Intervention de Éric Ciotti

Séance en hémicycle du lundi 28 juin 2021 à 16h00
Respect des principes de la république — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Si nous débattons ce soir de ce texte en nouvelle lecture, c'est parce qu'à l'automne 2020 un enseignant, Samuel Paty, a été assassiné, décapité. En France, au vingt et unième siècle, en France, pays héritier des Lumières, ce professeur a été assassiné parce qu'il enseignait la liberté, la force de la liberté. Voilà où se trouve l'enjeu de ce texte : poser des digues, des garde-fous pour éliminer cette menace qui, lentement, gangrène notre société, nos territoires par la violence, l'intimidation, la soumission. En prononçant cette allocution, je voudrais avoir une pensée émue non seulement pour les 270 morts et les 900 blessés, victimes, martyrs de l'islamisme en France, mais aussi pour ceux qui, résistants du quotidien, luttent chaque jour contre cet obscurantisme qui nous menace et qui, pour nos concitoyens, constitue la première de leurs préoccupations.

Comme symbole de ces résistants – je veux ce soir lui rendre hommage du haut de cette tribune –, je pense encore une fois à la jeune Mila, menacée de mort pour s'être dressée face à l'islamisme, pour avoir usé de sa liberté de conscience, de sa liberté de parole, dans la fraîcheur de cette jeunesse qui la guide. Citer son nom, c'est ici montrer au monde que la représentation nationale tient à être à ses côtés face aux agents de la haine. Non, elle n'est pas seule. Non, ces barbares ne peuvent obtenir de victoire sur sa liberté. Ses mots, dans une interview, il y a quelques jours, sont glaçants : elle y évoque son avenir sombre, le fait que la République ne peut pas, ne sait pas la protéger et ne l'a pas protégée. La République, madame la ministre déléguée, doit la protéger, cette jeune fille doit vivre librement. Où sont, pour la soutenir, ces associations qui sont si vigilantes sur les droits de chacun ? Elles sont redoutablement et dramatiquement absentes, alors que la liberté ne se définit pas par morceaux : elle est une, entière, indivisible.

Oui, la République a le devoir de se tenir aux côtés de ces combattants de la laïcité et de la liberté, ces nouvelles Mariannes. La République a le devoir de faire reculer les islamistes qui veulent la faire taire. La République a le devoir de mettre un terme aux revendications politiques et religieuses qui veulent affaiblir notre modèle républicain, changer la France, transformer notre mode de vie qui est l'héritier d'une civilisation, une civilisation, n'en déplaise à certains, je le dis ici, judéo-chrétienne, qui a façonné, forgé ce que nous sommes au cours des siècles et des millénaires. Ouvrons enfin les yeux : dans les familles, à l'école, à l'université, à l'hôpital, dans les associations, dans les services publics, dans les piscines, sur nos plages, les islamistes conquièrent des âmes, des territoires et veulent nous soumettre.

Oui, l'islamisme avance. Les chiffres reflètent cette situation particulièrement inquiétante, voire préoccupante : 74 % des jeunes musulmans déclarent faire passer leurs convictions religieuses avant les valeurs de la République. Alors oui, l'urgence – et ce texte aurait dû en être le cadre – est de mettre un terme, un coup d'arrêt ferme, résolu, déterminé à cette avancée de l'islamisme politique.

Dans ce contexte, le Sénat avait opportunément adopté des dispositions particulièrement pertinentes, que nous avions, Annie Genevard, Julien Ravier et moi-même, ainsi que beaucoup d'autres de nos collègues, défendues ardemment mais que vous aviez toutes refusées en première lecture. Le Sénat a eu le courage que vous n'avez pas eu. Malheureusement, ces mesures ont toutes été supprimées par la commission spéciale que vous présidez, monsieur le président de Rugy.

Je pense à l'interdiction du port du voile et des signes religieux ostentatoires pour les accompagnateurs scolaires. Comment avez-vous pu accepter cela, madame la ministre déléguée, vous qui êtes si attachée aux droits et aux libertés des femmes ? Comment avez-vous pu accepter qu'on laisse voilées des fillettes dans notre pays ? Le Sénat s'y est opposé mais vous êtes revenus sur cette disposition. Bien sûr, nous tenterons de la réintroduire, parce que c'est un principe avant tout de bon sens.

Je pense également à la possibilité, pour le règlement intérieur des piscines et des espaces publics de baignade, d'interdire le port du burkini, qui est un étendard du prosélytisme islamiste, ainsi qu'à l'interdiction du port, par les utilisateurs, de signes religieux ostensibles dans les services publics, notamment à l'université, ou encore à la possibilité de suspendre les allocations familiales en cas d'absentéisme scolaire. Toutes ces mesures auraient permis de mieux combattre les séparatismes. Vous vous y êtes systématiquement opposés.

Ce texte est silencieux également sur une problématique qui ne peut être dissociée de la volonté d'affirmer nos principes républicains : si nous ne combattons pas une immigration illégale, que nous n'avons pas la capacité d'assimiler aux valeurs de la République, nous entretiendrons ces ferments de séparatisme. Le texte est totalement silencieux sur les questions d'immigration. Il est également silencieux sur l'école, alors que certaines écoles publiques ne peuvent plus aujourd'hui accueillir d'élèves juifs ou ne peuvent pas se nommer « Samuel Paty » pour rendre hommage à ce professeur.

Il ne reste de ce texte qu'un filet d'eau tiède, une addition de mesurettes supprimant toutes les mesures courageuses du Sénat, un texte qui n'est en rien à la hauteur des dangers qui nous menacent. Face à l'islamisme, ce pouvoir et cette majorité s'avèrent incapables de traduire en actes la parole forte et martiale du Président de la République ou du ministre de l'intérieur. Ce décalage entre vos paroles et vos actes, qui est la marque de fabrique de ce pouvoir, décrédibilise la parole publique et l'action de ceux qui gouvernent : il nourrit leur rejet. Ce décalage n'est pas étranger non plus aux résultats d'hier : de très nombreux Français ont perdu confiance dans ceux qui nous gouvernent, parce qu'ils refusent d'agir.

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