Intervention de Cendra Motin

Séance en hémicycle du lundi 10 janvier 2022 à 16h00
Activité professionnelle indépendante — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCendra Motin :

Ce texte, mes chers collègues, sera à n'en pas douter tout aussi mémorable car tout aussi important. Près de trente ans après avoir amélioré la protection sociale du chef d'entreprise, nous nous apprêtons aujourd'hui à protéger son patrimoine et par là sa famille. Ils sont de plus en plus nombreux, M. le ministre l'a rappelé, 3 millions environ, commerçants, artisans, professionnels libéraux, microentrepreneurs et travailleurs des plateformes, qui exercent leur activité en indépendants et contribuent au dynamisme de notre économie. Et ils demandent plus de protection.

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui s'inscrit dans le cadre du plan « indépendants » présenté par le Président de la République en septembre dernier pour répondre à de nombreuses demandes de leur part. C'est le dernier maillon d'un projet économique ambitieux, construit pendant ces cinq années de mandat, et qui permettra de mieux accompagner et de mieux protéger l'ensemble des indépendants, de la création de leur entreprise à sa transmission. Ainsi, le projet de loi prévoit la création d'un statut unique, plus protecteur, pour l'entrepreneur individuel ; il facilite le passage d'une entreprise individuelle en société ; il assure un meilleur accès à la formation ; il permet la prise en compte des dettes professionnelles d'un entrepreneur pour l'appréciation de sa situation dans le cadre de l'ouverture d'une procédure de surendettement.

L'article 1er revêt une importance particulière car il prévoit l'instauration par défaut de deux patrimoines pour les entrepreneurs individuels, l'un personnel et l'autre professionnel, là où il n'en existe aujourd'hui, sauf démarche de l'intéressé, qu'un seul qui confond les deux. Dorénavant, ce qui est utile à l'entreprise – un camion ou un ordinateur par exemple – deviendra le patrimoine professionnel ; ce qui n'a pas de lien avec l'entreprise restera dans le patrimoine personnel. Cette distinction, qui a pour but de protéger le patrimoine personnel de l'entrepreneur individuel, change radicalement les choses pour de nombreux créanciers. Parmi eux les banques, avec qui nous avons longuement discuté pour trouver une voie permettant aux entrepreneurs individuels de n'être ni exclus du crédit ni systématiquement contraints de renoncer à la protection que ce texte leur apporte. Et je suis heureuse de pouvoir dire aujourd'hui que nous avons trouvé ce compromis nécessaire, grâce au travail de conviction de nombreux collègues ; j'en remercie particulièrement nos deux rapporteurs.

L'article 4, qui traite des procédures d'insolvabilité des entreprises et des particuliers permettra, comme s'y étaient engagés la rapporteure et le Gouvernement, d'apporter des réponses aux spécificités du monde agricole et, dans la même veine, l'article 8 permettra d'aider les chefs d'entreprise ayant une dette composée de cotisations et de contributions sociales en la rendant éligible à la procédure de surendettement des particuliers, une demande que les entrepreneurs formulaient depuis très longtemps car trop nombreux sont ceux qui ont perdu plus que tout ce qu'ils avaient dans des procédures écrasantes et parfois inhumaines, sans avoir de possibilité de s'en sortir : nous leur ouvrons, avec ce texte, une issue de secours.

Pour aider les indépendants à rebondir, l'accès à l'allocation des travailleurs indépendants, créée par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, sera mobilisable dès le stade de la cessation définitive d'activité, lorsque celle-ci n'est plus économiquement viable et sans attendre le stade de la liquidation judiciaire. En contrepartie, cette allocation ne sera mobilisable qu'une fois tous les cinq ans. Comme l'a rappelé le rapporteur Jean-Noël Barrot, c'est grâce au travail d'évaluation de notre collègue Dominique Da Silva que nous pourrons corriger ce dispositif pour qu'il devienne un droit réel et non plus théorique. C'est ainsi que nous devons légiférer : proposer, évaluer et corriger nos textes quand c'est nécessaire.

Enfin, l'article 12 propose une solution face à la situation de blocage concernant la création d'une convention collective prévue par la loi PACTE pour tous les salariés de droit privé des CCI. C'est d'ailleurs forts de cette disposition que nous proposerons de fixer la durée du congé paternité à un mois pour tous les salariés des chambres de commerce et d'industrie.

II y a un peu plus de onze ans, je créais mon entreprise. Après quinze ans comme salariée, je faisais alors un véritable saut dans l'inconnu. Mon activité allait-elle marcher ? Mon idée était-elle vraiment la bonne ? Comment allais-je payer mes charges ? Je me posais toutes ces questions en me disant que je n'avais pas le droit à l'erreur parce que c'était toute ma famille et tout ce que j'avais que je mettais en jeu. Grâce à ce texte, d'autres n'auront plus à se poser ces questions et pourront créer leur entreprise sereinement.

Ce texte est majeur pour les 3 millions d'entrepreneurs qui font le maillage économique de nos territoires, aussi bien en ruralité que dans les métropoles, ces entrepreneurs que nous avons aidés sans compter au plus fort de la crise et que nous soutenons encore, et à qui nous voulons donner des perspectives pour l'avenir. Il répond à des attentes fortes exprimées depuis longtemps, et le groupe La République en marche sera fier de le voter.

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