Intervention de Adrien Taquet

Séance en hémicycle du vendredi 26 novembre 2021 à 15h00
Plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19 — Discussion d'une proposition de loi

Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles :

Nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner la proposition de loi visant à la création d'une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19, présentée par Michel Zumkeller dans le cadre de la niche parlementaire du groupe UDI et indépendants. Rappelons que, sur ce sujet, l'Assemblée nationale a fait preuve de réactivité puisqu'elle s'en est saisie de manière précoce au cours de la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19 – vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur. Je salue, comme vous, la proposition de résolution visant à reconnaître et prendre en charge les complications à long terme de la covid-19, présentée dès le mois de février 2021 par Julien Borowczyk, Patricia Mirallès et l'ensemble des députés de la majorité. Je salue leur engagement constant sur le sujet.

L'examen de la présente proposition de loi nous offre donc l'occasion d'échanger à nouveau sur ce sujet important de santé publique. C'est en effet un sujet essentiel qui mérite tout d'abord un rapide exercice de définition, afin de préciser ce dont nous débattons collectivement derrière l'appellation commune de « covid long ».

Il existe deux types de patients : ceux pour lesquels les symptômes de la maladie initiale vont persister entre quatre et douze semaines et sont caractérisés par une cinétique de récupération lente mais réelle – c'est ce qu'on appelle le « covid long » ; et ceux dont les symptômes développés pendant ou après l'infection persistent pendant plus de douze semaines et ne peuvent être expliqués par un autre diagnostic – c'est ce qu'on appelle le post-covid, marqué par une hétérogénéité importante, une évolution souvent fluctuante, une amélioration très lente et des risques de séquelles fixées.

Sur la base de ces précisions, on peut estimer que 1,7 million de personnes, soit 25 % de celles qui ont été contaminées, ont présenté ou présentent des symptômes persistants de type covid long, et que 700 000, soit 10 % des personnes contaminées, ont présenté ou présentent des symptômes persistants de longue durée – plus de trois mois – de type post covid. Parmi ces derniers, on peut estimer que 10 % se trouveront dans une situation dite « complexe », du fait des conséquences directes de la maladie elle-même ou de leur situation personnelle ; ce sont ainsi environ 70 000 personnes qui pourraient avoir besoin, à ce jour, de structures spécifiques de prise en charge.

Les personnes souffrant de tels symptômes expriment un vrai besoin de prise en charge ainsi qu'une demande légitime de reconnaissance. C'est une préoccupation forte des malades, relayée – vous l'avez rappelé, monsieur le député – par les différentes associations qui les représentent. Par leur nombre et par la diversité des symptômes qu'ils subissent, ils représentent un enjeu organisationnel important pour notre système de santé, qui doit tout faire pour être en mesure d'apporter une réponse coordonnée et appropriée à leurs besoins.

En matière de prise en charge, notre souci constant a été dès l'origine de lutter contre l'errance médicale, qui a pu entraîner le recours à des traitements non adaptés ou même des hospitalisations non nécessaires. Pour cela, le Gouvernement a pris plusieurs mesures visant à assurer des parcours de soins cohérents et individualisés, permettant de répondre à la diversité des cas de symptômes persistants post covid.

La Haute Autorité de santé (HAS) a ainsi publié en février 2021 des recommandations relatives aux critères diagnostiques et aux modalités de dépistage et de prise en charge clinique et paraclinique des adultes ayant des symptômes prolongés, grâce à un dispositif de réponses rapides couplé à des fiches pratiques. Une actualisation de ces recommandations au gré de l'évolution des connaissances a été publiée il y a une semaine ; une fiche pédiatrique – vous l'avez évoquée, monsieur le rapporteur – est en cours d'élaboration et devrait être publiée au début de l'année 2022.

L'élément central des recommandations ministérielles réside dans l'instauration de cellules de coordination post covid visant à accompagner, à informer, à orienter les professionnels et les patients et à coordonner les interventions nécessaires à la prise en charge des cas complexes post covid, dans tous les territoires.

On comptabilise actuellement 118 cellules de coordination réparties sur l'ensemble du territoire, ce qui permet de disposer d'un important maillage territorial en la matière. L'offre de soins développée dans ce cadre se structure en trois niveaux : les médecins généralistes, au centre du dispositif, constituent un premier recours ; on trouve ensuite un niveau intermédiaire auquel sont réalisées des explorations fonctionnelles ; enfin, au dernier niveau, des centres proposent des services de santé et de rééducation dédiés à la prise en charge des patients complexes.

Le financement de besoins supplémentaires liés au développement de cette offre de soins a été assuré par les ARS au moyen de dotations du Fonds d'intervention régionale – le fameux FIR –, et nous étudions actuellement les possibilités de renforcer le soutien en faveur de la kinésithérapie et de l'activité de SSR – soins de suite et de réadaptation. Nous avons par ailleurs mené des opérations de communication auprès des professionnels de santé comme du grand public, car trop peu d'acteurs, sans doute, ont connaissance de ces initiatives. De nouvelles mesures d'information devront donc être déployées.

Nous poursuivons par ailleurs l'effort de recherche sur le sujet, car nous devons faire preuve d'humilité et reconnaître collectivement que, si nos connaissances ont fortement progressé quant aux conséquences durables de l'infection à la covid-19, il reste encore plusieurs zones d'ombre à explorer. L'ensemble des projets consacrés spécifiquement aux formes persistantes de covid et sélectionnés au niveau national ont déjà bénéficié d'une allocation budgétaire de 5,5 millions d'euros, et un nouvel appel à projets, dédié aux projets de recherche sur le covid long, est paru ce mois-ci.

Comme vous pouvez le constater, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement est donc très mobilisé pour améliorer la prise en charge des patients, pour former et informer les professionnels de santé et le grand public, et pour progresser en matière de recherche. C'est dans ce contexte que vous avez à examiner la présente proposition de loi. Comme vous l'avez dit, son article 1er prévoit la création d'une plateforme en ligne de référencement permettant aux patients souffrant de symptômes persistants post covid qui le souhaitent d'être référencés et de partager les données ainsi renseignées avec leur médecin.

La CNAM – Caisse nationale de l'assurance maladie –, en partenariat avec l'association Tous partenaires covid, finance actuellement la création d'une plateforme en ligne pour aider les patients souffrant de symptômes persistants de la covid à mieux s'orienter dans notre système de santé. Après avoir renseigné un questionnaire, le patient pourra soit imprimer ses réponses pour les présenter à son médecin traitant, soit partager directement les données par voie électronique. La plateforme sera déployée dès janvier prochain.

Quant à l'article 2 de la proposition de loi, il définit les grands principes présidant à la prise en charge des patients et au remboursement des soins liés aux symptômes persistants post covid. De telles dispositions sont en phase avec les orientations retenues par le Gouvernement pour structurer le parcours de soins, et je précise qu'il ne sera bien entendu aucunement indispensable de se déclarer sur la plateforme en ligne en cours de déploiement pour bénéficier d'une pleine prise en charge, qui sera fonction de la complexité de chaque situation.

S'agissant des modalités de remboursement des soins liés aux symptômes persistants, la prise en charge conjointe des assurances maladie obligatoire et complémentaire offre déjà aux assurés une couverture intégrale, sans qu'ils aient besoin d'être reconnus comme souffrant d'une affection de longue durée (ALD). Sous réserve de précisions rédactionnelles, cette disposition permet de rappeler que notre système de protection sociale est en mesure de répondre pleinement à toutes celles et tous ceux qui souffrent de covid long, et nous ne pouvons que nous en féliciter.

Mesdames et messieurs les députés, monsieur le rapporteur, vous l'avez compris : le Gouvernement partage les objectifs de la proposition de loi, qui correspond à des initiatives déjà en place ou en cours de déploiement. Les échanges que nous nous apprêtons à avoir à cette occasion permettront de rappeler l'importance de la question du covid long pour nos concitoyens, mais aussi d'informer sur les actions que nous avons collectivement engagées et que nous renforcerons dans les prochains mois, afin que toutes celles et tous ceux qui sont concernés soient pris en charge dans les meilleures conditions.

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