M. Éric Girardin attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur l'absence de « données robustes » relatives à la fin de vie, constatée par la mission d'évaluation de l'Assemblée nationale de la loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « Claeys-Leonetti ». Ainsi, est-il écrit (en page 23 du rapport) que cette mission s'est déroulée « dans un contexte singulier ». En effet, elle reconnaît que si elle a pu mener à bien son travail d'évaluation qualitative de la loi, « il en va différemment du travail d'évaluation quantitative de la loi, pour lequel la mission a rencontré des difficultés que les rapporteurs souhaitent souligner ». Après le constat d'une méconnaissance réelle des circonstances exactes de la fin de vie posé par l'Inspection générale des affaires sociales en 2018, le manque d'indicateurs sur la mise en œuvre de la loi « Clayes-Leonetti » et, plus globalement, sur la fin de vie en France, est aujourd'hui d'une évidence criante. En l'absence de données robustes, la mission souligne qu'elle n'a pas été en mesure d'évaluer précisément l'écart entre l'offre et les besoins en soins palliatifs. Les données relatives aux directives anticipées restent aussi incertaines, tandis que l'on ne sait pas dénombrer précisément les sédations profondes et continues administrées chaque année, ni même les demandes à cet effet, pas plus que les procédures collégiales organisées. Les données publiées sont rares et parfois anciennes ou issues d'un échantillon peu représentatif. De plus, les données collectées sont muettes sur le parcours et l'expérience de la personne en fin de vie, dont les besoins sont mal évalués. Cette absence de retour d'expérience, limite la capacité à évaluer l'effectivité des dispositions légales en vigueur. Enfin, les travaux de recherche sont, eux aussi, largement manquants. Malgré la création, en 2018, d'une plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie, ayant pour but de contribuer à la structuration, au développement et à la valorisation de la recherche française dans le domaine de la fin de vie et des soins palliatifs, les travaux de recherche ne sont pas à la mesure de l'importance de l'enjeu que constitue la fin de vie aujourd'hui. Par conséquent, il demande de bien vouloir lui indiquer les mesures concrètes qu'il entend prendre et dans quel délai, afin de remédier à cette situation, qui hypothèque gravement tout débat argumenté sur la fin de vie en France.
Le plan national 2021-2024 « développement des soins palliatifs et accompagnement de la fin de vie » a été construit sur l'appui des différents constats établis avec les parties prenantes, et qui ont été rappelés par la mission d'évaluation de la loi du 2 février 2016 menée par l'Assemblée nationale. Ainsi figure, parmi les actions transversales du plan, et en fil rouge de l'ensemble des actions opérationnelles qui le structurent, l'impératif de disposer de données robustes et fines en matière d'évolution de l'offre et d'activité des équipes de soins palliatifs, pour mieux évaluer l'adéquation des organisations aux besoins de soins et d'accompagnement de nos concitoyens. Le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), créé en 2016, a vu ses missions recentrées sur l'information de nos concitoyens et sur la collecte et l'analyse de données. A ce titre, il participe aux travaux conduits et a notamment publié en 2023 la 3ème édition de l'Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie. L'instruction relative à la structuration des filières territoriales de soins palliatifs a été publiée en juillet 2023, afin d'accompagner l'organisation des filières de soins palliatifs sur les différents territoires. Elle fournit un cadre national précisant le maillage territorial à atteindre, les missions respectives des équipes spécialisées de soins palliatifs, clarifie leurs articulations avec les autres équipes de soins, précise les modalités du suivi de l'activité palliative et de la structuration de l'offre, renforce la place des intervenants de l'accompagnement de la fin de vie dans le parcours de soins et de vie de la personne malade et de ses proches. Il s'agit bien de soutenir l'offre spécialisée de soins palliatifs tout en renforçant les organisations propices à une prise en charge en proximité et en premier niveau de recours, y compris en ville. Un suivi de la mise en place de ces filières sera conduit sur la base d'indicateurs précis. Par ailleurs, des cellules d'animation régionale de soins palliatifs se mettent en place pour informer sur l'offre de soins palliatifs et les solutions d'accompagnement de la fin de vie, pour contribuer aux diagnostics territoriaux et à la remontée des besoins ainsi qu'à la lisibilité de l'activité palliative, qu'elle soit en établissement ou à domicile, et éclairer sur le niveau d'adéquation avec les besoins. Le plan national s'est fixé pour objectif de mobiliser la recherche et de partager ses enseignements (action n° 10). En lien avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, le ministère de la santé et de la prévention soutient la Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie (PNRFV), créée en 2018 pour structurer la dynamique de recherche, animer la communauté scientifique, valoriser les travaux de recherche et favoriser l'ouverture d'appels à projets spécifiques dans le champ de la fin de vie. Observatoire de la recherche française, la PNRFV recense les équipes mobilisées sur des projets de recherche, les accompagne et contribue à la diffusion de leurs travaux. A fin de l'année 2022, ils étaient près de 400 chercheurs, porteurs de 60 projets de recherche et de 130 thèses (dont 96 en cours). Des appels à projets de recherche sont lancés tous les ans par le ministère chargé de la santé, qui couvrent les champs de la recherche translationnelle, clinique, paramédicale, médico-économique et organisationnelle. Sur la thématique des soins palliatifs, ce sont 33 projets de recherche qui ont été financés depuis 2010 et qui ont engagé plus de 11 M€. L'enjeu est d'encourager les chercheurs à déposer des projets sur tous les programmes existants et de favoriser la multidisciplinarité. C'est le sens de la dynamique impulsée par le ministère pour développer les soins palliatifs et l'accompagnement de la fin de vie avec ce 5ème plan national et qui se poursuivra dans le cadre de la stratégie décennale en cours d'élaboration.
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