Intervention de Saïd Ahamada

Réunion du jeudi 30 mars 2023 à 9h00
Commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la constitution

Saïd Ahamada, directeur général de L'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) :

Pour répondre à M. Ratenon, sur la capacité ou non à négocier les prix, je pense qu'il faut étudier les moyens dont nous disposons pour faire baisser les prix dans le respect de la législation. En effet, il faut respecter le droit de la concurrence, et voir, notamment, à ce titre, jusqu'où nous pouvons aller dans des procédures de gré à gré, comment rédiger les appels d'offres et si les discussions de gré à gré sont limitées juridiquement. Si nous mettons en place un appel d'offres, nous serons conduits à choisir une compagnie. Quelle incidence une telle décision aura sur la desserte des compagnies qui ne seront pas choisies ? Il ne faut pas que l'appel d'offres ait pour effet que des compagnies s'en aillent des territoires. Quid des endroits où il y a un quasi-monopole ? Je pense notamment à Mayotte, où, concrètement, si nous lançons un appel d'offres, à mon avis la compagnie ne répondra pas. Ce territoire ne compte quasiment qu'un seul opérateur aérien. Tous ces éléments sont donc à prendre en considération dans la réflexion.

Je tiens à rassurer M. Ratenon sur le fait que je suis extrêmement préoccupé par cette question. Nous travaillons sur une proposition à soumettre au ministre des outre-mer et au Gouvernement. Nous explorons toutes les voies possibles pour y parvenir, avec les avantages et les inconvénients.

Je consulterai les compagnies prochainement lorsque j'aurai terminé mon tour des territoires, d'ici un mois et demi, justement pour voir dans quel état d'esprit elles sont et voir comment nous pouvons travailler ensemble pour faire baisser les prix.

La partie la plus importante de mon activité aujourd'hui est consacrée à savoir comment nous pouvons faire pour que le reste à charge des Ultramarins soit le plus faible possible et que l'accompagnement soit de qualité.

Des questions portaient sur l'impact de l'aide à la continuité territoriale sur le prix des billets d'avion. Faut-il penser que, puisqu'on apporte une aide, les compagnies en profiteraient, soit pour augmenter les prix, soit pour conforter leurs marges ? Ce n'est pas le cas, à mon sens.

D'abord, cela supposerait, si elles ont augmenté les prix, en profitant de notre aide, que les bénéficiaires sont capables de payer ces prix-là. D'après nos observations, tel n'est pas le cas.

Deuxièmement, nous apportons des aides à 70 000 personnes. Or les chiffres de la DGAC indiquent que les rotations permettent de faire voyager 4 millions de personnes. Ainsi nos aides concernent 70 000 personnes sur 4 millions de voyageurs.

À mon sens, les compagnies n'ont pas grand intérêt à augmenter les prix pour profiter de l'effet d'aubaine des aides de LADOM. Par ailleurs, ce dispositif ne leur coûte rien puisque nous ne leur demandons pas d'y participer. Cette question se poserait si nous fixions un prix maximum. S'agissant de l'ACT, nous donnons un bon que les personnes utilisent. L'utilisation de ce bon n'a aucune incidence sur la compagnie car le prix du billet ne change pas.

Cette question, qui est une préoccupation de la représentation nationale, est donc aussi la nôtre. Nous devons cependant mesurer les impacts des mesures ; c'est pour cette raison que je parlais tout à l'heure de solutions pérennes. En effet, il ne faudrait pas que nous venions fragiliser la situation ou introduire un mécanisme qui soit contreproductif à terme pour les bénéficiaires ou même pour les territoires.

Sur la question portant sur les compétences à ramener sur les territoires, LADOM met en œuvre un dispositif de l'État. Si le CIOM, le Gouvernement ou la représentation nationale nous autorisent demain au 1er janvier à travailler cette question de mobilité dans les deux sens, de retour ou d'installation, nous le ferons. Par définition, un dispositif de l'État me semble être destiné à tous les Français ; je ne vois donc pas comment nous pourrions le limiter dans la loi et le réserver à telle ou telle catégorie de Français. En revanche, ce qui est clair dans notre esprit, c'est que rien ne se fera sans les collectivités locales.

Nous ne pouvons pas imaginer de retour ou d'installation si cela ne se fait pas en partenariat avec les collectivités territoriales. Il n'y aura donc pas de retour ou d'installation qui seraient imposés dans les territoires, je tiens à le dire ; en tout cas, ce n'est pas ce que je défendrai. Il faut que cela se fasse avec les collectivités locales. Il faut que les entreprises, les acteurs locaux et les élus locaux nous disent dans quels domaines ils ont besoin de compétences. Lorsque ces compétences se trouvent chez les Ultramarins de l'Hexagone, il faut évidemment les accompagner. Il faut que les collectivités locales nous disent quels types de profil elles souhaitent et les catégories de personnes qu'elles souhaitent accompagner. Nous le ferons vraiment en partenariat avec elles.

À partir du moment où l'on travaille sur cette question du retour ou de l'installation, il faut qu'on travaille sur des questions périphériques : la question du logement, sur des territoires qui parfois sont des zones tendues, la question des services publics associés, celle de l'accompagnement – dont celui du conjoint –, etc. Tout cela ne peut se faire – car ce n'est pas notre métier – qu'avec les collectivités territoriales, pour que nous parvenions à ce que ces compétences s'installent de manière pérenne, et servent évidemment ceux qui sont appelés à bouger, mais aussi, et peut-être surtout, les territoires ultramarins, qui, aujourd'hui, ont un besoin criant, sur certains territoires, de compétences nouvelles.

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