons. Chaque citoyen doit certes surveiller ce qu'il achète, mais notre rôle de législateur consiste à assurer qu'une parfaite transparence soit faite sur l'origine et les conditions de fabrication des produits afin que chacun fasse les choix les plus vertueux possible. Au reste, de peur de perdre leur clientèle, certaines marques ont déjà cessé cette course à la marge qui les incitait à écarter de leur mode de production les exigences environnementales et sociales.

Au-delà d'apporter une simple réponse aux attentes des consommateurs, l'Union européenne doit saisir cette occasion pour devenir enfin un acteur géopolitique majeur. Qu'il s'agisse de droits de l'homme, de protection des minorités ou encore d'environnement, l'Europe doit être en mesure de peser sur la scène internationale pour défendre les valeurs universelles qui sont les nôtres. Ce rôle très actif doit se manifester dans notre politique commerciale, à l'image de la clause exigeant le respect des conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT) que nous avons souhaité imposer aux Chinois, avant que l'accord ne soit bloqué.

Mais il nous faut aller encore plus loin. Alors que l'Europe se lance dans une course contre la montre pour atteindre la neutralité carbone en 2050, nous devons intégrer dans nos accords commerciaux des mesures de sauvegarde qui nous permettront par exemple de remettre en cause tout ou partie d'un accord avec un partenaire qui ne respecterait pas les objectifs de l'accord de Paris. De même, ces accords devraient contenir des clauses miroirs exigeant de nos partenaires une ambition au moins aussi élevée que la nôtre en matière de protection de l'environnement et des droits humains.

Vous l'aurez compris, monsieur le rapporteur : le groupe UDI et indépendants soutiendra cette proposition de résolution et nous espérons que l'Union européenne publiera rapidement une proposition législative sur le sujet.

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