Intervention de Marie-Lou Marcel

Séance en hémicycle du 9 octobre 2012 à 21h30
Régulation économique outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Lou Marcel :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, le présent texte revêt un enjeu crucial parce qu'il entend combattre une situation qui met à mal l'idée que nous nous faisons de l'égalité républicaine. En effet, notre République ne saurait supporter que des territoires soient inégaux entre eux.

Comment accepter que des territoires d'outre-mer soient, de fait, soumis à un modèle économique qui génère localement une hausse insupportable des biens de consommation courants ? La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, observe que sur cent produits importés de l'hexagone dans les quatre départements d'outre-mer, plus de cinquante sont plus chers de 55 % que ces mêmes produits en France hexagonale. L'INSEE souligne pour sa part que, d'une manière générale, les prix des produits alimentaires, dans ces mêmes départements, sont supérieurs de 40 % en moyenne à ceux pratiqués sur notre continent.

Cette disproportion de prix pour des produits de même nature et de première nécessité devait, en toute logique, amener le Gouvernement à agir. C'est tout l'objet du texte que vous nous proposez, monsieur le ministre : mettre un terme à cette injustice, que rend encore plus criante la situation sociale dans laquelle se trouvent plongées de nombreuses collectivités ultramarines.

Ce n'est un secret pour personne – et nous l'avons encore évoqué récemment à l'occasion de l'examen du projet de loi instaurant les emplois d'avenir – que le taux de chômage, à commencer par celui des jeunes, est encore plus élevé en outre-mer qu'en France métropolitaine. Rappelons que si le taux de chômage dans l'hexagone représente plus de 8 % de la population active, il représentait en 2007 – autrement dit avant l'aggravation de la crise – de 20 à 25 % de celle de Guadeloupe, Martinique, Guyane et de La Réunion. Le taux de chômage des 15-24 ans, qui atteint plus de 19 % dans l'hexagone, s'élève à plus de 55 % en Guadeloupe, à 50 % à La Réunion et à près de 48 % en Martinique.

Cette situation a pour corollaire un pouvoir d'achat souvent moins élevé que sur le continent. Elle génère surtout une tension au sein des sociétés ultra-marines et au sein de la communauté nationale. Nous nous souvenons tous, au mois de décembre 2008, du mouvement social et des barrages dressés en Guyane afin de demander la baisse des prix des carburants. Nous nous souvenons également des mois de janvier et février 2009 avec cette grève générale en Guadeloupe à l'appel du collectif contre l'exploitation outrancière. Ces crises n'auraient pas eu lieu si nous avions su, à temps, mettre un terme à certaines situations aberrantes entravant le développement local.

Il était donc temps qu'une telle situation prenne fin. L'un des axes majeurs du texte est donc de réguler en amont les prix en organisant les marchés, à commencer par les marchés de gros. Il est en outre proposé de mettre un terme à certains monopoles et, notamment, des monopoles d'importation en réprimant les accords exclusifs d'importation. Désormais, les collectivités d'outre-mer pourront saisir directement l'Autorité de la concurrence.

Dans le commerce de détail, le seuil de déclenchement du contrôle des opérations de concentration sera abaissé de 7,5 millions à 5 millions d'euros, permettant le contrôle de presque toutes les opérations portant sur des surfaces de vente supérieure à 600 mètres carrés.

Le texte prévoit notamment la mise en place de dispositifs visant à faciliter les échanges commerciaux entre le marché intérieur des territoires ultramarins et les États voisins de ces territoires. Ce dispositif permettra d'offrir aux productions ultramarines des débouchés sur des marchés nouveaux. Il bénéficiera ainsi tant aux producteurs qu'aux consommateurs.

Il est temps que s'ouvre une ère nouvelle pour l'économie d'outre-mer. Comme vous l'avez dit, monsieur le ministre : « Les consommateurs ultramarins méritent d'avoir, comme leurs compatriotes de l'hexagone, une économie qui fonctionne normalement avec des prix soumis à une pression concurrentielle effective et une liberté d'accès à de nouveaux acteurs économiques. Pour atteindre cet objectif, et compte tenu de leurs spécificités, les économies des outre-mer peuvent et doivent bénéficier d'une régulation spécifique de la concurrence. »

Comme cela a été demandé, il faut mettre en place un panier de la ménagère avec des produits de première nécessité qui devront être vendus en outre-mer au même prix qu'en métropole. Il n'est plus acceptable que les populations ultramarines soient les victimes de la position monopolistique de certains agents du marché et se retrouvent en position de clientèle captive de tel ou tel acteur ou opérateur économique. Il est enfin aberrant de nier les singularités de l'outre-mer et de ne pas lui permettre de mieux commercer avec son voisinage géographique immédiat.

Pour toutes ces raisons, il est urgent de dynamiser et d'aider ces territoires qui contribuent à la richesse nationale, et d'adopter le présent texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, et GDR.)

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