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Guillaume Kasbarian
Question N° 7063 au Ministère auprès du ministre des solidarités


Question soumise le 11 avril 2023

M. Guillaume Kasbarian alerte Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées sur les conséquences possiblement négatives du décret n° 2022-257 du 23 février 2022 relatif au cumul de la pension d'invalidité avec d'autres revenus et modifiant diverses dispositions relatives aux pensions d'invalidité. En effet, alors que ce décret introduit de nouvelles règles de cumul de la pension d'invalidité avec des revenus d'activité pour encourager le retour à l'emploi, il introduit des effets délétères pour la situation socio-économique de certains adultes handicapés qui voient leur pension suspendue. Cette nouvelle méthode de calcul entraîne la suspension ou la diminution de la pension d'invalidité si les ressources de la personne invalide dépassent le plafond annuel de la sécurité sociale du salaire de comparaison, entraînant de facto la suspension des rentes de prévoyance, puisqu'elles sont assujetties au versement d'une pension d'invalidité. Ainsi, les pensions des bénéficiaires se trouvant dans cette situation ont été suspendues de manière rétroactive à partir du 1er avril 2022, provoquant une perte de revenu brutale entre la suspension de leur pension d'invalidité et des contrats d'assurance prévoyance. La mise en place de ce plafond semble aller à l'encontre des objectifs de la réforme, n'encourageant pas les personnes invalides à retravailler au maximum de leur capacité, mais les encourageant plutôt à se limiter afin de ne pas dépasser le seuil pour conserver leur pension. Ce plafond va également à l'encontre de l'article L. 114-1-1 du code de l'action sociale et des familles selon lequel « la personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie ». La promotion du retour à l'emploi ayant pour objectif l'émancipation pour les personnes en situation de handicap, il souhaite donc savoir si le Gouvernement entend prendre des mesures pour corriger cet effet de seuil et permettre à ces personnes de retrouver le bénéfice de leur pension, afin de poursuivre notre engagement vers le plein-emploi.

Réponse émise le 20 juin 2023

La pension d'invalidité vise à compenser la perte conséquente de gains ou de capacité de travail. En fonction de la situation de l'assuré, cette pension équivaut à 30%, pour les pensionnés d'invalidité relevant de la 1ère catégorie, ou 50 % du revenu moyen calculé sur les dix meilleures années civiles de salaire, pour les pensionnés d'invalidité de catégorie 2 ou 3. La réforme mise en œuvre par le décret n° 2022-257 du 23 février 2022, vise à introduire davantage de justice pour les assurés qui souhaitent conserver ou reprendre une activité rémunérée après leur passage en invalidité afin de permettre que toute heure travaillée conduise à un gain financier. Avant cette réforme, les règles de cumul n'étaient en effet pas favorables à la reprise d'activité dans la mesure où les revenus cumulés des pensionnés d'invalidité – revenus d'activité et pension d'invalidité – ne pouvaient jamais dépasser un certain seuil. Ce seuil, dit de comparaison, était alors fixé au niveau du dernier revenu dont les assurés disposaient au cours de l'année précédant leur passage en invalidité. Depuis la réforme, ces pensionnés d'invalidité exerçant une activité professionnelle et dont les revenus cumulés dépassent le seuil de comparaison ne voient plus leur pension d'invalidité diminuer que de moitié. Il est rappelé qu'avant la réforme, la pension était réduite du montant du dépassement du seuil de comparaison, jusqu'à parfois être totalement supprimée dans certains cas de figure. Par ailleurs et pour éviter de pénaliser les assurés ayant connu une réduction d'activité avant leur passage en invalidité, le seuil de comparaison peut désormais être fixé soit au niveau du salaire de la dernière année d'activité avant le passage en invalidité, soit au niveau du salaire annuel moyen des dix meilleures années d'activité, selon la règle la plus favorable à l'assuré. Ainsi, la réforme a introduit la mise en place d'un seuil alternatif. Enfin, ce seuil de comparaison est désormais limité au plafond de la sécurité sociale, soit 3 666 euros bruts par mois en 2023, soit une augmentation de 6,9 % par rapport au niveau de 2022. C'est sur ce point plus spécifique que des inquiétudes sont formulées. En effet, certains assurés, dont les revenus étaient supérieurs au plafond de la sécurité sociale, sont susceptibles de voir leurs revenus diminuer du fait de la réforme. Le choix de la mise en place d'un plafonnement de ce salaire de comparaison parait justifié au Gouvernement pour deux raisons : la première de ces raisons réside dans le principe même de la pension d'invalidité qui est un revenu de remplacement lié à la perte de capacité de gain des assurés. Il s'agit donc d'une prestation sociale qui n'a pas vocation à compléter des revenus d'activité au-delà d'un certain seuil. Par ailleurs, la réforme n'entraine pas une suppression systématique de la pension des assurés dont les revenus seraient plafonnés. Ils peuvent en effet cumuler leur revenu d'activité plafonné et une pension d'invalidité qui n'est réduite qu'à hauteur de la moitié du dépassement du seuil de comparaison, ce qui permet un cumul partiel. En outre, le calcul de la plupart des prestations contributives de sécurité sociale, est fondé sur la prise en compte d'un revenu plafonné ; la deuxième de ces raisons repose sur le fait que cette réforme a fait plus de gagnants que de perdants. En novembre 2022, seul 1 % du total des pensionnés d'invalidité ont fait l'objet d'une réduction de pension en raison du plafonnement du seuil de comparaison. Ces perdants conservent par ailleurs un niveau de ressources satisfaisant, dans la mesure où ils ont des revenus au moins supérieurs à 3 666 €. En revanche, l'application du seuil de comparaison au niveau du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) a permis à près de 8 % des pensionnés d'invalidité et 26 % de ceux qui exercent une activité professionnelle de voir une augmentation de leurs revenus. C'était l'objectif de la réforme et il est ici pleinement rempli. Il existe toutefois quelques situations où les personnes voient leur montant de pension d'invalidité baisser voire ramener à zéro, ces situations méritent d'être expertisées et une réponse sera apportée si des erreurs étaient constatées. Aussi, des mesures rectificatives sont envisagées. Sans revenir sur le fondement du mécanisme de plafonnement qui est un principe appliqué aux différentes prestations sociales, il pourra être relevé pour permettre le maintien des pensions d'invalidité à la grande majorité des perdants actuels de la réforme. Par ailleurs, le changement des modalités de calcul n'aurait pas dû entraîner de réclamation d'indus de la part des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM). Des instructions ont été envoyées à l'ensemble du réseau des CPAM afin de ne pas notifier les indus. Ainsi, les personnes concernées n'en paieront pas. Cela avait été un engagement pris lors du vote de la réforme. Enfin, certains assurés ont signalé une interruption du versement de la part complémentaire, attribuée par leur organisme de prévoyance, en raison de l'abaissement à zéro de leur pension d'invalidité, alors même que leurs droits sont ouverts. Les organismes complémentaires de prévoyance seront conviés pour échanger avec eux sur ce sujet, leur partager l'analyse juridique du Gouvernement et leur exprimer le souhait de ce dernier de trouver une solution rapide et concrète à ce désengagement de leur part.

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