Intervention de Michel Vialay

Séance en hémicycle du lundi 29 novembre 2021 à 16h00
Lutte contre la pollution plastique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Vialay :

l,5 million de tonnes de plastique produites en 1950, 359 millions de tonnes en 2018 ; nous rejetons chaque année l'équivalent de notre poids corporel, et cette production devrait doubler en 2050. Chaque année, 100 milliards de bouteilles en plastique fabriquées sur notre planète ; autant de microplastiques dans l'air au pic du Midi, au cœur des Pyrénées, qu'à Paris ; 150 millions de tonnes de plastique dans les océans ; un continent de plastique de 3,5 millions de kilomètres carrés, appelé septième continent, grand comme six fois la France… Et ce n'est que la partie visible de l'iceberg. Plus de plastiques que de poissons dans les océans en 2050 ; un coût sanitaire annuel de 163 milliards d'euros pour l'Europe… Nous ingérons chaque semaine 5 grammes de plastique, soit l'équivalent d'une carte de crédit. Ces quelques chiffres devraient nous donner le vertige.

En décembre 2019, après plus de soixante-dix auditions et tables rondes auprès des acteurs de tous les secteurs concernés, la mission d'information commune sur les perturbateurs endocriniens dans les contenants en plastique – alimentaires, cosmétiques et pharmaceutiques –, que je présidais, rendait des conclusions claires et précises qui concouraient à nous alerter sur ce problème majeur de santé publique et à renforcer notre conscience collective des défis qui y sont liés.

Salué à l'unanimité des députés des deux commissions, celle du développement durable et de l'aménagement du territoire et celle des affaires sociales, ce rapport montre clairement que les additifs aux matières plastiques, dont certains sont des perturbateurs endocriniens, peuvent migrer dans le contenu du produit de façon plus ou moins importante selon plusieurs facteurs. Leur mode d'action les rend redoutables et leurs effets peuvent, aux périodes les plus sensibles de la vie, avoir des effets irréversibles. L'impact des perturbateurs endocriniens sur notre santé est désormais démontré et leur lien est désormais établi avec de nombreuses pathologies telles que les cancers, l'obésité, le diabète, les maladies thyroïdiennes, les troubles de la fertilité, les malformations génitales ou encore les maladies neurodéveloppementales.

Les recommandations que nous avons formulées avec Lauriane Rossi et Claire Pitollat, corapporteures de la mission, soulignaient notamment la nécessité de renforcer la réglementation européenne, trop lacunaire et hétérogène selon les secteurs d'application, le besoin d'accentuer nettement les efforts de recherche sur les perturbateurs endocriniens, sur les milieux et sur la biodiversité – à laquelle je sais que Mme la secrétaire d'État est sensible –, et le suivi indispensable du devenir des additifs lors du recyclage. Tout cela, bien sûr, va de pair avec la nécessité de former, informer, et sensibiliser.

À l'inverse de la crise du covid-19, la crise sanitaire inhérente au plastique est sourde, mais ses risques pour notre santé sont considérables. Même si les résistances sont nombreuses, il nous appartient de réagir fortement, car le danger est présent partout, dans tous les milieux et tous les environnements. Le plastique persistera longtemps après notre propre vie, pour une durée d'au moins cinq ou six fois notre existence. Il ne se dissout pas comme le métal ou le verre, il ne se dégrade pas sous l'action des micro-organismes présents dans le sol comme le papier ou le carton ; il se fragmente en petits morceaux microscopiques, puis nanoscopiques. Devenues invisibles, les milliards de tonnes de plastique que nous avons accumulées depuis une cinquantaine d'années sont une véritable bombe à retardement.

L'eau potable, le sel et certains produits de la mer sont déjà contaminés par ces micro- et nanoplastiques. Ingérés par notre organisme, ceux-ci peuvent traverser les tissus, s'accumuler dans les organes et entraîner des phénomènes inflammatoires graves, voire provoquer un effet cocktail de réactions chimiques difficiles à prévoir. L'État a un intérêt fort à agir : en effet, une étude de référence estime que le coût annuel lié à l'exposition aux perturbateurs endocriniens est de 163 milliards d'euros pour l'Europe seulement – et encore, sur la base d'un nombre limité de perturbateurs endocriniens pour lesquels les données sont fiables en termes d'association à un nombre limité de maladies chroniques.

Sous la présidence de la sénatrice Angèle Préville et de notre collègue Philippe Bolo, le rapport rendu en décembre 2020 par nos collègues membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques conforte ces constats. Ses recommandations s'inscrivent dans la même logique. Il est urgent d'agir au niveau national, européen et international, car l'exposition est multifactorielle et aucune législation ni recherche ne l'embrasse dans sa totalité.

Lors des débats sur la loi « climat et résilience », les députés Les Républicains avaient présenté un contre-projet qui appelait, notamment, à faire de la recherche sur les perturbateurs endocriniens une priorité sanitaire afin de protéger la santé des Français. Dans la droite ligne de cette contribution, le projet des Républicains pour la France de 2022 identifie notamment la lutte contre les pollutions et la réduction des déchets comme l'une de ses trente priorités majeures, en portant une attention plus particulière au plastique. C'est pourquoi nous nous félicitons de la prise de conscience collective qui se manifeste aujourd'hui. Les députés Les Républicains voteront en faveur de cette proposition de résolution avec enthousiasme.

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