Intervention de Michèle Crouzet

Séance en hémicycle du jeudi 7 octobre 2021 à 15h00
Lutte contre la disparition des abeilles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Crouzet :

La proposition de résolution présentée par Robert Therry et visant à lutter contre la disparition des abeilles doit mobiliser chacun d'entre nous. Nous ne pouvons que soutenir une telle démarche, tant la préservation de ces pollinisateurs est essentielle. Les abeilles assurent 80 % de la pollinisation et donc de la reproduction des plantes à fleurs, et ce sont jusqu'à 90 % des espèces végétales à fleurs qui dépendent uniquement des insectes pollinisateurs. Ainsi, 75 % de nos ressources alimentaires, fruits, légumes, oléagineux, dépendent de leur action fécondatrice. Enfin, sur le plan financier, toutes données confondues, l'extinction des abeilles coûterait près de 2,9 milliards d'euros à la France.

L'état de santé des abeilles est un indicateur de la qualité de leur environnement et donc du nôtre. Pourtant, depuis la fin des années 1970, nous assistons à leur anéantissement, de manière très inquiétante ; dans certaines régions de Chine, les abeilles ont même complètement disparu. En France, près de 15 000 apiculteurs ont cessé leur activité en dix ans et près de 30 % des colonies d'abeilles disparaissent chaque année.

Les raisons en sont multiples, mais deux d'entre elles sont particulièrement identifiables : l'utilisation d'insecticides par l'agriculture intensive et les dégâts causés par le frelon asiatique. Concernant la première, le plan Pollinisateurs lancé par le Gouvernement devrait permettre de réviser l'arrêté de 2003 relatif aux conditions d'utilisation des insecticides et acaricides à usage agricole en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs. L'objectif est de n'utiliser sur les cultures en floraison et sur les zones de butinage que des produits dont l'évaluation des risques confirme qu'ils sont peu dangereux pour les abeilles. En outre, ces produits ne pourront être appliqués qu'en dehors de la présence d'abeilles et, dans le cas général, entre deux heures avant le coucher du soleil et trois heures après son coucher.

Ensuite, il est indispensable que la France reste mobilisée en faveur de l'évolution au niveau européen des méthodes d'évaluation des risques des produits phytopharmaceutiques pour les pollinisateurs. En juin dernier, nous avons avancé dans ce domaine, grâce à la définition d'un objectif très strict de protection des abeilles domestiques ; nous devons poursuivre et mieux prendre en considération les pollinisateurs sauvages. Profitons de la présidence française à l'Union européenne pour obtenir des progrès dans ces domaines.

Le frelon asiatique constitue un second sujet d'inquiétude. Il est chaque année la cause de près de 30 % de la mortalité des colonies d'abeilles. Des produits chimiques, du type biocides, sont d'ores et déjà utilisés contre lui. Ce n'est pas suffisant. Dès 2013, la profession apicole avait demandé une dérogation pour utiliser le dioxyde de soufre (SO2) en ce sens, entre les mois d'août et novembre. La même année, une dérogation a été théoriquement accordée pour l'expérimenter, mais le délai était trop court eu égard à celui auquel le dépôt de dossier était subordonné – aucun dossier n'a été déposé. Il aura fallu attendre ce quinquennat, plus particulièrement l'année 2019, pour relancer l'idée d'une demande de dérogation relative à l'usage du SO2. Un cofinancement du ministère de la transition écologique et du ministère de l'agriculture et de l'alimentation a été imaginé. Le premier devrait piloter les discussions avec les professionnels et les industriels en vue de compléter les financements – nous l'y encourageons vivement.

En voulant inciter le Gouvernement à réfléchir à l'élaboration d'un plan national de lutte contre le frelon asiatique, la présente proposition de résolution s'inscrit dans la logique déjà amorcée. Elle réaffirme l'intérêt et l'importance de la question. C'est une des raisons pour lesquelles le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés la soutiendra. J'ajoute enfin qu'une telle réflexion ne pourra faire l'économie d'une analyse approfondie de la filière miel française. Celle-ci mérite d'être mieux structurée et nos apiculteurs méritent d'être protégés de la concurrence étrangère. L'Europe ne produit aujourd'hui pas assez de miel pour subvenir aux besoins de ses consommateurs et en importe environ 40 % de pays tiers. Or la concurrence, majoritairement chinoise, propose un miel de moindre qualité, évidemment beaucoup moins cher. Le Gouvernement et le Parlement devront étudier cette piste. En attendant, je réitère le soutien du groupe Dem à cette proposition de résolution.

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