Intervention de Thierry Benoit

Séance en hémicycle du jeudi 13 janvier 2022 à 15h00
Interdiction du glyphosate — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Benoit :

Pourquoi ? Parce qu'il s'agit d'un vrai sujet de réflexion : ce produit, dont on doit user avec la plus grande délicatesse, car il s'agit d'un désherbant, contenant des matières actives susceptibles d'être nocives. Ce débat vaut cependant pour l'ensemble des herbicides, pour l'ensemble des fongicides et pour l'ensemble des insecticides utilisés en agriculture. En France, nous devrions être échaudés par ce qui s'est passé avec les néonicotinoïdes : il y a quelques années, on a fait plaisir à certains en les supprimant, puis, ensuite, invoquant le principe de réalité, les acteurs de terrain ont expliqué qu'ils ne pouvaient pas s'en passer.

Conclusion, le Gouvernement a dû faire machine arrière, c'est le cas de le dire. Nous avons bonne mine vis-à-vis de nos concitoyens, des agriculteurs et des producteurs – c'est-à-dire que nous sommes ridicules. Je le dis au ministre actuel, comme je l'ai dit en son temps à Stéphane Travert, son prédécesseur : à l'époque, la déclaration et le tweet du Président de la République n'ont pas aidé. Disons les choses comme elles sont, il était sous la mauvaise influence de Nicolas Hulot. C'est le ministre de l'agriculture, Stéphane Travert, qui a payé un lourd tribut à ces querelles entre environnement et agriculture ; on a demandé sa tête pour satisfaire les desiderata de celles et ceux qui soutenaient Nicolas Hulot.

Pour suivre les questions agricoles depuis plusieurs années, comme de nombreux députés dans cet hémicycle, je voudrais dire que les agriculteurs ont accompli de nombreux progrès. Nous sommes passés de l'agriculture écologiquement intensive, il y a une petite vingtaine d'années – Michel Barnier était alors ministre de l'agriculture –, à l'agriculture de conservation des sols que vous connaissez, cher Julien Denormandie. Entre-temps, l'agroécologie est apparue – tout le monde en a désormais validé le concept – et s'est notamment s'accompagnée de l'instauration de la certification HVE. Naturellement, nous devons soutenir et encourager l'agriculture bio ; elle est une solution alternative, quoique pas la seule. En effet, vous l'avez rappelé tout à l'heure, monsieur le ministre, en cinq ans, la surface agricole du bio a été multipliée par deux.

Revenons à la réflexion globale, qui est l'angle sous lequel nous devons envisager l'ensemble des produits phytosanitaires utilisés dans le monde, dans l'Union européenne et en France. En France, nous utilisons 8 000 tonnes de glyphosate, chiffre que nous devons mettre en rapport avec le volume total des produits phytosanitaires utilisés, soit 75 000 tonnes.

Je reprends l'argument de plusieurs collègues car il renvoie à une réalité : à mon retour dans ma circonscription de Fougères, en Bretagne, j'entends déjà les agriculteurs me demander ce que nous avons encore voté et quels sont les boulets aux pieds que nous leur mettons. En effet, ce type de réflexion devrait, à tout le moins, avoir lieu à l'échelle de l'Union européenne. Si nous instaurons des contraintes supplémentaires qui ne pèsent pas sur nos homologues allemands, italiens, espagnols, et sur les autres pays membres de l'Union européenne, la concurrence sera faussée et la compétitivité entravée.

Pour conclure, je suis favorable à l'objectif recherché de réduction drastique voire d'extinction de l'usage des produits phytosanitaires en France. Mais comme l'a dit André Chassaigne, nous ne pouvons instaurer une telle mesure sans faire preuve de pragmatisme, sans prévoir de dérogations ni sans prendre en considération l'existence d'une réciprocité avec l'ensemble de nos partenaires, qu'ils soient des pays membres de l'Union européenne ou d'autres pays du monde. C'est pour cette raison que le groupe UDI-I ne soutiendra pas la proposition de loi.

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