Intervention de Élisabeth Guigou

Séance en hémicycle du 22 avril 2013 à 17h00
Déclaration du gouvernement sur l'autorisation de la prolongation de l'intervention des forces françaises au mali débat et vote sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, à mon tour, je veux d'abord saluer le courage et l'endurance de nos militaires qui, depuis quatre mois, combattent dans un climat et un environnement éprouvants. Cinq de nos soldats sont morts, beaucoup ont été blessés. À cet instant, j'ai comme vous une pensée pour eux et pour leurs familles.

L'intervention militaire de la France, demandée en urgence par le président malien et autorisée par les Nations unies, a rempli ses objectifs. La France, grâce à une volonté politique affirmée et à l'action remarquable de ses forces, a sauvé le Mali du chaos. L'agression terroriste sur Bamako a été stoppée, les villes du nord ont été libérées et l'intégrité du territoire malien restaurée. J'ai pu constater lorsque j'ai accompagné le ministre des affaires étrangères à Bamako au début du mois d'avril à quel point les Maliens – non seulement les autorités politiques, mais aussi la population – nous en remercient.

Rapidité et fermeté de la décision du Président de la République, information régulière du Parlement par le Premier ministre et les ministres, que je veux remercier pour leur disponibilité, professionnalisme de nos soldats : l'intervention Serval est un succès dont nous pouvons être fiers et dont nous félicitent nos partenaires européens et internationaux.

Et maintenant ?

Nous devons autoriser la prolongation de notre intervention militaire au Mali pour pouvoir passer le relais dans de bonnes conditions à l'armée malienne et à la MISMA, car la relève implique une stabilisation durable. Or, la reconstruction de l'armée malienne n'est pas encore terminée, même si les soldats maliens se battent avec courage lorsqu'ils sont formés, équipés et encadrés. Les troupes qui composent la MISMA sont encore très hétérogènes et doivent monter en puissance. La mission de formation de l'Union européenne est opérationnelle depuis peu et accueille les premières unités maliennes.

Nous attendons maintenant le vote d'une résolution du Conseil de sécurité qui permettra à la MISMA de devenir une mission des Nations unies. Monsieur le ministre, j'espère que vous pourrez nous apporter des précisions sur les perspectives d'adoption de ce texte.

De nombreux États africains ont fourni des troupes. Les Tchadiens ont subi de lourdes pertes. Ces efforts n'auraient pu se faire sans l'effet d'entraînement de l'intervention ferme et résolue de notre pays. Nous retirer précipitamment casserait assurément cette dynamique. Le rythme de retrait prévu par le Gouvernement me paraît donc adapté à l'évolution de la situation sur le terrain. On se demandera alors pourquoi il est nécessaire de maintenir une force d'appui de 1 000 soldats. Cette force a pour mission d'aider l'armée malienne à empêcher que les terroristes ne se regroupent à nouveau et ne menacent le fragile processus politique de réunification du pays et de rétablissement de la légitimité du pouvoir malien ainsi que la réconciliation nationale malienne.

Nous le savons : tout succès militaire doit déboucher sur une solution politique. À cet égard, deux questions s'imposent.

Il s'agit d'abord de la date et de l'organisation des élections. Pourrez-vous, monsieur le ministre, nous dire où en est le processus électoral ? Les élus et l'administration malienne se réinstallent-ils dans le nord du pays ? Les conditions techniques – listes électorales, cartes d'électeurs, etc. – et politiques sont-elles remplies ? Les élections prévues pourront-elles avoir lieu d'ici à la fin du mois de juillet ?

Ensuite, concernant la réconciliation nationale, nous savons que la reprise du dialogue entre les autorités maliennes du sud et certains groupes du nord, dont le MNLA, le Mouvement national de libération de l'Azawad, basé à Kidal, est difficile. Où en est-on du dialogue entre le nord et le sud du pays ? La commission nationale de dialogue et de réconciliation, dont la composition est enfin complète, a-t-elle avancé dans ses travaux ?

De même, nous savons que les versements promis par la conférence internationale des donateurs de janvier dernier arrivent lentement. Peut-on s'attendre à une accélération en la matière ?

Enfin, après le succès militaire, la stabilisation du pays dans la durée exige qu'une véritable politique de développement soit mise en place. Force est de constater que l'aide internationale conséquente qui a été apportée au Mali au cours de ces dernières années n'a pas permis de développer suffisamment ce pays. Il convient donc de revoir nos méthodes, de réévaluer nos priorités d'action mais aussi notre coordination avec les autres États, l'Europe et les institutions internationales. Vous nous direz, messieurs les ministres, ce que vous attendez de la réunion prévue à Bruxelles le 15 mai prochain.

C'est pour consolider l'éradication des groupes terroristes, la stabilisation politique, la réunification du pays et son développement économique et social que nous devons permettre à nos forces de rester au-delà de ces quatre premiers mois sur le sol malien. Il faudra ensuite tirer les enseignements de notre opération au Mali et formuler des propositions pour une solidarité européenne plus marquée. Le Conseil européen du mois de décembre sera un moment important pour un engagement, je l'espère, plus résolu et plus concret de l'Union européenne et pour un partage du fardeau dans le cadre de la défense européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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