Intervention de Dominique Potier

Séance en hémicycle du jeudi 1er avril 2021 à 15h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Je présenterai en même temps les amendements nos 6629 et 6630  : notre temps, en raison du temps législatif programmé, est compté.

Le temps est compté aussi pour la planète ! Il me semble qu'il n'est pas excessif de penser que les publicités en faveur de produits qui ont un impact démesurément négatif sur notre santé, aussi bien celle des hommes que de la planète, devront être un jour régulées et interdites. C'est l'objet de ces amendements, qui ne diffèrent que par leurs modalités. Mes collègues et moi-même nous inscrivons ici délibérément dans la logique de la loi Évin – loi du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme.

L'article 4, tel qu'il est proposé par le Gouvernement, fait partie des plus insignifiants du projet de loi. C'est un peu comme si Claude Évin, au lieu d'avoir le courage de proposer un texte qui a véritablement permis de réduire les conséquences sanitaires du tabac et de l'alcool dans notre pays, avait interdit la publicité en faveur du tabac, mais pas des cigarettes, ou encore la publicité en faveur de l'alcool, mais pas du vin, de la bière ou des apéritifs. La loi Évin prévoyait une interdiction claire et assumée de la publicité pour ces produits, au nom de l'intérêt général.

J'estime que la question du dérèglement climatique – puisque ce sont les termes que nous avons retenus – est une question de vie ou de mort pour l'humanité. Les 1 % des personnes les plus riches au monde consomment autant que les 50 % les plus pauvres. La baisse de notre consommation passe par la modification de notre imaginaire et donc par la régulation de la puissance privée qui le domine.

À cet égard, ce ne sont pas les entreprises dans leur ensemble qui sont ici visées, madame la rapporteure, mais les quelques sociétés qui représentent 80 % du chiffre d'affaires publicitaire total. Il est vrai que les médias se trouvent dans une situation de dépendance vis-à-vis de ces recettes. Mais une société qui ne saurait pas inventer un autre système de financement des médias, qui ne saurait pas aiguiller l'industrie publicitaire et ses talents vers d'autres fins que celles de l'appât du gain et de la consommation en les mettant au service des intérêts de l'humanité, est certainement une société en danger de mort.

Une loi Évin du climat s'impose aujourd'hui. Chaque fois que nous examinons des textes ou revoyons des décrets – avec discernement et suffisamment de temps, madame la ministre – , il nous faut avoir le même courage que Claude Évin en son temps, au nom de la santé des hommes et de la planète. Il convient de réguler la publicité qui représente aujourd'hui 31 milliards d'euros de servitude marchande pour les Français. Hormis le budget de l'ADEME – Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – qui, comme vous le savez, n'est pas à la hauteur des enjeux, nous ne disposons pas de chiffres sur l'écologie à présenter en comparaison. Je prendrai donc le montant de nos dépenses en matière de prévention et de communication en faveur de l'éducation à la santé publique, qui s'élèvent à 6 milliards d'euros. La publicité représente donc 31 milliards d'euros, contre 6 milliards pour la santé publique et un montant à la fois inconnu et insuffisant pour le climat. Il est temps de rééquilibrer les choses.

Je terminerai en citant Marie Balmary – je crois que mon collègue Brahim Hammouche connaît bien cette psychanalyste – , qui nous dit que nous sommes à la fois des esclaves et des pharaons s'agissant de la publicité et de la consommation. Tout l'enjeu, avec la régulation de la consommation que nous appelons de nos voeux, est de devenir des hommes libres, des républicains, des citoyens.

1 commentaire :

Le 06/04/2021 à 15:40, Laïc1 a dit :

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Personnellement, jamais une publicité ne m'a déterminé à acheter tel produit plutôt qu'un autre. Certains surestiment le potentiel persuasif des publicités.

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