Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du mardi 13 juillet 2021 à 15h00
Lutte contre les inégalités mondiales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Les pays les plus pauvres ont un accès retardé au vaccin. À l'heure où je parle, seuls 1 % des Africains ont été vaccinés contre 40 % des Européens et 50 % des Américains. Covax, le programme de l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé, chargé de fournir en doses les pays en développement, n'a expédié que 100 millions de doses dans le monde alors que 500 millions étaient pourtant promises dès juillet. Selon le rapport sur la sécurité alimentaire publié hier, 118 millions de personnes supplémentaires ont été confrontées à la faim en 2020 par rapport à 2019, du fait de la crise sanitaire.

Dans ce contexte, nous devons redoubler d'efforts de solidarité à l'égard des populations les plus vulnérables. Je rappelle avec force qu'aucun pays, la France pas plus que les autres, ne pourra se développer s'il ne prend pas en considération le besoin de tous les peuples de s'épanouir dans le respect d'une seule planète – car nous n'en avons qu'une. Si nous ne nous engageons pas dans ce mouvement, nous nous condamnons tous à des affrontements fratricides et sans issue.

En 1970, les pays riches s'étaient engagés à consacrer 0,7 % de leur produit intérieur brut à l'aide au développement ; le compte n'y est toujours pas. Si l'aide au développement a augmenté, elle ne représente, par exemple, que 1 % des plans de relance pour lutter contre le covid-19, ce qui est insuffisant pour juguler la pandémie au niveau mondial.

Néanmoins l'objectif visé en matière de part d'aide publique au développement est en hausse, à 0,55 % de notre revenu national brut pour l'année 2022. Nous avons utilement complété l'article 1er du projet de loi en faisant réapparaître les normes internationales dans nos politiques.

Reste que des questions de fond se posent toujours. Nous avons été nombreux à exprimer notre regret que cette loi de programmation ne s'étende que jusqu'en 2022 alors que nous sommes déjà en 2021. La rédaction finale prévoit que la France s'efforcera d'atteindre en 2025 une part de 0,7 % du PIB consacrée à l'aide publique au développement. Nous regrettons que cette formulation n'ait pas de valeur contraignante et aurions préféré qu'il soit simplement précisé que la France lui consacre 0,7 % de son PIB en 2025, conformément à l'engagement du Président de la République.

Si nous saluons le calendrier indicatif des cibles intermédiaires permettant d'atteindre cet objectif, il aurait été plus judicieux de raisonner en volume et non en pourcentage de RNB, car ce pourcentage est déjà dépassé cette année, en raison de la diminution du revenu national dû à la crise. En outre, cette hausse est en partie en trompe-l'œil car certaines données, telles que la prise en charge des migrants dans notre pays, sont incluses dans le calcul.

Le groupe Libertés et territoires a beaucoup insisté lors des débats sur la nécessité de privilégier les dons par rapport aux prêts et de cibler l'aide vers les pays qui en ont le plus besoin.

La rédaction définitive du projet de loi constitue une avancée en la matière puisque les dons devront représenter 70 % du montant total de l'aide publique au développement – hors allégements de dette et prêts aux institutions financières –, ce qui va insuffler une évolution positive au modèle français d'aide au développement qui tend encore à concevoir l'aide comme un investissement à rentabiliser alors qu'elle devrait avoir pour seule vocation d'aider les populations. Toutefois, ce montant reste inférieur à notre demande et à la moyenne des pays donateurs de l'OCDE l'Organisation de coopération et de développement économiques – qui se situe autour de 85 %, je le rappelle. Le texte prévoit aussi que 25 % de l'aide-pays programmable seront ciblés sur les pays prioritaires en 2025 : ce recentrage vers les pays qui en ont le plus besoin est crucial à nos yeux, mais il aurait dû être plus important parce que la France a créé sa propre liste de pays prioritaires, distincte de celle de l'OCDE – de toute façon, nous ne disposons toujours pas de moyens permettant de contrôler réellement les montants affectés à ces priorités.

Le groupe Libertés et territoires votera ce texte en se félicitant du consensus trouvé à l'Assemblée nationale et au Sénat. Si nous aurions souhaité qu'il aille plus loin, il constitue néanmoins une avancée indéniable pour les populations qui en ont besoin. Je renouvelle évidemment ma satisfaction quant à la qualité du travail effectué grâce au rapporteur et au président de la commission des affaires étrangères, et je souligne le grand esprit d'ouverture du Gouvernement qui a accepté plusieurs avancées du Parlement : je pense à nos amendements visant à renforcer l'accessibilité des produits de santé issus de la recherche publique ou encore à instaurer une obligation de vigilance à l'égard des acteurs du développement. Je tiens à saluer les nombreuses ONG qui nous ont tous aidés dans la préparation de ce texte et qui œuvrent chaque jour pour tenter d'améliorer le sort de nombreuses populations à travers le monde. Le contexte particulier que nous vivons nécessite un effort de solidarité décuplé et nous devons faire tout ce qui est possible pour que la crise ne vienne pas balayer les progrès réalisés par des décennies d'efforts en matière de développement humain, de protection de l'environnement, d'accès à l'éducation ou encore d'égalité entre les femmes et les hommes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.