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Caroline Yadan
Question N° 7531 au Ministère auprès de la première ministre


Question soumise le 25 avril 2023

Mme Caroline Yadan appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances sur les réseaux de prostitution dissimulés dans les salons de massage, majoritairement asiatiques. À Paris, 341 salons de massages proposant des relations sexuelles tarifées ont été recensées par l'association Zéro Macho, dont 49 dans le XVIIe arrondissement. Ces salons, qui ont pignon sur rue, exploitent des femmes, souvent étrangères et démunies et les contraignent à la prostitution. Elles sont, pour la plupart, enfermées dans ces salons plus de dix heures par jour et 7 jours sur 7. Aussi, elle lui demande quels moyens elle envisage de mettre en œuvre dans le cadre de la nouvelle stratégie nationale de lutte contre la prostitution pour fermer ces structures et pour que la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées soit appliquée, autour de ses trois objectifs : pénalisation et responsabilisation des clients, démantèlement des réseaux de proxénètes et accompagnement des personnes prostituées vers un parcours de sortie.

Réponse émise le 23 mai 2023

La lutte contre toutes les formes d'exploitation, notamment à des fins de prostitution, est une priorité de l'action publique de l'Etat. Cette priorité s'est, notamment, matérialisée avec la création, en 2013, de la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof). Dès 2014, était mis en œuvre un premier plan d'action national contre la traite des êtres humains, visant notamment à protéger les femmes victimes de traite à des fins d'exploitation sexuelle et à sanctionner les réseaux. L'accompagnement des personnes en situation ou en risque de prostitution constitue, à cet égard, une préoccupation constante des pouvoirs publics, renforcée depuis l'adoption de la loi no 2016-444 du 13 avril 2016 visant à lutter contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.  La loi du 13 avril 2016 décline dans le droit la position abolitionniste de la France en matière de prostitution, confortée à travers plusieurs textes de portée internationale, notamment la Convention des Nations Unies pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui. Inscrivant la prostitution dans le champ des violences, la loi permet notamment la dépénalisation des personnes prostituées et l'accompagnement de celles qui souhaitent sortir de la prostitution par la création d'un parcours de sortie de la prostitution (PSP). L'action du Gouvernement s'articule autour de quatre volets complémentaires : La pénalisation du recours à l'achat de services sexuels La prise en charge des personnes en situation de prostitution. Cela se traduit concrètement par la création de commissions départementales chargées de mettre en œuvre les parcours de sortie de prostitution. Ces parcours de sortie se font via un accompagnement financier (l'AFIS) et social (par les associations porteuses de l'agrément). La prévention de l'entrée dans la prostitution par la mise en place d'une politique d'information sur les réalités de la prostitution et les dangers de la marchandisation des corps dans les établissements scolaires Le renforcement des moyens des forces de sécurité intérieure qui luttent contre le proxénétisme. La Ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances a tenu le 8 février dernier le deuxième comité de suivi de l'application de la loi 2016-444 du 13 avril 2016, en présence de l'ensemble des acteurs concernés afin d'opérer un suivi attentif de la loi, de son application et de sa montée en puissance. La déclinaison au niveau local du PSP est suivie par les équipes territoriales aux droits des femmes et à l'égalité via l'animation des commissions départementales de lutte contre la prostitution, présidées par le préfet. Le déploiement du dispositif, dans chaque département, a supposé au préalable l'objectivation au niveau local du phénomène lié à la lutte contre le système prostitutionnel par des diagnostics territoriaux. Il appartient, en effet, aux commissions départementales de rendre un avis sur les demandes d'engagement et de renouvellement dans un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle qui lui sont soumises par les associations agréées à cet effet. Il revient aux préfets de décider d'autoriser ou de refuser les demandes d'engagement ou de renouvellement à la lumière de l'avis de la commission. Cette démarche a été plus ou moins rapide selon les départements. Au-delà des disparités locales liées à l'ampleur du phénomène, sont entrés en ligne de compte le degré de connaissance et d'analyse de cette question, ou bien encore la nécessité d'identifier les acteurs institutionnels et les relais associatifs pertinents.  