Intervention de M'jid El Guerrab

Séance en hémicycle du jeudi 6 mai 2021 à 9h00
Revenu de solidarité active pour les jeunes de 18 à 25 ans — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaM'jid El Guerrab :

Nous examinons ce matin la proposition de loi de notre collègue François Ruffin visant à étendre le revenu de solidarité active aux jeunes de 18 à 25 ans. Sur tous les bancs, depuis maintenant plus d'un an, dans l'opposition comme dans la majorité, nous sommes tous préoccupés par la situation des jeunes qui subissent de plein fouet les répercussions économiques et sociales de la crise sanitaire. Nous avons tous formulé des propositions, certes différentes, mais qui partageaient un même objectif : lutter contre la pauvreté des jeunes. Un débat sur l'action de l'État à l'égard des plus précaires se tenait d'ailleurs cette semaine dans notre hémicycle, au cours duquel j'ai pu témoigner de la détresse financière et psychologique des étudiants, qui était au cœur de ces échanges. J'ai même raconté la visite que j'ai faite à une association d'aide alimentaire, à l'occasion de laquelle j'ai pu voir cette détresse de mes propres yeux : des heures d'attente pour un panier-repas avec des pâtes ou du riz. Cette visite était assez poignante, et je recommande à tous mes collègues députés d'en faire autant.

Même si nous devons encore faire davantage, la majorité a pris des mesures fortes ces derniers mois pour lutter contre la précarité des jeunes avec, notamment, le plan 1 jeune, 1 solution, déjà évoqué par mon collègue Corceiro, doté de 9 milliards d'euros pour soutenir l'emploi des jeunes, le doublement du nombre de bénéficiaires de la garantie jeunes, qui ouvre droit à une indemnité de 500 euros par mois et à un parcours d'insertion, le versement d'aides exceptionnelles à destination des jeunes en difficulté face à la crise, ou encore l'ouverture de 250 000 services civiques qui permettent de s'engager pour les autres tout en percevant une indemnité. Notre majorité partage donc la volonté d'agir en faveur de la jeunesse et de lutter contre la précarité qui la frappe.

Je dois dire aussi, mes chers collègues, qu'à titre personnel je rejoins absolument votre souhait d'avoir ce débat sur l'égalité des droits, en particulier des droits sociaux, par fidélité à l'égard de notre modèle universaliste et du principe républicain d'égalité que nous partageons tous. La majorité est toutefois en désaccord avec la méthode.

Je souhaite d'abord rappeler que le groupe Agir ensemble, à l'initiative de ma collègue Valérie Petit – que je salue et dont je suis certain qu'elle m'écoute en cet instant –, a proposé la création d'un socle citoyen. Il s'agit d'une version inédite du revenu universel répondant à l'impératif de garantir à chacun un filet de sécurité à partir de 18 ans.

Notre groupe a fait adopter en octobre dernier, lors de la journée parlementaire qui lui était réservée, une proposition de résolution invitant le Gouvernement à lancer un débat public sur la création d'un mécanisme de revenu universel appelé socle citoyen. Nous attendons ce grand débat, madame la ministre déléguée. Au plan financier, cette réforme n'affecterait pas les dépenses publiques. En effet, l'économie réalisée grâce à la simplification du système de prestations sociales, qui atteint aujourd'hui un coût annuel de 400 milliards d'euros, un taux unique d'imposition de 32 % et le maintien des tranches supérieures financeraient l'individualisation du socle citoyen qui, au regard de son montant, s'apparenterait au RSA. Quant à la proposition que vous nous faites, chers collègues, son coût est estimé à 5 milliards d'euros.

Notre ambition pour la jeunesse est non pas de l'enfermer dans un minimum social mais bien de la soutenir et de l'accompagner dans une période où tous les horizons doivent lui être ouverts. Avec l'élargissement de la garantie jeunes, nous proposons une indemnité mensuelle qui ne se résume pas à une simple compensation financière mais se double d'un véritable accompagnement personnalisé, d'une formation, d'un parcours d'insertion vers l'emploi et d'un engagement citoyen. Nous sommes convaincus qu'une aide sèche ne peut pas répondre à la volonté d'émancipation de la jeunesse. Parce que chaque jeune est différent et parce que le critère d'âge ne suffit pas pour constituer un groupe homogène, nous devons proposer à la jeunesse du cousu main. Pour ce faire, nous pouvons compter sur les acteurs locaux comme les missions locales et les départements, entre autres. Faisons-leur confiance.

Nos propositions sont ambitieuses : réfléchissons ensemble dans un cadre non partisan à de nouveaux dispositifs réalistes tels que le socle citoyen, pour garantir à chacun un filet de sécurité tout au long de la vie. Vous l'aurez compris, pour toutes ces raisons, mon groupe s'opposera à cette proposition de loi. À titre personnel, je m'abstiendrai.

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