Intervention de Meyer Habib

Séance en hémicycle du 26 juin 2014 à 9h30
Mise en accessibilité des établissements recevant du public des transports publics des bâtiments d'habitation et de la voirie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre assemblée achève aujourd’hui l’examen du projet de loi habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées.

Ce texte a vocation à préserver et à poursuivre la politique en faveur des personnes souffrant de handicap. Cette politique, naturellement au coeur de l’exigence de cohésion sociale et de solidarité nationale, très chère au groupe UDI, a été initiée par la loi du 30 juin 1975.

Revenons sur l’historique.

Le principe d’une mise en oeuvre progressive de l’accessibilité du cadre bâti et des transports au 1er janvier 2015 a été consacré par la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, 2005 ayant ainsi constitué le point de départ d’une véritable mobilisation de l’ensemble des acteurs publics et privés visant à éliminer l’intégralité des barrières susceptibles d’entraver l’accomplissement personnel et professionnel des personnes handicapées.

Pour autant, force est de constater aujourd’hui qu’en dépit de l’engagement de l’ensemble des acteurs publics ou privés, la France, hélas, ne sera pas au rendez-vous du 1er janvier 2015 prévu par la loi. De nombreux retards ont en effet été constatés. Ils sont principalement dus à la sous-estimation de l’ampleur du chantier à mener, à une évaluation imparfaite du coût des travaux nécessaires, à la complexité des règles à respecter et à un manque d’harmonisation des pratiques des commissions consultatives départementales de sécurité et d’accessibilité.

Nous regrettons toutes et tous, quelle que soit notre sensibilité politique, qu’un temps précieux ait été perdu depuis la loi de 2005. Pour autant, en abordant ce débat si essentiel, notre groupe a fait le choix résolu de ne pas pointer du doigt les défaillances des uns ou des autres, considérant que la seule et unique exigence à laquelle nous devions désormais répondre était la poursuite des efforts engagés.

Telle est l’ambition de ce projet de loi, qui vise à prolonger au-delà de 2015 le délai de mise en accessibilité, tout en garantissant que ce dispositif d’exception ne fragilisera pas la dynamique engagée. Il prévoit la création d’un outil de pilotage, l’agenda d’accessibilité programmée, ou Ad’AP, qui permettra à un propriétaire ou à un exploitant d’obtenir un délai supplémentaire pour la mise en accessibilité, dès lors qu’il s’engage sur un plan de travaux pluriannuels ainsi que sur leur programmation financière.

Vous conviendrez que nous aurions préféré avoir un vrai débat, ce que ne permet pas, hélas, le recours à l’habilitation, celle-ci permettant au Gouvernement d’avoir recours aux ordonnances.

Je concède cependant et comprends qu’en l’espèce, le recours aux ordonnances semble ici constituer le véhicule le plus efficace pour mettre rapidement en oeuvre les outils nécessaires pour préserver et prolonger l’ambition affichée par la loi du 11 février 2005. En revanche, le choix de cette méthode imposait au Gouvernement d’apporter des réponses précises à la représentation nationale. Or, pour notre groupe, de fortes interrogations subsistent.

Nous avons d’abord une interrogation lourde sur la méthode. Il est regrettable que nous soyons obligés de légiférer à nouveau aujourd’hui et que nous donnions ainsi l’impression aux personnes handicapées et à leurs proches que la dynamique engagée en 2005 subit un coup d’arrêt. Je vous pose donc une nouvelle fois la question, madame la secrétaire d’État, ne devrait-on pas envisager cette fois-ci une méthode différente avec des rendez-vous réguliers, impliquant l’ensemble des acteurs engagés au service de cette démarche ? Nous pourrions peut-être ainsi anticiper les éventuelles difficultés futures et définir en amont des solutions consensuelles pour y répondre rapidement.

Nos débats ont permis de favoriser la diffusion des solutions innovantes et efficientes de mise en accessibilité retenues sur chacun des territoires et de compléter le suivi quantitatif par une évaluation qualitative, mais les dispositions proposées ne nous semblent répondre qu’imparfaitement à cet objectif.

Une autre interrogation, également lourde, porte sur le financement de cette loi. Malgré le report de la date butoir du 1erjanvier 2015, la mise en oeuvre de l’accessibilité suppose que les collectivités territoriales consentent un effort financier important. Or le Premier ministre vient d’annoncer qu’elles seront ponctionnées pour un montant de 11 milliards d’euros. Il est donc à craindre qu’elles soient contraintes de sacrifier leurs dépenses d’investissement pour respecter les obligations d’accessibilité. Encore une fois, en se contentant de préciser que les ressources du fonds créé par la loi seront exclusivement consacrées à la mise en accessibilité, notre assemblée n’a pas véritablement répondu aux inquiétudes des élus.

La commission mixte paritaire, qui n’a adopté que des amendements de précision rédactionnelle aux articles 1eret 3, n’a pas bouleversé l’équilibre de ce projet de loi. Elle ne l’a pas non plus amélioré. Les imperfections et les inquiétudes qui demeurent imposent au Gouvernement de maintenir un dialogue constant avec la représentation nationale et avec l’ensemble des acteurs publics et privés, engagés en faveur de l’accessibilité.

La loi d’orientation du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées a posé le principe d’une mise en oeuvre progressive de l’accessibilité. Près de quarante années plus tard, nous prendrons nos responsabilités pour faire de l’accessibilité une réalité.

Vous l’avez peut-être compris, notre groupe soutiendra ce projet de loi car nous estimons que l’objectif qu’il vise est essentiel.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion