Intervention de Raphaël Gauvain

Séance en hémicycle du mardi 13 juillet 2021 à 15h00
Prévention d'actes de terrorisme et renseignement — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRaphaël Gauvain, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

La commission mixte paritaire a échoué. Convoquée vendredi dernier à l'Assemblée nationale, elle n'a hélas pas abouti à un texte commun, malgré les très nombreux échanges avec nos collègues du Sénat. Je le regrette profondément. Si nos deux assemblées étaient en mesure de s'accorder sur un certain nombre d'articles, pour lesquels les divergences étaient surmontables, un désaccord majeur subsistait quant à l'articulation des mesures prévues par les articles 3 et 5, et relatives à la lutte contre le terrorisme.

Vous l'avez rappelé, madame la ministre déléguée, le point d'achoppement concernait la prise en charge des sortants de prison. Nous étions toutefois d'accord sur le constat et la nécessité, pour le législateur, de prévoir des mesures allant dans ce sens. Il y a aujourd'hui un trou dans la raquette, ces détenus condamnés pour des faits extrêmement graves présentant encore des profils extrêmement préoccupants. Le paradoxe est que, du fait du durcissement des conditions de détention, ces personnes – M. le garde des sceaux a rappelé qu'elles seront 162 à avoir purgé leur peine d'ici à la fin de l'année 2023 – sortiront de prison de manière sèche, c'est-à-dire sans aucune mesure de suivi et d'accompagnement.

Tout comme la proposition de loi que nous avons présenté l'année dernière avec Mme la présidente de la commission, Yaël Braun-Pivet, au nom de la majorité, le projet de loi tend à remédier à ce paradoxe et à fournir des instruments à nos services de sécurité. Nous partageons cet objectif avec le Sénat, mais nous divergeons sur l'architecture des mesures à prendre.

Le Sénat souhaitait instaurer un système de contrôle et de suivi des sortants de prison très largement placé sous la responsabilité du juge judiciaire, celui-ci prenant sa décision après demande préalable des services de renseignement et débat contradictoire. Pour l'Assemblée nationale – je pense exprimer l'opinion des groupes majoritaires et de plusieurs groupes de l'opposition –, la priorité dans le suivi et le contrôle des sortants de prison doit être donnée, comme le fait le projet de loi, aux MICAS et au pouvoir administratif. Rappelons que les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance permettent à un préfet d'imposer à une personne un pointage quotidien au commissariat, dans la limite de trois fois par semaine, de lui interdire de quitter une commune ou de paraître dans certains lieux. La décision relève du préfet, mais elle est contrôlée par le juge administratif.

Depuis 2017, comme l'ont montré les travaux que nous avons conduits avec Yaël Braun-Pivet et Éric Ciotti, membre de l'opposition, sur la mise en œuvre de la loi SILT, les MICAS ont démontré leur grande efficacité. Elles constituent un outil indispensable pour les services de renseignement dans la lutte contre le terrorisme et nous ne pensons pas qu'il faille bouleverser le système. Il faut au contraire renforcer et pérenniser les MICAS. Celles-ci peuvent actuellement être prises pour une durée maximale d'un an et nous proposons, comme en première lecture, de porter cette durée à deux ans pour les terroristes sortant de prison.

Malgré de très nombreux allers et retours avec nos homologues du Sénat – au total, onze tentatives de rédaction commune –, nous n'avons pas réussi à nous entendre sur un article de compromis tant la philosophie du Sénat se distingue de la nôtre. M. le garde des sceaux l'a dit, la commission des lois a rétabli hier le texte adopté en première lecture par notre assemblée. Quelques aménagements ont été apportés afin de tenir compte de modifications rédactionnelles introduites par le Sénat, mais le projet de loi soumis cet après-midi à votre examen est le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

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