Le déploiement du dispositif a par ailleurs dû intégrer les délais induits par la procédure d'agrément des associations par les services de l'Etat, préalable à leur rôle dans le dispositif et à leur participation aux commissions départementales. Les préalables requis pour son déploiement, en particulier au niveau local, étant particulièrement exigeants, la montée en charge s'est faite de manière progressive. Une circulaire interministérielle du 13 avril 2022 a, par ailleurs, rappelé aux préfets la nécessité d'installer une commission dans les départements dépourvus et la volonté d'augmenter le nombre de personnes prises en charge dans les PSP. Au 1er janvier 2023, 90 commissions départementales étaient installées sous l'autorité des préfets (55 au 30 novembre 2018). D'ici l'été 2023, l'ensemble des commissions seront installées. Par ailleurs, 121 associations sont agréées pour la mise en œuvre du parcours de sortie de la prostitution. Depuis sept ans, 1 247 personnes ont suivi ou sont en cours de suivi d'un parcours de sortie de prostitution. Au 1er janvier 2023, 643 personnes ont bénéficié de PSP soit une augmentation de près de 50% depuis 2021. Le parcours de sortie de prostitution a permis à 95% de ses bénéficiaires de trouver un emploi et/ou de suivre une formation. Conformément au décret du 21 octobre 2022, l'AFIS a été revalorisée rétroactivement à hauteur de 4 % à compter du 1er juillet 2022 afin de tenir compte de l'inflation. Son montant est majoré en fonction du nombre d'enfants à charge. Les moyens alloués à la lutte contre le système prostitutionnel sont en hausse constante, en 2023 ce sont près de 10 millions d'euros qui sont dédiés à la prévention et l'accompagnement vers la sortie de la prostitution, dont 3.4 millions proviennent directement des avoirs criminels confisqués dans les procédures de proxénétisme ou de traite des êtres humains, qui ont été alloués en 2023 à des projets innovants de prévention de la prostitution de prévention et d'information contre le proxénétisme et la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle, et pour l'accompagnement des personnes en situation de prostitution et/ou victimes d'exploitation sexuelle. De plus, dans le cadre du plan national de lutte contre la prostitution des mineurs qui a été doté de 14 millions d'euros, deux appels à projets relatifs aux maraudes numériques et aux lieux d'accueil et de prise en charge, ont permis de financer en 2022 une cinquantaine de projets portés par les associations et répartis sur l'ensemble du territoire. La Ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances a annoncé le 13 avril 2023 le lancement de concertations en vue de la création d'une stratégie nationale de lutte contre la prostitution. Les associations, comme ZéroMacho, y prendront toute leur part. L'objectif est d'adapter les réponses des institutions aux nouvelles formes de prostitution (cyber-prostitution, prostitution hôtelière), de coordonner les réponses des différents Ministères face aux enjeux communs de la lutte contre la traite des êtres humains en général et l'exploitation à des fins sexuelles en particulier, et ce, en prévision notamment des grands évènements sportifs prévus à l'automne 2023 avec la Coupe du monde de Rubgy et à l'été 2024 avec les Jeux Olympiques. En lien étroit avec les associations qui œuvrent sur le terrain et accompagnent au quotidien les victimes du système prostitutionnel, le Gouvernement souhaite augmenter le nombre de bénéficiaires des parcours de sortie de la prostitution et mettre en œuvre une politique dissuasive efficace à l'égard des clients infracteurs, conformément à sa politique en faveur de l'abolition du système prostitutionnel. Le prochain plan national de lutte contre l'exploitation et la traite des êtres humains, dont les travaux d'élaboration viennent de débuter avec les différents ministères et la société civile, et qui sera présenté à l'automne, appréhendera bien entendu l'enjeu de lutter contre toutes les formes d'exploitation sexuelle des femmes, notamment dans les salons de massage et les bars.

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