Intervention de Christophe Naegelen

Séance en hémicycle du jeudi 9 décembre 2021 à 9h00
Modification du mécanisme européen de stabilité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Naegelen :

Néanmoins, même si l'euro est une avancée économique, force est de constater que notre union monétaire est incomplète. Sans entrer dans le détail des différentes théories économiques, l'absence d'une politique fiscale commune et d'un budget européen commun suffisamment ambitieux pénalise notre économie. L'idée d'un rapprochement progressif des politiques fiscales et sociales des différents États européens a fait l'objet d'un certain nombre de propositions de la part du groupe UDI et indépendants et plusieurs députés ont participé à des missions sur ces sujets. Le rapprochement ne doit pas s'opérer en nivelant par le bas mais, au contraire, en retenant ce qui se fait de mieux dans les différents pays européens. J'espère que ces questions seront l'une des priorités de la présidence française du Conseil de l'Union européenne.

Le Mécanisme européen de stabilité que nous révisons aujourd'hui n'est finalement qu'un terrible aveu d'échec : il souligne l'incapacité européenne à mener à bien la construction de l'euro et à franchir le pas d'une véritable intégration économique.

Malgré tout, la modification de ce Mécanisme est plutôt une bonne nouvelle, s'agissant notamment du volet bancaire. Alors que de nombreux États européens ont payé le prix fort pour sauver leurs banques lors de la crise de 2008, une plus grande solidarité continentale à cette époque nous aurait évité quelques soucis. Je crois d'ailleurs que l'on entend trop peu le terme « solidarité » lorsqu'il est question de politique européenne. Loin de moi la volonté de faire de l'angélisme, mais il serait temps d'expliquer à nos concitoyens français et européens que nous sommes tous dans le même bateau et que, si nous voulons que notre voix soit forte et entendue de nos amis – et néanmoins concurrents – américains ou chinois, notamment, nous devons parler ensemble. Il faut d'ailleurs se rendre compte que ni l'Allemagne ni les autres pays dits frugaux n'ont changé d'avis ou souhaité faire de cadeaux lorsqu'ils ont accepté, en juillet 2020, le principe d'un endettement commun pour lutter contre la crise sanitaire. Une capacité d'emprunt différenciée de chaque pays pour relancer son économie aurait finalement eu davantage de conséquences négatives et aurait surtout causé des tensions politiques majeures.

La crise financière qui a accompagné l'épidémie pose justement une question essentielle, s'agissant du Mécanisme européen de stabilité. En avril 2020, au plus dur de la crise, l'Italie a refusé d'utiliser les lignes de crédit qui étaient mises à sa disposition, par peur de l'aveu de faiblesse que cela aurait constitué vis-à-vis des marchés financiers, mais aussi par peur de l'utilisation politique néfaste qui aurait pu être faite de sa démarche. Cela témoigne malheureusement de la faiblesse du Mécanisme européen de stabilité, dont l'image a été profondément écornée lors de la crise de la dette grecque. Aussi, même s'il est adapté pour répondre à une légère crise économique au sein de la zone euro, cet instrument n'est-il pas fait pour répondre à une crise globale comme celle que nous avons connue. Il présente surtout le défaut de reposer sur un énième emprunt qui, quoiqu'économiquement intéressant, ne témoigne pas d'une solidarité aussi forte qu'un effort commun en cas de choc.

Même si je salue les améliorations apportées à ce traité, et même si mon groupe votera en faveur du projet de loi de ratification de l'accord, je conclurai en indiquant que l'Europe doit surtout se doter d'un budget de la zone euro. Un accord de principe a déjà été trouvé entre les chefs d'États à ce sujet mais, depuis la crise sanitaire, nous n'avons plus de nouvelles. Alors que l'instauration de ressources fiscales propres à l'Union européenne aurait permis d'abonder un tel budget, l'accord trouvé sur le plan de relance européen consacre ces ressources au remboursement de l'emprunt qu'elle a contracté. Il faut donc craindre que le projet de budget commun ne soit pas concrétisé, alors qu'il constituerait une suite plus que logique de l'union monétaire. Mais le ministre des finances allemand qui avait accepté l'accord de principe est aujourd'hui chancelier, et la France s'apprête quant à elle à prendre la présidence du Conseil de l'Union européenne. Le Gouvernement dispose donc d'une fenêtre de tir inespérée pour relancer le projet de budget ; j'espère qu'il saura l'utiliser.

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