Intervention de Erika Bareigts

Réunion du jeudi 25 mai 2023 à 14h10
Commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la constitution

Erika Bareigts, maire de Saint-Denis de La Réunion, ancienne ministre des outre-mer, ancienne députée :

À certaines périodes, les dotations ont été clairement diminuées et il a été demandé aux collectivités locales de ne pas sortir du cadre qui leur était assigné, sous peine de sanctions dans leurs dépenses de fonctionnement. Plus généralement, les gouvernements peuvent être tentés de diminuer les dotations accordées aux collectivités locales.

Ensuite, d'autres mesures peuvent porter préjudice à l'action des collectivités locales. Je pense notamment à la détérioration de la présence des services de l'État sur les territoires, qui a un impact certain, notamment en matière économique. La faiblesse des pôles C des directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) a toujours constitué un véritable problème. On peut voter des lois pour accroître le respect de la concurrence ou combattre les monopoles, si les services de l'État ne sont pas suffisamment forts pour mener le contrôle et la sanction, l'impact sera inexistant sur les territoires.

Par ailleurs, l'activité économique, la richesse et donc le pouvoir d'achat peuvent être affectés par la manière dont l'argent national vient soutenir la dépense publique des collectivités locales. J'ai été auditionnée par le Sénat et interrogée sur les règles d'appel à projet du fonds exceptionnel d'investissement (FEI). Lorsque l'on met à disposition de l'argent de l'État, parfois sur des volumes très importants, les collectivités doivent être suffisamment musclées pour répondre aux appels à projet dans un délai relativement court. Dans le cas du FEI, ce délai est de quelques jours, quelques semaines à peine. Par conséquent, il est nécessaire d'établir un travail plus collaboratif et fondé sur une meilleure confiance entre les collectivités locales et l'État.

Permettez-moi de prendre l'exemple du traitement des déchets pour illustrer mon propos. À La Réunion, le coût du traitement de certains déchets, notamment les déchets dangereux est aberrant. Les collectivités locales payent le transport de certains déchets, alors qu'il serait possible d'organiser le traitement dans le bassin de l'océan Indien. Ceci est d'autant plus regrettable qu'un déchet peut devenir un produit, comme nous avions pu le voir en Martinique. À La Réunion, le pneu pourrait passer du statut de déchet à celui de produit.

Malheureusement, lorsque le marché est trop restreint, la maquette proposée ne peut avoir de rentabilité économique. La solution consiste donc à élargir le marché et à modifier les règles pour négocier des approches différentes sur le bassin économique. Nous pourrions peut-être alors nous améliorer sur certains sujets.

Il est également possible d'évoquer le sujet de l'alimentaire. Il y a trois semaines, je me suis rendue à Madagascar et j'ai pu constater qu'il existe un potentiel pour la transformation des produits agricoles et des produits de l'élevage. Nous manquons d'espaces pour disposer d'une industrie agroalimentaire de transformation. Si nous raisonnons en termes de bassins, il devient possible de réfléchir au raccourcissement des circuits. Aujourd'hui, un poisson pêché aux Seychelles part dans l'Hexagone pour être mis en conserve et la conserve Petit Navire redescend ensuite pour être vendue dans les grandes surfaces à La Réunion.

Dans ces domaines, il me semble possible d'accomplir des choses, mais cela nécessite une révolution, notamment mentale, mais également une révolution dans les approches. Pour y parvenir, il est nécessaire de susciter un engagement politique immense pour modifier certains accords qui aujourd'hui nous empêchent d'agir.

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