Intervention de Arnaud Richard

Séance en hémicycle du 10 septembre 2013 à 21h45
Accès au logement et urbanisme rénové — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Richard :

Monsieur le président, madame la ministre, madame et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner un texte de 108 articles dont la complexité et la technicité embrassent divers domaines de la politique du logement et de l’urbanisme.

Notre première impression à la lecture de ce projet de loi est celle d’un décalage profond entre, d’un côté, ce véritable festival normatif et, de l’autre, la virulence de la crise du logement que traverse notre pays, crise dont les derniers chiffres communiqués par votre ministère montrent qu’elle a même tendance à se pérenniser.

Selon les estimations les plus optimistes, 330 000 logements devraient être construits d’ici à la fin de l’année. Je ne vous ferai pas l’affront de vous rappeler les objectifs fixés par le Président de la République dans ce domaine.

Le besoin réel des Français en la matière – Marc-Philippe Daubresse l’a très bien dit –, c’est la production, la production et encore la production. Or, madame la ministre, le compte n’y est pas.

Malheureusement, je n’ai pas trouvé de dispositions dans ce projet de loi qui permettent d’atteindre cet objectif. Sur un sujet aussi grave, je vais essayer – vous me connaissez – d’avoir une approche nuancée de ce texte, mais c’est avec une profonde déception que nous abordons son examen, avec le sentiment que son volume est inversement proportionnel à la force de la réponse proposée.

S’il constitue, à nos yeux, un rendez-vous manqué avec la crise, votre texte n’en contient pas moins une mesure intéressante – la garantie universelle des loyers – et quelques mesures pertinentes sur l’hébergement d’urgence. Le groupe UDI ne peut que saluer votre dispositif de GUL, petite soeur de la GRL, la garantie des risques locatifs, créée par Jean-Louis Borloo dès 2006.

Espérons que cet outil permettra de limiter les inégalités d’accès au logement tout en rassurant les propriétaires sur les risques de loyers impayés. Mais il faudra la plus grande attention dans l’encadrement de ce dispositif afin de ne pas déresponsabiliser les parties et de ne pas aboutir à un effet inverse de celui qui était visé.

Jusqu’à présent, on a assez peu évoqué dans la discussion les plus fragiles de nos compatriotes – je veux parler de celles et ceux qui se trouvent à la rue, qui vivent en hébergement d’urgence ou même, pour certains, dans leur voiture. Je tiens à saluer, madame la ministre, le fait que vous ayez repris un certain nombre des propositions que nous avons faites avec Mme Hoffman-Rispal, votre suppléante, pour renforcer les commissions départementales de coordination des actions de prévention des expulsions locatives, les CCAPEX, en instituant une saisine obligatoire ; renforcer également les services intégrés d’accueil et d’orientation, les SIAO, en intégrant leurs missions et leur organisation dans la loi ; simplifier enfin la programmation locale et territoriale, par la fusion de l’ensemble des plans départementaux existants et le renforcement des actions des fonds de solidarité logement.

On constate en fait, sur ce point, une certaine continuité par rapport aux principes et aux outils conçus dans le cadre de la refondation mise en oeuvre précédemment par Benoist Apparu. Qu’en est-il cependant, madame la ministre de l’appréciation publique sur la situation de l’hébergement d’urgence, saturé par les déboutés du droit d’asile ?

À ce propos, votre texte ne fait pas justice, à mon sens, à l’accompagnement des personnes accueillies. La refondation prévoyait la mise en place d’un référentiel des coûts pour les structures d’accueil financées par l’État, politique publique qui coûte tout de même aux alentours de 1 milliard d’euros. Qu’en est-il de ce dispositif de rationalisation budgétaire ?

S’agissant de l’encadrement des loyers, nous considérons qu’il était opportun d’apporter une solution pour juguler les augmentations démentielles dans certains cas – je pense évidemment à des zones tendues comme l’Île-de-France.

Là encore, ce dispositif nécessite un cadre précis et une évaluation constante de ses conséquences sur le terrain, faute de quoi il risque de produire des effets inverses de ceux qu’il prétend viser. À cet égard, madame la ministre, je tiens à vous alerter sur les risques d’effets pervers qu’il présente.

La vision intercommunale de l’urbanisme va dans le sens de l’histoire et je me félicite de l’instauration, dans votre projet, du principe du PLU intercommunal. Ce dernier devra conduire, à mon sens, à prendre en compte au niveau intercommunal le taux de logements sociaux.

Ce PLU intercommunal permettra demain à nos territoires de mener des politiques cohérentes dans les domaines du logement, de l’urbanisme, de l’activité économique et de la mobilité. Tout au long de nos débats, notre travail devra consister à accompagner les communes et les intercommunalités concernées dans une logique de concertation sur les politiques d’urbanisme. Sur ce point, il n’y aura pas trop de deux lectures pour trouver une voie pertinente.

Les autres dispositions de ce texte sont d’importance inégale. Je regrette que vous ayez trop souvent fait le choix de stigmatiser les propriétaires et les professionnels de l’immobilier, au lieu de les associer pleinement à la résolution de la crise du logement, laquelle nécessite le concours de tous. Les pratiques abusives de quelques-uns ne sauraient jeter l’opprobre sur l’ensemble d’une profession.

Par ailleurs, nous considérons que vous auriez pu aller plus loin pour assurer la transparence sur les conditions d’attribution des logements sociaux, ainsi que prévenir et renforcer la lutte contre les copropriétés dégradées et les marchands de sommeil. Nous vous proposerons donc différents amendements visant à « muscler » ces parties du projet de loi, en complétant l’éventail des sanctions contre les marchands de sommeil ou encore, en donnant priorité aux plus modestes pour l’accès au parc locatif social.

S’agissant de la partie relative à l’urbanisme, je tiens à appeler particulièrement votre attention sur la profusion de normes nouvelles contenues dans ce projet. On est loin du choc de simplification réclamé à cor et à cri par les professionnels du secteur de la construction, qui ne demandent qu’un peu de souplesse pour être en mesure de construire plus de logements.

J’en reviens donc, comme je le disais d’entrée, à la nécessité d’augmenter considérablement l’offre de logements dans notre pays, à travers une mobilisation massive de tous les acteurs et un assouplissement des procédures qui paralysent nos constructeurs.

Malgré ses 108 articles et ses 250 pages, ce projet de loi n’aura pas l’effet escompté par les annonces de campagne. Nous sommes donc face à une occasion manquée et le groupe UDI ne pourra apporter son soutien à un texte qui passe à côté de l’essentiel.

Cela dit, nous vous donnons rendez-vous sur le budget, pour vous demander à nouveau, comme le groupe UDI ne cesse de le faire depuis des mois, de renoncer à augmenter la TVA dans le bâtiment au 1er janvier 2014. À défaut, la crise du logement, avec son lot de désespérance pour des millions de nos compatriotes, aura encore – malheureusement – de beaux jours devant elle.

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