Intervention de Hélène Zannier

Séance en hémicycle du jeudi 25 novembre 2021 à 15h00
Coopération hospitalière transfrontalière — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHélène Zannier :

« La création d'une Europe de la santé doit devenir notre priorité. Notre volonté est de doter l'Europe de compétences très concrètes en matière de santé. » Voilà ce que déclarait le Président de la République le 18 mai 2020, à l'occasion d'une conférence de presse commune avec la chancelière allemande. En mars 2020, l'Europe était devenue l'épicentre de l'épidémie. Ses détracteurs critiquaient alors son impuissance face à la menace sanitaire et l'absence de mécanismes permettant d'harmoniser la réponse des États à l'échelle communautaire.

Cette pandémie a certes porté un coup dur à la coopération transfrontalière. Dans mon territoire mosellan, la période de fermeture des frontières a constitué un frein, retardant le passage des véhicules d'urgence et obligeant parfois à transférer par hélicoptère des patients atteints du covid ; mais elle a également mis en évidence l'ingéniosité, l'inventivité et la solidarité entre des peuples voisins. Elle a révélé la nécessité d'une Europe de la santé.

Au sein des bassins de vie transfrontaliers, dont je suis issue, les acteurs de terrain ont redoublé d'efforts et de créativité pour faire face au virus et sauver des vies. À titre d'exemple, la coopération interhospitalière entre la Sarre et la Moselle a permis de transférer des patients vers les hôpitaux de Völklingen ou Sarrebruck, situés tout près de la frontière. Des médecins allemands sont venus soutenir leurs homologues mosellans, et l'inverse a également été vrai. En tout, grâce à un travail coopératif entre les autorités, le transfert de près de 200 patients atteints du covid a pu être organisé des hôpitaux d'Alsace et de Lorraine vers ceux d'Allemagne, de Suisse ou du Luxembourg. On peut également citer le pacte d'assistance mutuelle signé en novembre 2020 par le conseil régional du Grand Est et les Länder voisins.

Je tiens à saluer ces initiatives et à remercier une nouvelle fois les partenaires qui nous ont aidés à surmonter cette crise. Plus généralement, je tiens à souligner que de nombreuses coopérations existent déjà, parfois de manière informelle – par exemple, comme j'ai pu le constater, entre les pompiers de Boulay en Moselle et leurs collègues et voisins allemands.

Il faut désormais aller beaucoup plus loin. Il nous faut simplifier les démarches nécessaires à la création de partenariats entre les établissements de santé de pays voisins, en instaurant et en développant un schéma de coopération transfrontalière sanitaire, ou encore en harmonisant certains droits des patients de ces zones de vie. C'est tout l'enjeu de cette proposition de résolution. Chers collègues, en tant que frontalière de l'Allemagne et du Luxembourg, je suis convaincue de l'importance de développer et d'approfondir la coopération transfrontalière en matière de santé. J'en profite pour remercier vivement nos collègues Herth et Becht d'avoir mis à l'ordre du jour ce sujet d'importance.

Cette proposition de résolution doit être adoptée, en premier lieu parce qu'elle appelle à élaborer un état des lieux des partenariats et accords transfrontaliers existants, condition sine qua non de l'élaboration d'une réelle stratégie sanitaire européenne. Elle s'inscrit aussi dans la philosophie d'harmonisation des systèmes de prise en charge des soins prônée par les textes européens, notamment le programme européen pour la santé adopté en novembre 2020, qui permettra le financement de projets ayant vocation à accroître la coopération transfrontalière. En outre, elle s'inscrit dans la continuité de notre volonté de simplification des démarches administratives, cheminement déjà engagé au travers de la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.

Elle répond enfin à une logique géographique, ainsi qu'à une demande de longue date des habitants des territoires frontaliers. Aujourd'hui, dans un contexte de désertification médicale, de nombreux patients en situation d'urgence sont plus proches des infrastructures de santé du pays voisin que de celles de leur territoire. Pour des raisons évidentes, il serait judicieux d'accélérer et d'harmoniser ces échanges sanitaires au sein d'un même bassin de vie. Ces échanges se font des deux côtés de la frontière, tous les pays européens pouvant souffrir d'une pénurie de médecins.

Comme le disait Isaac Newton, nous construisons « trop de murs et pas assez de ponts. » L'adoption de cette résolution sera une première pierre dans la construction d'un pont que j'espère un jour plus large et plus robuste. Nous parlons aujourd'hui de coopération transfrontalière en matière de santé : j'espère que d'autres chantiers suivront, en matière d'éducation, de mobilité, d'harmonisation fiscale, et, pourquoi pas, une vraie réflexion sur le statut des travailleurs transfrontaliers, qui souffrent des disparités réglementaires entre les pays.

C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite aujourd'hui à construire un pont en votant en faveur de cette proposition de résolution.

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