Intervention de Pierre-Yves Bournazel

Séance en hémicycle du lundi 13 décembre 2021 à 16h00
Responsabilité pénale et sécurité intérieure — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Yves Bournazel :

Nous nous réjouissons que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord entre députés et sénateurs. Ce texte apporte des réponses à divers engagements pris par le Président de la République. D'une part, après l'odieux assassinat de Sarah Halimi et le débat juridique qui en a résulté, il vient limiter l'irresponsabilité pénale en cas de trouble mental résultant de la consommation de produits psychoactifs. D'autre part, il contient plusieurs mesures destinées à mieux protéger ceux qui assurent notre sécurité et à répondre aux défis de notre temps.

Ce projet de loi est l'aboutissement d'un long travail et de nombreux échanges avec tous les acteurs du monde judiciaire.

Dès février 2020, Nicole Belloubet, alors garde des sceaux, demandait un rapport sur l'irresponsabilité pénale. Le 23 avril 2021, Philippe Houillon et Dominique Raimbourg vous remettaient le fruit de leurs travaux, monsieur le garde des sceaux. Plusieurs propositions issues de cette réflexion ont d'ailleurs été intégrées dans le projet de loi lors de la navette parlementaire.

Ce texte est aussi l'aboutissement de la mission flash que nos collègues Naïma Moutchou et Antoine Savignat ont consacrée à l'application de l'article 122-1 du code pénal, et dont les conclusions ont été rendues le 30 juin dernier. Je voudrais saluer la qualité de leurs travaux dont une part substantielle imprègne le présent projet de loi.

L'irresponsabilité pénale des aliénés est une idée très ancienne. On en trouve la trace dans le code babylonien d'Hammourabi mais aussi sous la démocratie athénienne, dans les écrits de Platon consacrés au droit criminel. Si, de façon générale, l'ancienneté d'un concept n'est pas une preuve de sa pertinence, en l'espèce, cette constance à travers les âges atteste de la solidité du raisonnement. L'objectif du projet de loi est très clair. Il prévoit d'exclure l'irresponsabilité pénale lorsque l'abolition du discernement provient de la consommation de substances psychoactives dans le dessein de commettre un crime ou un délit. On ne juge pas les fous, et ce texte ne revient pas un instant sur ce principe.

Le projet de loi vient également améliorer la sécurité de nos concitoyens en protégeant davantage les forces de l'ordre et en leur donnant des moyens supplémentaires pour assurer leur sécurité. Ces nouvelles dispositions tirent les leçons de la décision du Conseil constitutionnel du 20 mai 2021. Dans une démocratie, il est essentiel que le pouvoir politique dialogue, réponde, apprenne, modifie et complète éventuellement les dispositions qu'il propose dans le cadre des politiques publiques.

Demain, grâce à ce texte, les refus d'obtempérer seront punis plus sévèrement et la confiscation du véhicule avec lequel l'infraction a été commise sera facilitée. Grâce à ce texte, nous élargissons l'amende forfaitaire délictuelle aux vols simples afin de mieux sanctionner les vols à l'étalage. Grâce à ce texte, nous pourrons mieux lutter contre les rodéos urbains, véritable fléau pour nombre de nos concitoyens. Grâce à ce texte, nous modernisons notre droit : l'usage des drones, des caméras individuelles et des caméras embarquées sera désormais précisément encadré.

Grâce à ce texte, enfin, nous créons un délit spécifique tendant à réprimer plus sévèrement les atteintes commises contre les membres des forces de sécurité intérieure, leurs proches et les agents qui concourent à leurs missions. Cette disposition que nous soutenons pleinement était attendue par les femmes et les hommes qui travaillent au quotidien pour garantir notre sécurité. En commission des lois, nous avons élargi la protection offerte par ce nouveau délit aux agents des douanes et aux sapeurs-pompiers. À ces violences inacceptables, nous apportons une réponse claire.

L'étude d'impact annexée au projet de loi indique que 5 000 personnes environ sont condamnées chaque année pour des violences correctionnelles commises sur personne dépositaire de l'autorité publique. Néanmoins, les peines effectivement prononcées sont loin des peines maximales prévues par les textes. Sur 181 condamnations, une peine d'emprisonnement ferme a été prononcée dans 75 % des cas, mais le quantum moyen a été seulement de 14,5 mois sur 84 mois possibles. Nous espérons que la création de ce délit aura l'effet escompté, à savoir mieux protéger ceux qui nous protègent. Nous y veillerons.

Le groupe Agir ensemble, satisfait de l'accord trouvé par la commission mixte paritaire, votera en faveur de ce texte et vous soutient, monsieur le garde des sceaux, dans vos différentes démarches.

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