Intervention de Christine Arrighi

Séance en hémicycle du lundi 7 novembre 2022 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2022 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Arrighi :

Ce deuxième projet de loi de finances rectificative de l'année prévoit au total 2,5 milliards d'euros de dépenses supplémentaires. Parmi ces dépenses, mentionnons le soutien financier de 275 millions d'euros aux universités, aux opérateurs de recherche et aux Crous pour faire face aux surcoûts énergétiques, ainsi que les 200 millions d'euros destinés à couvrir l'augmentation des dépenses de carburant de l'armée. Le chèque énergie exceptionnel qui sera versé à 12 millions de foyers constitue la principale mesure de ce texte ; s'y ajoute la prorogation de la ristourne gouvernementale sur le carburant, de 30 centimes par litre, dont le coût est estimé à 440 millions d'euros.

Dans le prolongement de celle-ci, nous vous proposons de nouveau une mesure beaucoup plus efficace et extrêmement peu coûteuse : la limitation de la vitesse à 110 kilomètres heure sur l'autoroute. Cette mesure, évoquée depuis le Grenelle de l'environnement il y a presque vingt ans et proposée à nouveau par la Convention citoyenne pour le climat, avait été écartée par le Président de la République qui la jugeait impopulaire. Or rouler à 110 kilomètres heure au lieu de 130 permet de réduire de 20 % le carburant consommé et de 20 % les émissions de gaz à effet de serre : c'est donc une mesure compatible avec le plan de sobriété du Gouvernement, qui préserve en outre le pouvoir d'achat, qui réduit notre dépendance aux énergies fossiles et nous permet de retrouver une souveraineté énergétique, qui améliore la balance des paiements et qui – là est l'essentiel – sauve des vies humaines. Les Françaises et les Français ne s'y trompent pas, comme le montre le sondage Ifop du mois de juillet : 63 % des personnes interrogées sont favorables à la limitation de vitesse à 110 kilomètres par heure sur l'autoroute. Hier encore, un sondage de l'institut Elabe indiquait que sept Français sur dix soutenaient cette mesure. Le Président de la République devrait donc revoir ses positions.

Stanislas Guerini lui-même, ministre de la transformation et de la fonction publiques, approuve cette évolution. Il a affirmé la semaine dernière avoir demandé – simplement « demandé », certes – à l'ensemble des agents publics de rouler à 110 kilomètres heure avec leur véhicule de service sur l'autoroute. Je le disais, cette mesure est compatible avec la maîtrise de la dette financière et la réduction de notre dette climatique. J'insiste à nouveau, les trajets en voiture sont à l'origine de plus de 50 % des gaz à effet de serre émis par le secteur des transports, ce qui représente 16 % de l'ensemble des émissions nationales. Cette mesure efficace et peu chère !

Venons-en au volet des recettes du texte. Celles de TVA sont revues à la baisse, ce qui traduit la surestimation par le Gouvernement de leur dynamisme. Selon le président du HCFP, interrogé en commission des finances, il ne s'agit pas d'une baisse mais simplement d'une « croissance […] amoindrie », de 9 % au lieu de 11 %. En tout état de cause, vous conviendrez avec moi qu'il s'agit bien d'un recul par rapport aux prévisions du Gouvernement. Cela interroge à nouveau sur la pertinence, d'une part, de la stratégie de suppression de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de compensation de celle-ci par l'octroi d'une fraction de TVA, et, d'autre part, du financement de l'audiovisuel par la TVA affectée.

Cette stratégie pourrait fragiliser davantage les finances des collectivités, mais également l'audiovisuel public : en fonction de la conjoncture économique ou des priorités gouvernementales, les moyens qui lui seront attribués par l'affectation d'une part de la TVA sont susceptibles de diminuer, entraînant inévitablement une dégradation de la qualité de service. La production de l'information par l'audiovisuel public nécessite des ressources autonomes et ne doit pas dépendre de la couleur politique d'un gouvernement.

Par ailleurs, nous constatons la hausse des recettes de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux sur le capital. Elle atteste que les revenus du capital sont dynamiques et qu'une véritable contribution de solidarité sur les superprofits et les superdividendes est possible. Pourtant, le Gouvernement a combattu cette mesure en recourant au 49.3, sans qu'elle ait même été examinée !

Nous regrettons que tous les secteurs ayant réalisé des superprofits ne soient pas mis à contribution. Cela aurait contribué à réduire davantage le déficit public, tout en finançant des mécanismes de solidarité.

Enfin, les mesures d'urgence du projet de loi devraient être accompagnées de réformes structurelles favorables à la planification écologique, à la sortie des énergies fossiles et au développement des emplois verts non délocalisables. Le vote du groupe Écologiste – NUPES sur ce texte dépendra des avancées du Gouvernement pendant son examen et de l'adoption de mesures en faveur d'une écologie sociale.

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